Comparés à la population générale des actifs, les professionnels de santé témoignent de plus de difficultés à concilier les deux. Ils sont ainsi près d’un quart (23%), dont 22% d’infirmiers, à déclarer avoir « déjà reporté ou annulé un projet d’enfant à cause de leur carrière », cite le baromètre. En comparaison, cette part s’élève à 15% si l’on prend en compte l’ensemble des Français. Dans le même temps, « 54% des professionnels de santé ayant un projet parental ont déjà songé à changer de métier ou à quitter leur emploi actuel en raison de leur projet », indique-t-il. Soit un chiffre bien au-dessus des 41% au sein de l’ensemble des Français. Dans les deux cas de figure, les parts d’infirmiers qui ont nourri ce type de réflexion sont de 48% - contre 56% d’aides-soignants qui ont indiqué vouloir changer de métier et 50% de médecins, quitter l’emploi qu’ils occupaient. « 32% des Français et 35% des professionnels de santé ne pensent pas que leur profession soit compatible avec le fait d’être parent », est-il également relevé ; c’est ainsi le cas de 35% des infirmiers.
82% des femmes dans la santé disent avoir « ressenti des pressions ou contraintes importantes de leur famille ou de leur travail à cause de leur situation
Des difficultés particulièrement présentes pour les femmes
Sans surprise, les femmes sont particulièrement concernées par ces chiffres. De manière générale, elles se questionnent dans une plus grande part sur leur capacité à concilier vie professionnelle et vie personnelle et désir de parentalité : elles représentent 57% des répondants qui admettent avoir déjà songé à changer de métier ou à quitter leur emploi pour réaliser leur projet d’enfants, contre 35% d’hommes. Elles sont 82% à avoir « ressenti des pressions ou contraintes importantes de leur famille ou de leur travail à cause de leur situation de mère ou de travailleuse. » Au sein de l’ensemble des Français, cette proportion tombe à 53%. Si l’on entre plus dans le détail, plus des deux tiers des professionnelles de santé disent s’être senties coupables à travailler tard le soir ou la nuit ou à assurer des heures supplémentaires en raison de leur situation familiale. Elles sont également 31% à avoir été invitées à se consacrer « davantage à [leur] rôle de mère ». « Lorsqu’un enfant est malade dans le couple c’est bien plus souvent la femme plutôt que l’homme qui doit poser une journée de congé pour s’en occuper : 61% vs 11% auprès des Françaises et 51% vs 23% pour les soignantes », ajoute l’étude.
88% des professionnels de santé éprouvent des difficultés à concilier vie personnelle et professionnelle
Conséquence, les professionnels de santé témoignent de larges difficultés à concilier vie professionnelle et vie personnelle. Ils ne sont que 12% à affirmer y parvenir pleinement, selon les résultats de l’enquête, contre 35% des Français. Un chiffre qui est toutefois à nuancer : sur les 88% qui déclarent éprouver des difficultés, ils sont 82% à témoigner à le faire, mais « avec des contraintes à arbitrer », contre 6% à ne pas y parvenir du tout.
Ces contraintes sont multiples, à commencer par les horaires et les conditions d’organisation du travail qui constituent « les principales raisons évoquées par les professionnels de santé ayant songé à quitter leur emploi ou changer de métier » dans le cadre d’un projet de parentalité. Des soignants pointent ainsi des « horaires difficilement aménageables, en décalé » ou des plannings « non compatibles avec la vie de famille. » Plus d’un tiers des professionnels de santé (38%) interrogés déclarent avoir dû faire évoluer leurs horaires de travail suite à l’arrivée de leur dernier enfant ; soit 10 points de plus que la moyenne en population active. En réponse, la moitié a fait le choix du temps partiel.
62% des professionnels de santé ont rencontré au moins une difficulté liée à la garde de leur enfant au moment de reprendre leur activité professionnelle
Dans ce contexte, les possibilités d’organiser la garde des enfants apparaissent comme un facteur déterminant. « 62% des professionnels de santé ont rencontré au moins une difficulté liée à la garde de leur enfant au moment de reprendre leur activité professionnelle », constate l’enquête. Plus de la moitié citent ainsi la difficulté de trouver ne serait-ce qu’un mode de garde pour leur enfant, et 14% témoignent avoir dû prendre ou prolonger un congé parental devant l’impossibilité de le faire. Et quand ils ont en un, ils sont 53% à juger qu’il ne correspond pas nécessairement à leurs besoins (contraintes professionnelles, intérêt de l’enfant et pour la vie de famille, possibilité de participer facilement à la continuité des soins dans leur service). Les professionnels de santé sont également « les cordonniers encore plus mal chaussés ». 55% des professionnels de santé affirment avoir rencontré des difficultés pour trouver des rendez-vous médicaux nécessaires à la santé de leur enfant, contre 38% des actifs.
L'accompagnement à la parentalité, un facteur d'attractivité pour les établissements
Pour autant, des solutions existent pour aider les professionnels de santé, et notamment les femmes, pour concilier vie professionnelle et maternité, en particulier à l’hôpital. Une majorité de soignantes a pu en bénéficier, précise l’étude, contre seulement une femme sur 4 en population active. Parmi elles, sont cités l’aménagement du poste et/ou du temps de travail pendant la grossesse (36% contre 27%), accueil de l’enfant au sein d’une crèche adaptée aux horaires de travail (29% contre 14%), ou encore aménagement du temps ou de travail des locaux en cas d’allaitement (17% contre 15%). « 55% des professionnelles de santé ayant eu un ou des enfants ont bénéficié d’au moins un de ces aménagements. » À noter que, parmi les répondants, seuls 25% déclarent avoir eu la possibilité de recourir à une crèche hospitalière.
En conclusion, l’étude souligne qu’agir sur le domaine de la parentalité « est un enjeu majeur pour les employeurs et particulièrement les établissements de santé. » Car pour 42% des professionnels de santé, l’accompagnement des projets parentaux représente un critère d’attractivité important chez un employeur. Dans un contexte marqué de pénurie, il est donc bien à ranger aux côtés des rémunérations ou des conditions de travail parmi les paramètres à prendre en compte dans le recrutement.
Les résultats du baromètre s'appuient sur les réponses de 2 010 personnes de 18 ans et plus, dont 1 432 professionnels de santé. L'enquête a été menée en deux temps : du 7 au 15 février 2024 auprès de l'échantillon de Français, et du 1er au 26 février auprès de l'échantillon constitué des professionnels de santé.
*Réalisée pour la MNH par l’organisme de sondage Odoxa
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