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FNESI

"Les étudiants en soins infirmiers ont envie d’être intégrés à l’université", Mathilde Padilla, nouvelle présidente de la FNESI

Publié le 07/10/2021

Modification de la signification de son acronyme et élection d’un nouveau Bureau : la FNESI affiche sa volonté de défendre plus fortement l’intégration universitaire des étudiants en soins infirmiers. Mathilde Padilla, sa nouvelle présidente, présente les enjeux de cette démarche, impulsée depuis trois ans au sein de l’organisation.

Lors de son XXIème Congrès, qui s’est tenu du 30 septembre au 3 octobre, la Fédération Nationale des Etudiants en Soins Infirmiers (FNESI) a procédé à l’élection de son nouveau Bureau et modifié son nom. La voilà devenue Fédération Nationale des Etudiants en Sciences Infirmières, un changement qui illustre sa volonté de soutenir l’évolution des études et du métier d’infirmier. C’est Mathilde Padilla, étudiante diplômée qui poursuit ses études en filière sanitaire et sociale d’action pour la santé et qui s’est engagée à la FNESI en octobre 2020 où elle a occupé la fonction de vice-présidente en charge des affaires internationales et de la culture, qui remplace Bleuenn Laöt à la tête de l’organisation. Enjeux portés par cette modification de nom, combat pour l’intégration universitaire des étudiants en soins infirmiers, échéances électorales de 2022…, elle détaille les perspectives de la FNESI pour l’année à venir.

Quels enjeux la modification du nom de la FNESI recouvre-t-elle ?

Nous menons une réflexion sur le sujet depuis 2019 et la création de la CNU 92 (section en sciences infirmières du Conseil national des universités). Nous avons adopté une posture réflexive et avons enclenché la démarche grâce à des groupes de travail ; nous consultons également énormément les étudiants en soins infirmiers sur le sujet et travaillons en coopération avec nos ministères de tutelle, celui des Solidarités et de la santé et celui de l’Enseignement supérieur et de la recherche. Ces groupes de réflexion ont constitué les prémisses de notre démarche ; le changement de nom représente l’étape suivante, qui est celle de l’intégration universitaire des étudiants en soins infirmiers.


Nous avons ainsi fait le constat que la notion de soins infirmiers était assez restrictive dans l’imaginaire collectif, qu’elle mettait essentiellement l’accent sur l’aspect technique de la profession, qui est évidemment fondamental. Mais il existe aussi la notion de leadership infirmier, selon laquelle l’infirmier adopte une posture réflexive et une démarche globale de prise en charge des patients. Le Canada a longtemps été précurseur sur cette thématique, mais celle-ci s’installe aujourd’hui en France où elle n’est plus du tout étrangère au milieu infirmier. Le métier d’infirmier est voué à évoluer avec le système de santé. Or, le référentiel de formation a plus de dix ans, et il apparaît relativement limité au vu des compétences que les infirmiers développent. Ce terme de science reflète notre volonté de nous inscrire dans une démarche d’intégration universitaire des soins infirmiers (schéma LMD). Nous souhaitons que les études et la profession infirmières soient reconnues, valorisées, par la mise en place de masters et de doctorats qui feront nécessairement évoluer le métier.

Ce nouveau positionnement répond-il à une réelle demande des étudiants ?

 

Nous avons aujourd’hui des étudiants qui ont envie de s’investir et de faire de la recherche. Nous ne pouvons pas le mesurer en chiffres précis pour plusieurs raisons, la première étant que l’on parle très peu de la poursuite des études en soins infirmiers. C’est encore très peu démocratisé . La pratique avancée n’a que trois ans, par exemple. Mais dans le cadre de notre Congrès national, lors d’une table ronde sur la profession et les études infirmières, la majorité de l’assemblée était favorable à la poursuite des études. Énormément d’étudiants nous demandent des formations, et des IFSI nous sollicitent pour former à la poursuite des études. Aujourd’hui, c’est indéniable, les étudiants en soins infirmiers ont envie d’être intégrés à l’université, ont envie de se former. Mais le problème, c’est l’information ; les étudiants ne savent pas comment ils peuvent poursuivre leur cursus après la licence. Les années d’expérience en tant que professionnel peuvent aussi représenter un frein à la poursuite des études. Il y a l’aspect financement, mais il y a aussi le fait que reprendre ses études peut être difficile quand on a exercé plusieurs années comme professionnel.

Quelle application concrète voyez-vous pour la recherche en sciences infirmières dans le système de soin ?

