« Le temps médical manque. » C’est avec ce constat que Gabriel Attal, le nouveau Premier ministre, a ouvert le volet santé de son discours de politique générale devant les députés, mardi 30 janvier. Pour répondre à cet enjeu au cœur des difficultés d’accès aux soins et qui se répercute sur des services d’urgence toujours plus en tension, plusieurs solutions sont sur la table.
Faciliter les passerelles vers les études de médecine
À commencer par l’augmentation des effectifs des médecins par la reconnaissance de l’expérience de certaines catégories de soignants, facilitant les passerelles vers la formation médicale. « Nous devons mieux reconnaitre l’expertise et la volonté des soignants. Une infirmière anesthésiste qui a un bac +5 et plusieurs années d’expérience doit pouvoir rentrer directement au moins en 3ème année de médecine, si elle le souhaite », a-t-il ainsi déclaré. La mesure, a-t-il rappelé, est présente dans la proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins par la territorialisation et la formation, portée par le député Yannick Neuder, qui doit être examinée par la Commission des affaires sociales. Elle vise notamment à pallier les impacts de décennies de numerus clausus ; malgré sa suppression à la rentrée 2021, le nombre de places dans les facultés demeurent encore limitées.
Parmi les autres mesures annoncées pour favoriser l’accès aux soins, Gabriel Attal a évoqué la régularisation des médecins étrangers qui exercent sur le territoire français. « Je vous l’annonce, je nommerai un émissaire chargé d’aller chercher à l’étranger des médecins qui voudraient venir exercer en France », a-t-il ajouté. Il faudra aussi accélérer « le passage de 6 000 à 10 000 assistants médicaux », qui doivent permettre de libérer 2,5 millions de consultations supplémentaires par an.
Un service d’accès aux soins dans chaque département dès cet été
« Dès cet été, chaque département devra être doté d’un service d’accès aux soins (SAS), avec des professionnels organisés pour assurer la permanence des soins », a-t-il ajouté. Et dans les départements où un tel service ne serait pas déployé, « je suis prêt à aller plus loin, en restaurant des obligations de garde pour les médecins libéraux, en soirée ou le week-end, dans leurs cabinets, à l’hôpital ou en maisons de santé », a-t-il prévenu. Gare enfin aux patients indélicats qui ne se présenteraient pas à leurs rendez-vous. « Je souhaite un principe simple qui se traduise par des mesures claires dès cette année. Quand on a un rendez-vous chez le médecin et qu’on ne vient pas, sans prévenir, on paye », a-t-il asséné.
Une prime et une revalorisation pour les infirmières scolaires
Souvent grandes oubliées du secteur de la santé parce qu’elles relèvent en réalité du ministère de l’Éducation nationale, les infirmières scolaires auront droit à une revalorisation. Gabriel Attal a en effet reconnu la nécessité de recruter davantage de ces professionnelles, dont le rôle est critique dans la santé de l’enfant, et de mieux reconnaître leur engagement. « J'ai décidé de verser en mai prochain une prime exceptionnelle de 800 euros aux infirmières scolaires et de revaloriser leur salaire mensuel de 200 euros à compter de cette date », a-t-il indiqué.
La santé mentale des jeunes, "grande cause gouvernementale"
« Le mal-être, les dépressions, les pensées suicidaires ont beaucoup progressé chez les jeunes », a-t-il poursuivi. En réponse, il entend faire de leur santé mentale une grande cause gouvernementale. Une initiative qui était notamment attendue du Sénat, qui appelait la semaine précédente à faire de la santé mentale des jeunes une grande cause nationale. Il a ainsi annoncé vouloir réformer le tout jeune dispositif « Mon soutien psy », qui « n’a pas donné les résultats escomptés », en augmentant le tarif des consultations des psychologues et en permettant aux patients d’y avoir accès sans passer préalablement par un médecin. Mis en place en avril 2022, le dispositif permet en théorie aux plus jeunes d’avoir accès à 8 consultations remboursées chez un psychologue.
Pas d'annonces pour les hôpitaux
En revanche, si les hôpitaux attendaient un soutien plus marqué du Premier ministre, notamment les établissements privés qui rencontrent de fortes difficultés financières, ils en sont pour leurs frais. Pas d’annonce de ce côté, si ce n’est l’assurance que les mesures du Ségur qui tardent encore à être mises en place doivent l’être rapidement. « Les moyens du Ségur de la santé ne sont pas encore arrivés partout. Ces lourdeurs et ces lenteurs sont insupportables. Je veux que cela change rapidement », a-t-il promis, sans pour autant donner plus de précision. Une douche froide pour les établissements dont le déficit, pour certains, a triplé en un an.
« Je regrette que des sujets que nous sommes nombreux à porter - la pluriannualité, la prévention, le Service Public de Santé – aient été oubliés. Je regrette plus encore que les difficultés rencontrées par les acteurs de santé, et par l’hospitalisation privée, n’aient pas été entendues », a réagi dans la foulée Lamine Gharbi, le président de la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP). Il a de nouveau appelé le Premier ministre à agir pour compenser l'inflation et rétablir l'équité entre secteurs professionnel et privé. De son côté, la Fédération hospitalière de France (FHF), si elle salue les engagements pris sur la santé mentale, la permanence des soins et la généralisation des SAS, elle s'inquiète de l'absence, dans le discours du Premier ministre, des sujets liés à la prévention et à une future loi Grand Âge. La question budgétaire demeure également sans réponse, souligne-t-elle, réitérant son appel « à tracer un cap clair des réformes et des objectifs communs à tous les acteurs de santé.»
Enfin, sur le front de la fin de vie, il a réitéré la volonté du gouvernement de parvenir à un projet de loi sur l’aide active à mourir avant l’été : « Ce débat animera notre société. Je le sais. Je souhaite qu’il puisse se tenir dans une volonté d’équilibre et dans le respect des convictions de chacun », a-t-il souligné.
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