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IADE

COVID-19 : engagement, implication et contributions de la filière IADE

Publié le 20/05/2020
IDE covid réanimation

IDE covid réanimation

Dans ce contexte de crise sanitaire sans précédent, le Syndicat national des infirmier(e)s-anesthésistes (SNIA) a souhaité faire un état des lieux de l’implication et du rôle des IADE au décours de la pandémie de CoVid-19. Cette enquête permet de mesurer la participation active de l’ensemble de la filière à l’organisation et à la gestion de la situation inédite à laquelle le système hospitalier français a dû faire face. Comme le précise le SNIA, cet investissement sans réserve s’est parfois fait dans la douleur, au fil des incontestables pénuries d’équipements de protection individuelle, des contaminations et des adaptations plus ou moins justifiées des rythmes de travail et des conditions d’exercice. Il a exigé de l’abnégation et des efforts, mais les professionnels de santé que sont les IADE ont répondu présents et ont assuré leurs missions de soins auprès de l’ensemble de nos concitoyens. Revue de détails.

De par sa formation et son mode d’exercice, la profession d’infirmier(e)s-anesthésistes constitue depuis des décennies une sorte de lien tangible entre les différentes activités de soins spécifiques que sont l’anesthésie, l’urgence, la gestion de la douleur et la réanimation. La crise sanitaire au COVID19 l'a d'autant plus mis en évidence. 

Durant la phase aiguë de la pandémie CoVid-19 , quelle a été la place et le rôle des infirmier(e)s-anesthésistes ? Comment s'est organisé leur temps de travail ? Où se sont-ils déployés ? Pour quel type d'actes ? Avec quelle autonomie ? Et finalement pour quelle expertise et quelle valeur-ajoutée à l'organisation de notre système de soins ? Pour le savoir, le SNIA a diffusé un questionnaire en ligne. 15% des IADE y ont répondu (1984 réponses)*. Précision importante : 10 649 IADE exercent en France sur une population infirmière générale de 700 988.

L’engagement des IADE et EIA dans cette crise épidémique a engendré des changements brutaux des rythmes de travail, la génération d’heures supplémentaires jusqu’au dépassement des critères légaux et sécuritaires habituellement en vigueur.

Une vague épidémique qui nécessite de s'adapter rapidement...

67,13% des IADE déclarent avoir subi des contraintes liées au manque d’équipements de protection individuels (EPI). Si aucune région n’a été épargnée celles, où, selon les professionnels, les contraintes liées au manque de ces équipements ont été les plus ressenties sont la plupart des régions d’outre-mer : la Guadeloupe, la Martinique, Mayotte et la Guyane ; pour la métropole : Normandie, Ile-de-France, Corse et Occitanie. Une seule région obtient un résultat inférieur à 50% : Centre Val de Loire (43,33%).

Brutalement engagés comme l'ensemble des professionnels de santé dans cette crise épidémique d'une ampleur aussi massive qu'inédite, les IADE et les EIA ont vu majoritairement (85,6%) et sensiblement varier leur rythmes de travail, devant s'adapter à de nouvelles amplitudes horaires de travail (passage en 10h, 12h ou 24h). Les heures supplémentaires jusqu’au dépassement des critères légaux et sécuritaires habituellement en vigueur ont concerné 60,98% des IADE. Quant aux congès, 54,38% des répondants les ont vu annulés, alors que 24,27% se les voyaient imposés (dans les zones moins touchées, la désorganisation des plages opératoires a poussé certaines directions à cette mesure) et seuls 26% bénéficiaient d’un dispositif d’autorisation spéciale d’absence.