La recherche en sciences infirmières en France n’en est qu’à ses débuts, mais nous constatons qu’elle fonctionne très bien dans les pays voisins. Les protocoles infirmiers (pansements…), la réflexion autour de la prise en charge des patients…, ce sont des éléments qui peuvent être diffusés à des secteurs très variés du soin, comme le secteur libéral par exemple. Les libéraux représentent d’ailleurs un réel enjeu dans les sciences infirmières, car ils sont extrêmement autonomes. La recherche clinique, les secteurs de la santé publique et de la prévention aussi. Ce sont des aspects qui sont déjà inscrits d’une manière ou d’une autre dans le référentiel infirmier et qui sont voués à évoluer dans les prochaines années. De même, l’intégration universitaire des études en soins infirmiers n’est pas une nouveauté. De nombreuses expérimentations en ce sens existent déjà. L’université d’Angers a ainsi créé un département de sciences infirmières qui fonctionne en collaboration avec un IFSI. Les étudiants suivent une partie des cours théoriques à l’université, donnés par des professeurs qui étudient les sciences infirmières, tout en continuant d’aller en stage. Le dispositif fonctionne très bien et les étudiants n’en sont pas moins bien formés. C’est plutôt l’inverse ! Ils ont une expertise plurielle : celles de l’IFSI, de l’université et du terrain de stage, ce qui donne des professionnels qui poussent leur réflexion plus loin et qui ont envie de s’investir dans le système de santé et auprès des patients. Certes, le positionnement de la recherche infirmière dans le système de soin est encore flou, mais son intégration dans notre système de santé s’effectuera sur plusieurs années. Je suis convaincue qu’elle y apportera une réelle plus-value.

Quelles actions comptez-vous mener en ce sens au cours de cette année ?

Tout l’enjeu de cette année va être d’informer. Nous allons en premier lieu organiser de nombreuses consultations auprès des différents acteurs de la formation, à commencer par les étudiants et les universités. Nous allons également poursuivre notre suivi des expérimentations d’intégration universitaires qui sont en cours et promouvoir la notion de « leardership infirmier » auprès de nos étudiants. Il nous faudra travailler en collaboration avec les institutions, mais aussi avec les autres organisations représentantes des professionnels et des étudiants en spécialités afin de soutenir la reconnaissance du métier infirmier. Ce travail va nécessairement s’inscrire sur plusieurs années ; il se poursuit de mandature en mandature, mais les choses s’enclenchent doucement. Les enjeux sont multiples et il nous faut agir auprès de toutes les parties prenantes, y compris le volet politique.

Sur quels autres sujets la FNESI entend-elle travailler ?

Nos autres chantiers, nombreux, s’inscrivent dans cette même logique d’intégration universitaire, à commencer par l’accès pour les étudiants en soins infirmiers aux services mis à disposition des autres étudiants, comme les services de santé universitaires ou de gestion des bourses, le CROUS… Actuellement, la situation est très disparate selon les territoires, car tout dépend des universités. Dans certains territoires, les étudiants n’ont pas de cartes étudiantes ou n’ont pas accès aux restaurants ou aux bibliothèques universitaires ; parfois, on leur demande des frais supplémentaires pour y avoir accès, alors qu’ils paient comme tout le monde les droits d’inscription à l’université et la contribution de vie de campus.


La FNESI a plusieurs missions, à commencer par la formation, l’information et la défense des droits des étudiants. Plusieurs chantiers ont été menés ces dernières années : la suppression des frais complémentaires illégaux , l’augmentation des indemnités de stages, qui sont des combats institutionnels que nous continuerons de mener cette année. Nous avons des projets phare qui reviennent chaque année, comme la semaine du bien-être, le projet du tutorat des pairs par les pairs, qui représente un enjeu majeur pour nous. Et il y a les échéances électorales : les élections universitaires, d’une part, puisque les étudiants en soins infirmiers ont obtenu le droit de vote à l’université l’année dernière, et les élections présidentielles et législatives. Nous accompagnerons, formerons, nos étudiants afin qu’ils se mobilisent et se saisissent de cette opportunité pour être force de proposition. Notre intérêt principal, c’est le bien-être étudiant ; et l’enjeu, c’est de réunir tous les acteurs de la formation autour de cette même cause pour que les étudiants puissent s’intégrer à l’université. Le problème, c’est que les acteurs de notre formation sont nombreux : les régions, les ARS, les IFSI, les universités. Nous devons tous nous mettre d’accord, et ce n’est bien sûr pas évident. Notre souci sera d’encourager l’uniformisation des pratiques sur l’ensemble du territoire. Sur un an, nous ferons de notre mieux. Mais là encore, c’est un travail qui s’inscrit dans la continuité, de mandat en mandat et de Bureau en Bureau.

Journaliste audrey.parvais@gpsante.fr

 

Source : infirmiers.com