C’était la grande inquiétude des autorités sanitaires et des professionnels de santé : la pandémie de Covid-19 et son cortège de mesures de lutte contre les contaminations ne risquaient-ils pas d’entraîner une augmentation des suicides ? En réalité, ils ont eu des effets contrastés, comme le démontrait en septembre 2022 un rapport de l’Observatoire national du suicide (ONS).
Un constat qu’est venu confirmer Santé publique France (SPF). Dans son Bulletin épidémiologique hebdomadaire du 4 juillet, qui s’appuie sur une étude sur l'évolution en 2020-2021 des séjours hospitaliers liés à une tentative de suicide dans les établissements de soins aigus durant cette période, l’agence note en effet des « incidences des hospitalisations pour tentative de suicide […] inférieures en 2020 par rapport à celles des années 2017-2019 ». En 2020, le taux pour tentative de suicide est en effet estimé à 13,3 pour 10 000 personnes, contre 14,8 en 2019 et 15,2 en 2019, toutes catégories d’âge confondues.
Vigilance sur les plus jeunes
Pour autant, la situation s’avère inquiétante pour certaines populations, à commencer par les plus jeunes, et surtout les jeunes femmes. SPF relève en effet « une souffrance psychologique [est] encore présente à la fin de la période d'observation chez les adolescents et jeunes adultes, [...] particulièrement impactés par les bouleversements sociaux et économiques induits par la crise sanitaire ». Si le premier confinement a plutôt eu pour effet de diminuer le nombre de tentatives de suicide – « pour les jeunes, le confinement peut avoir diminué la pression scolaire et le risque de stigmatisation et renforcé les contacts parents-enfants dans le cadre de la famille, ce qui pourrait avoir amélioré leur santé mentale », avance SPF – il a ensuite progressivement augmenté chez les 11 à 24 ans après le deuxième confinement, « jusqu’à devenir significativement supérieur à la moyenne de 2017-2019 ». Les restrictions sociales ont « possiblement induit une sensation d’isolement préjudiciable pour la santé mentale des plus jeunes », d’autant plus à un moment charnière « du développement de leur identité », poursuit l’agence.
Un ralentissement de la décroissance des appels vers les centres antipoison pour intoxications volontaires, qui était observée depuis 2018, a également été constaté chez les femmes de 12 à 24 ans à partir de février 2020. En avril dernier déjà, une étude menée par le GHU de Paris alertait sur la fragilité de cette catégorie de population, plus touchée psychiquement par la pandémie. « Si globalement les incidences des hospitalisations
pour tentative de suicide sont inférieures en 2020 par rapport à celles des années 2017-2019, l’analyse de l’évolution de cet indicateur chez les jeunes femmes présente des spécificités qu’il est important de souligner d’un point de vue de santé publique », insiste ainsi SPF.
L’étude comporte cependant des limites : « le recueil des données socio- démographiques reste limité au sexe, à l’âge et au lieu de résidence. Aucune donnée n’est recueillie sur les situations professionnelles, familiales ou scolaires (facteurs de risque de suicide bien connus) qui auraient été pertinentes à étudier dans ce contexte de crise liée à la pandémie de Covid-19 », relève ainsi SPF. Plus globalement, elle recommande de « poursuivre la surveillance » de l’indicateur hospitalier « sur l’ensemble de la population, ainsi que sur les groupes vulnérables ».
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