LES IADE ont montré ce que l'on sait déjà, c'est qu'ils sont, en temps normal, très investis dans la formation intra hospitalière, notamment grâce à leur activité au sein des Centres d’Enseignement des Soins d’Urgence (CESU). Cette implication s'est intensifiée durant la crise sanitaire. En effet, comme le souligne le SNIA, un peu plus de 30% des IADE ont participé à la création/rédaction de protocoles spécifiques. Une proportion qui monte à 68,18% concernant les IADE cadres de santé. 62,94% des IADE et 88, 64% des Cadres de santé ont participé à la formation de personnels soignants (IDE, IBODE, Aides-soignants, Externes, Etudiants en santé). Les thématiques de formation étaient nombreuses mais aussi devenues impérieuses compte tenu des soins très lourds pour les patients Covid : prise en charge globale de patients réanimatoires, mise en place des équipements individuels de protection (habillage/déshabillage), gestion des voies aériennes (intubation, utilisation des vidéo laryngoscopes,…), mobilisation des patients (décubitus ventraux, retournement,…) utilisation de dispositifs médicaux (respirateurs, pousse-seringues automatiques, BIS…), soins infirmiers spécifiques (dilutions, usage des abords vasculaires artériels et centraux, télémétrie …).

La forte activité des cadres IADE dans ces transmissions de connaissances s’explique par leur accès direct aux informations et protocoles spécifiques en vigueur dans les établissements et par la responsabilité qui leur incombe d’organiser rapidement et efficacement les formations indispensables à la sécurité des agents et des patients.

Déployer des moyens humains et des compétences spécifiques

L'enquête le met en évidence : les IADE ont participé activement à la création de filières exceptionnelles d’hospitalisation (70,69% ont organisé la mise en place d’unités de réanimation au sein de leurs établissements) car ils connaissent, de par leurs expériences professionnelles et leur formation, les contraintes spatiales et organisationnelles des soins spécifiques en anesthésie–réanimation. Ils maîtrisent les standards de soins nécessaires en service de réanimation. Pour des régions moins touchées, explique le SNIA, ils ont participé au renfort interrégional (12,5%), nous pouvons noter une forte implication des IADE du secteur privé avec 1/3 de ces déclarants. Ce renfort a pu être effectif pour 43,33% directement via leur ARS et pour 40% via une embauche directe en vacation par le centre hospitalier en tension. 11,11% via une agence d’intérim et 5,55% via l’EPRUS .

De plus, à l’arrivée de l’épidémie en France, les compétences IADE ont été recherchées pour affecter des moyens humains adaptés aux services en tension et à ceux qu’il faudrait créer. La répartition des affectations a été la suivante : urgences : 8,14%, samu/smur : 12,39%, réanimation : 72,03%, bloc opératoire : 76,90%. Le SNIA le souligne, cette forte proportion d'IADE dans les services de réanimation est à souligner car habituellement la place de l’IADE n’y est que rarement valorisée/souhaitée. Autre chiffre important, 12,39% des IADE ont été engagés sur des missions SAMU/SMUR ; il s’agissait d’une nouvelle affectation pour 42% d’entre eux/elles. 34,04% ont réalisé des interventions primaires para médicalisées, notamment auprès de patients COVID (+) et 68,62% ont réalisé des Transports Infirmiers Inter-Hospitaliers (TIIH). Les IADE ont également étroitement collaboré avec les médecins urgentistes lors des transports médicalisés et parfois dans des conditions exceptionnelles comme lors des transferts interrégionaux de longues distances (TGV, aviation civile et militaire). Selon le SNIA, les chiffres obtenus démontrent la polyvalence de la profession, illustrée par la mixité d’exercice qui semble avoir été la norme pour une très large partie du corps professionnel.

La "nouveauté" réside dans la grande adaptabilité et réactivité des IADE dans la transformation de Salles de Surveillances Post-Interventionnelles (SSPI) en véritables services de réanimation pour, le plus souvent, accueillir les patients réanimatoires COVID(-) afin de libérer les places des autres services de réanimation alors dédiés à la prise en charge de patients COVID(+).

Quid des étudiants IADE en formation

La grande majorité des étudiant(e)s infirmier(e)s-anesthésistes (93,68%) a été déployée en service de réanimation. Le prérequis d’exercice infirmier obligatoire de 24 mois avant de pouvoir présenter le concours d’entrée en école d’IADE a souvent permis à l’étudiant infirmier-anesthésiste d’acquérir des compétences spécifiques attendues en réanimation, service des urgences, soins intensifs, SSPI. Les réaffectations d’EIA sur des postes qu’ils occupaient antérieurement à la formation a permis de disposer rapidement de professionnels opérationnels. Pour beaucoup, ils ont été mobilisés par leur établissement employeur lorsqu’ils bénéficiaient de la promotion professionnelle. Les Etudiant(e)s IA ont également largement participé (63,16%) aux renforts inter-régionaux et inter-établissements.



