Le constat est amer. «Dégradation des conditions de travail et état de détresse du personnel soignant», tel est le bilan dressé par la CFDT Santé sociaux dans sa dernière enquête sur les effectifs des établissements de santé et des Ehpad. Cinq ans après ses précédentes investigations sur le sujet, le syndicat pointe du doigt l'explosion des dépassements d'horaires journaliers. De trente minutes en moyenne de temps supplémentaire journalier en 2018, ils se sont transformés à plus de deux heures par jour en 2023. La gestion de l'absentéisme pourrait être l'une des causes selon la CFDT.
«Les transmissions et l'achèvement d'un soin en sont les causes les plus fréquentes», note le syndicat qui insiste aussi sur la multiplication des «rappels sur repos pour des absences inopinées». La CFDT relève qu'il y a quelques années il était principalement question d'absence programmée. Elle estime donc que l'évolution de l'absentéisme pour cause d'arrêt de travail affecte directement «l'organisation professionnelle et la vie personnelle».
Souvent je ne fais pas une partie des transmissions écrites, par manque de temps et malgré le dépassement de mes horaires de travail. Beaucoup d'heures supplémentaires ne sont pas notées par de nombreux collègues, car on nous demande de ne pas en déclarer trop».
Le ressenti négatif des professionnels
«Une énorme évolution sur le ressenti des professionnels qui démontre une grande dégradation des conditions de travail» : c'est ce que souligne Nathalie Pain, secrétaire nationale chargée de l'Europe et de l'international à la CFDT Santé sociaux dans une vidéo diffusée sur le site Internet de l'organisation syndicale. Les répondants relèvent «des problèmes sur la qualité des soins, la qualité de vie au travail...» Elle note également «peu d'évolution sur les effectifs» en 5 ans, depuis la précédente enquête de 2018.
L'intérim, décrié
Sur l'intérim, les soignants interrogés soulèvent de nombreuses critiques : «les vacataires ne connaissent pas les résidents. Nous devons les encadrer et les guider, ce qui occasionne du stress, de la fatigue et du retard dans le travail quotidien». Le manque d'implication dans les équipes des personnes de passage est également fortement décrié : «l'intérimaire est arrivée encore en retard et très souvent elle ne vient tout simplement pas». Les discours des professionnels révèlent également leur impuissance face à leur charge de travail : «pour m'en sortir au mieux, je préfère commencer ma journée une demi-heure plus tôt. Malgré cela, j'arrive très rarement à prendre une pause repas, même quinze minutes. Souvent je ne fais pas une partie des transmissions écrites, par manque de temps et malgré le dépassement de mes horaires de travail. Beaucoup d'heures supplémentaires ne sont pas notées par de nombreux collègues, car on nous demande de ne pas en déclarer trop».
Le problème est toujours le même : celui de l'attractivité des établissements, qui peinent à recruter mais aussi à fidéliser. Pour remédier à cet état de fait, le syndicat préconise de meilleures rémunérations, en allant plus loin que les revalorisations Ségur, mais aussi la mise en place d'un déroulement de carrières sans blocage dans la fonction publique hospitalière ou encore l'amélioration globale des conditions de travail. Sur ce dernier point, elle cite des espaces de dialogues, des ratios soignants-patients significatifs et des plans d'actions et de prévention. Autre levier : celui de la formation professionnelle, qui pourrait être facilitée.
Découvrez ici l'intégralité de l'enquête «Parlons effectifs» 2023.
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