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Coopération sanitaire et de solidarité nationale entre le Grand Est et l'Occitanie par temps de Covid-19

Publié le 07/04/2020
soignants transfert COVID 19

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transferts patients COVID 19

transferts patients COVID 19

L'optimisation des moyens nationaux est l'un des trois axes de la stratégie de la France dans sa lutte contre la pandémie de Covid-19. Ce qui se décline, entre autres, par des transferts de patients des régions en tension vers celles jusqu'alors plus épargnées. Exemple de coopération sanitaire et de solidarité nationale entre le Grand Est et l'Occitanie par temps de Covid-19.

Des transferts de patients à haut risque mais en toute sécurité avec de fortes compétences déployées par les acteurs du soin.

Pour faire face à l'épidémie de Covid-19, la stratégie de la France – 6e pays le plus touché au monde – s'articule autour de trois axes : limiter la propagation du virus par le confinement ; renforcer les capacités sanitaires, ce qui passe par une augmentation des capacités en réanimation et de la production de respirateurs, un approvisionnement en médicaments dûment assuré et un renfort des personnels ; enfin, optimiser les moyens nationaux. Pour ce faire, il s’agit tout à la fois d’augmenter les équipements et renforts humains, et de transférer les malades.

Une multiplication des transferts de patients en réanimation

Sur ce dernier point, on peut dire que les choses se sont accélérées. Les premiers transferts inter-régionaux, entre régions saturées de patients Covid-19 vers d’autres encore relativement préservées par l’épidémie, ont démarré il y a près d’une quinzaine de jours depuis le Grand Est, première région durement touchée par l'épidémie. Depuis, ils ne cessent de se multiplier. Au total, depuis le 18 mars, 613 patients1 dans un état grave ont déjà été transférés, dont un peu moins des deux tiers depuis le Grand Est. Qu’il s’agisse de transferts aériens, terrestres, par train médicalisé ou par bateau, l’objectif est bel et bien de soulager les hôpitaux et les équipes soignantes des régions saturées, et ce, grâce à des moyens civils et militaires, publics comme privés (Armée de terre dans le cadre de l’opération Résilience, Samu, SDIS, Croix-Rouge française, protection civile, SNCF, Marine nationale, ambulances privées…, avec l’appui des forces de l’ordre).

30 patients du Grand Est transférés vers l'Occitanie

C'est ainsi notamment que, dans le cadre de la solidarité nationale, certains établissements hospitaliers publics et privés de l’agglomération toulousaine (CHU de Toulouse – Purpan et Rangueil, et cliniques2), mais aussi du Tarn-et-Garonne, du Lot, des Hautes-Pyrénées, du Gard, de l’Hérault et de l’Ouest de la région – ont pris en charge entre le 1er et 6 avril au total 30 patients atteints du Covid-19 en provenance du Grand Est après des transferts aériens médicalisés depuis les hôpitaux de Mulhouse et Colmar. Des patients dans un état préoccupant mais qui ont des chances de guérir, selon le Pr Vincent Bounes, responsable du Samu toulousain qui s’est exprimé lors de l’arrivée du premier patient en terre occitane le 1er avril dernier.

Logistique et organisation

Au niveau logistique, une cellule de coordination régionale, instaurée depuis la mi-mars par l’agence régionale de santé (ARS) Occitanie et la préfecture, planifie la répartition de ces transferts sur le territoire régional. Si le CHU de Toulouse reste la première ligne, les établissements disposant de certaines autorisations de soins (urgences, réanimation et soins intensifs) constituent la seconde ligne de front. Le parti pris de la cellule est de ne pas tout centraliser sur le CHU toulousain, explique Fabrice Derbias, directeur du Pôle Toulouse de Ramsay Santé. Et d’ajouter : À ce jour, nous avons en charge 43 patients Covid-19, dont 26 en réanimation, avec une répartition quasi égale sur chacune des trois cliniques du groupe. Cela permet une prise en charge progressive dans tous les établissements. 

Sur le plan organisationnel, le CHU de Toulouse a bien sûr dû, à l’instar de tous les établissements de santé publics et privés, procéder à des déprogrammations d’interventions chirurgicales non urgentes pour dédier des lits à cet accueil. En ex-Midi-Pyrénées, nous avons 245 lits de réanimation possibles [secteurs public et privé confondus], avec une capacité de montée en charge de l’ordre de 200 au besoin, expliquait Marc Penaud, directeur général du CHU toulousain lors de l’arrivée du 1er transfert de patients sur le tarmac de l’aéroport Toulouse-Blagnac le 1er avril. Il y a donc une marge laquelle doit être comparée à la montée en charge en cours du nombre de patients atteints. Au 3 avril, le CHU de Toulouse comptait près de 183 patients Covid+ hospitalisés, dont 63 en réanimation et parmi lesquels 5 en provenance de Mulhouse (sur un total de 1 045 personnes hospitalisées sur l’ensemble de la région Occitanie, dont 322 en réanimation).

Dans le secteur privé, outre les déprogrammations, des réorganisations des services ont aussi eu lieu pour accueillir ces patients Covid-19.  À la clinique de L’Union, nous avons eu des autorisations pour ouvrir plus de lits en réa. Il a donc fallu équiper des unités qui n’étaient pas jusqu’alors dédiées à ce type de prise en charge. Nos équipes de surveillance continue formées par celles de réanimation ont fait preuve de beaucoup d’ingéniosité afin de les équiper avec tout le matériel nécessaire (respirateurs, pousse-seringues…), cite en exemple Caroline Benhayoun, cadre de réanimation au sein de l’établissement.