Se déployer en équipe avec une "hiérarchie fonctionnelle"

74,66% des IADE déclarent avoir exercé sous le contrôle d’un médecin anesthésiste-réanimateur (MAR) et 23,11% en association avec un médecin intensiviste réanimateur (MIR). 2,23% ont exercé sous la responsabilité de médecins spécialistes d’organe. Les IADE ont été dentifiés comme "ressource" dans bien des domaines :

  • gestion des voies aériennes et sédato-analgésie (54,70%) ;
  • intubation trachéale de patients (50,34%) ;
  • réglages ventilatoires des patients (70,92%) ;
  • adaptation de la sédation et la curarisation (76,65%) ;
  • pose de cathéters artériels (45,51%) ;
  • transport intra-hospitalier de patients (Scanner, bloc, mutation…) (49,23%).

Pour le SNIA, cet épisode a permis à de nombreux médecins intensivistes de découvrir la profession IADE, ses compétences, ses prérogatives et potentialités.

36,31% des IADE répondants déclarent avoir pu exercer leur leadership lors des changements de position des patients (décubitus ventral)

Un éclairage sur cette spécialité

De par sa formation et son mode d’exercice, la profession d’infirmier(e)s-anesthésistes constitue depuis des décennies une sorte de lien tangible entre les différentes activités de soins spécifiques que sont l’anesthésie, l’urgence, la gestion de la douleur et la réanimation. Pour le SNIA, ces dernières années, ce lien n’a pas toujours été facile à maintenir car les tropismes politiques rationalisant à l’excès les activités paramédicales et médicales ont cherché à enfermer et à réduire l’exercice des IADE à un rôle d’exécutant en anesthésie. Il aura donc fallu une crise sanitaire d’une ampleur rare pour mesurer l’intérêt d’une profession comme la nôtre et démontrer son utilité sociétale en dehors du bloc opératoire

L’autonomie et le leadership des IADE a été un élément important dans la prise en charge des patients COVID(+), en participant activement à leur prise en charge clinique et technique, ils ont libéré du temps médical et sécurisé les filières de soins. A son niveau de compétence et d’expertise, il est incontestable que la profession IADE a fortement contribué, aux côtés des autres professions soignantes, à la résilience de notre système sanitaire dans cette situation exceptionnelle de menace pour l’état de santé de la population française. Et le SNIA de conclure : il faudra que les décideurs politiques prennent enfin la mesure de cet état de fait pour considérer nos potentialités et organiser les futures orientations concernant les professions paramédicales.

* Un questionnaire en ligne a été diffusé aux adhérent(e)s du SNIA et relayé par ses partenaires du 21 avril au 4 mai sur les réseaux sociaux professionnels. Population ciblée:IADE, EIA (étudiants) et IADECS (Cadres de santé). Dans le détail, les répondants sont : 1437 IADE (91,18%), 44 IADE Cadres (2,79%) et 95 EIA (étudiants) (6,03%). Toutes les régions de France ainsi que les DOM ont participé (parmi les plus grands répondants l'Ile de France : 18, 72% et l'Auvergne Rhône Alpes : 16, 18%. Plus petit répondant, Mayotte : à 0,06%. 88,58% des répondants exercent dans le secteur public (Fonction publique hospitalière) 11,42% exercent en secteur privé (il n’a pas été fait de distinction entre le privé non-lucratif et lucratif). Le SNIA ne remarque pas de surreprésentation des régions en tension fortement touchées par l’épidémie de SARS-Cov2 ce qui évite un effet loupe sur l’impact de la crise dans l’activité nationale des Infirmier(e)s-anesthésistes.

Retrouvez les résultats complets de l'enquête du SNIA ainsi que l'abstract qui en résulte.

Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern


Source : infirmiers.com