Est-ce la fin d'une mesure controversée ? L'obligation vaccinale concernant le Covid-19 peut être levée, considère la HAS, saisie par deux fois par la Direction générale de la santé (DGS) sur ce sujet «très sensible», a rappelé le Pr Dominique Le Guludec, présidente du Collège de la Haute Autorité de santé (HAS). Une large consultation publique a permis de recueillir l'avis des parties prenantes entre le 20 février et le 3 mars - avec «des avis rendus extrêmement contrastés» parmi les 215 contributions, a-t-elle précisé, avant de rappeler que ces recommandations correspondent à un premier volet consacrés aux vaccins qui font l'objet d'une obligation pour les professionnels du soin : la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, l’hépatite B et la Covid-19.
Pas d'obligation mais une forte recommandation
«Nous avons choisi de préconiser une recommandation forte des professionnels contre le Covid-19, et non plus une obligation», a ainsi expliqué le Pr Dominique Le Guludec, tout comme pour la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, dont la vaccination devrait également «être fortement recommandée chez les étudiants et professionnels», à l'exception de Mayotte «où elle devrait rester obligatoire (compte-tenu de la faible couverture vaccinale et de la circulation du germe de la diphtérie sur ce territoire)».
Ce changement de position est justifié par une dynamique épidémique plus favorable, alors que «la pression épidémique a nettement diminué et que les variants sont moins virulents», a expliqué la HAS. «Par ailleurs, la vaccination parmi les professionnels est très élevée (95% des soignants ont reçu un schéma vaccinal complet contre le Covid).
« Nous insistons néanmoins sur l'importance de garder les gestes barrière, notamment en milieu de soin, comme le port du masque. (...) Cette préconisation de lever l’obligation de vaccination contre le Covid-19 ne constitue en rien une remise en question de ses précédents avis et recommandations rendus dans des contextes sanitaires et épidémiques différents», a également tenu à noter la HAS, soulignant au passage que «la levée d'une obligation vaccinale pour les professionnels ne remet pas en question l'intérêt de cette vaccination».
François Braun assure qu'il suivra la recommandation de la HAS
En vigueur depuis 18 mois, l'obligation vaccinale contre le Covid touche visiblement à sa fin. «Je suivrai l'avis de cette autorité scientifique», a réagi François Braun, promettant de «concerter les fédérations hospitalières et les ordres des professions de santé pour définir les modalités de mise en oeuvre» de cette décision, qui fera « rapidement » l'objet d'un décret. «L'idée est d'aller assez vite» et que cette concertation «se passe dans les prochains jours ou semaines», pour pouvoir «réintégrer les professionnels dans de bonnes conditions», a précisé ensuite l'entourage du ministre. L'avis de la HAS sonne en tout cas le glas d'une mesure controversée, imposée en pleine crise sanitaire à 2,7 millions de personnes : soignants mais aussi personnels des hôpitaux et des maisons de retraite, ambulanciers, aides à domicile ou encore pompiers. Depuis septembre 2021, ces professionnels doivent attester d'un schéma vaccinal complet (deux, puis trois doses), sous peine d'être suspendus, sans rémunération. Une minorité de réfractaires était encore dans ce cas mi-mars: «autour de 0,3% des agents hospitaliers» d'après le ministère, et moins de 2 000 personnes parmi les libéraux selon l'Assurance maladie. Selon le ministère de la Santé, un peu plus de 1 000 infirmiers sont concernés. La Fédération hospitalière de France parle, elle, de 4 000 personnes dont 500 infirmiers.
Obligation vaccinale maintenue pour l’hépatite B
«Nous préconisons en revanche le maintien de l'obligation vaccinale pour l’hépatite B, a souligné la HAS, pour les étudiants et pour les professionnels libéraux exerçant leur activité hors d’un établissement ou organisme de prévention ou de soins et qui sont susceptibles d’être exposés à un risque de contamination ou d’exposer les personnes dont ils ont la charge, ainsi que pour les professionnels (...) qui sont exposés à un risque de contamination ou d’exposer les personnes dont ils ont la charge». En pratique, «cette obligation devrait concerner uniquement les professionnels exposés à un risque d’accident d’exposition au sang», a-t-elle précisé. A savoir : « les médecins, chirurgiens-dentistes, pharmaciens, sages-femmes, infirmiers, infirmiers spécialisés, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, manipulateurs d’électroradiologie médicale, aides-soignants, auxiliaires de puériculture, ambulanciers, techniciens de laboratoire médical, et assistants dentaires ».
Importance de maintenir une couverture vaccinale élevée
Au terme de son évaluation, la HAS considère que «tous les efforts doivent être faits pour maintenir une couverture vaccinale élevée chez les professionnels en dehors d’une obligation vaccinale (vaccination gratuite au sein des services, par des équipes mobiles, promotion avec information sur les vaccins, nomination d’un référent dans les services, soutien de la hiérarchie, etc.)», note-t-elle.
- La HAS préconise de renforcer la surveillance de la couverture vaccinale de l’ensemble des vaccinations recommandées et obligatoires des étudiants et professionnels
- La HAS souligne également l’importance de vérifier le statut vaccinal (ou l’immunisation dans le cadre de l’hépatite B) en premier lieu lors de l’entrée dans les études, puis lors de l’embauche et du suivi en santé au travail des étudiants et des professionnels con-cernés pour l’ensemble de leurs vaccinations (i.e. les vaccinations obligatoires comme les vaccinations recommandées) ;
- La HAS préconise de faire évoluer le cadre juridique actuel afin que l’obligation vaccinale des professionnels soit fondée sur des critères liés à la catégorie professionnelle (en fonction du risque d’exposition professionnel et/ou de la personne prise en charge) et aux actes à risque susceptibles d’être réalisés, plutôt que sur une liste d’établissements ou organismes dans lesquels ils exercent.
Pour rappel : concernant la Covid-19 : En France, entre le 1er mars 2020 et le 6 décembre 2022, près de 155 000 contaminations de professionnels travaillant en établissements ont été rapportées. 61 % étaient des professionnels soignants et 12 % des professionnels non soignants (la catégorie professionnelle n’était pas renseignée pour 27 %). Les infirmiers et les aides-soignants étaient les professions les plus touchées. Les professionnels de santé présentent un risque accru de contamination par le SARS-CoV-2 ; Chez les patients, entre le 1er mars 2020 et le 28 novembre 2022, 9 659 signalements de cas de Covid-19 acquis en milieu de soins ont été recensés, dont 77,7 % correspondaient à des cas groupés.
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