Formations, simulations et doublures

C’est aussi au niveau du renfort en personnels qu’il a fallu s’atteler : Nous avons opéré des renforts de personnels issus d’autres services, entre autres, des infirmiers de soins généraux, de salles de surveillance post-interventionnelle – SSPI et anesthésistes (Iade) poursuit Caroline Benhayoun. Ce qui a supposé en amont la mise en place de formations ou de doublures. Sur la clinique de L’Union, nous avons formé une centaine de personnes au niveau des consignes de protection, d’habillage. […] Sur la réa spécifiquement, nous avons également organisé des sessions de simulation sur le décubitus ventral (avec un infirmier faussement techniqué) afin d’être au point sur cette pratique qui nécessite au moins quatre soignants dont un médecin. Nous avons encore instauré des doublures quelques jours sur le service de réa concernant la surveillance continue, notamment sur la ventilation. Les équipes médicales ont également été préparées et les médecins réanimateurs ont aussi augmenté leur temps de présence sur ces secteurs, renchérit de son côté Fabrice Derbias.

Une préparation des équipes qui a aussi cours au CHU toulousain dans les services ou au sein de l’Institut de simulation en santé de l’établissement où, depuis plus d’une semaine, près de 1 500 soignants (médecins, infirmiers, internes) ont été formés aux procédures spécifiques à la prise en charge de patients Covid-19, par exemple celles propres aux bonnes pratiques d’habillage/déshabillage ou à la façon d’intuber ou d’extuber3. Le but est d’acquérir de bons réflexes, puisque les patients Covid-19 transférés (des hommes et femmes, âgés de 50 à 70 ans) sont fragiles et actuellement sous assistance respiratoire et placés en coma artificiel.

Des familles à distance mais informées

Quant à l’information aux familles, celle-ci a aussi été revue et optimisée autant que faire se peut. J’ai appelé toutes les familles des patients transférés pour les rassurer et leur donner le numéro du service en leur précisant qu’elles pouvaient nous joindre à tout moment. L’une d’entre elles nous a demandé de lui adresser une photo de son proche témoigne la cadre de réa du Groupe Ramsay Santé. En réa, nous avons aussi des livres de bord sur lesquels les soignants peuvent noter une anecdote, un fait marquant, lesquels sont remis aux patients à leur sortie. La mise en place de tablettes aux patients les plus valides hospitalisés dans les unités Covid-19 est par ailleurs en cours de réflexion indique le directeur du pôle toulousain de Ramsay Santé.

D’autres transferts encore à venir

D’autres transferts du Grand Est vont encore s’effectuer cette semaine indique l’ARS Occitanie. Des établissements de la région toulousaine, de même que ceux de l’Hérault seront ainsi une nouvelle fois mobilisés dans ce cadre. L’agence régionale de santé précise en outre que la région Occitanie pourra également être mobilisée en appui de l’Ile-de-France dans les prochains jours en fonction des besoins estimés par le centre national de gestion de la crise sanitaire.

Les transferts de soignants, l’autre facette dans l’optimisation des moyens nationaux

À pied d’œuvre depuis la propagation du virus sur le territoire national, certains personnels soignants sont épuisés, contaminés, voire dans l’incapacité de poursuivre leur mission de soin (en arrêt de travail ou en éviction, c’est-à-dire mis à l’écart temporairement). Quelques décès sont aussi hélas à déplorer dans la communauté soignante. Le renfort en ressources humaines se révèle donc aussi indispensable dans la stratégie face à l’épidémie de Covid-19. Des soignants des régions jusque-là épargnées (Paca, Nouvelle Aquitaine, Centre-Val de Loire…) viennent ainsi désormais prêter main forte à leurs pairs là où cela s’avère nécessaire, notamment en région parisienne. Au départ de l’Occitanie, une soixantaine d’infirmiers volontaires expérimentés en réanimation* et venus de toute la région vont se rendre en Ile-de-France. Une première équipe de cinq soignants du CHU de Toulouse est déjà partie pour cette mission d’appui (d’une durée de 5 à 6 jours) le 1er avril vers un établissement de l’AP-HP. Ils seront notamment rejoints cette semaine par 14 autres soignants volontaires du Groupe Ramsay Santé, les premiers départs ayant eu lieu le lundi 6 avril.

*Exerçant soit dans des établissements hospitaliers publics et privés, soit en libéral, soit dans un autre cadre (retraités, en reprise d’études, militaire, conseil général, CPAM, Éducation nationale)
Source : communiqué de presse ARS Occitanie, 3 avril

Notes

  1. Chiffre global au 6 avril dernier, auquel il faut déduire près de 163 transferts hors Hexagone vers l’Allemagne, la Suisse, le Luxembourg et l’Autriche.
  2. Du groupe Ramsay Santé (cliniques de l'Union, des Cèdres et Croix du Sud), mais aussi cliniques Pasteur, Occitanie et du Pont de Chaume
  3. Selon 20 minutes

Valérie Hedef



Source : infirmiers.com