Soins d’urgences, traumatismes musculaires ou osseux…, la prise en charge infirmière des sportifs de haut niveau ne répond pas tout à fait aux mêmes enjeux que celle de la population générale. D’autant plus quand ces sportifs, comme ceux qui fréquentent les CREPS, sont jeunes et loin de chez eux. Illustration avec Barbara, infirmière qui travaille dans une de ces structures.
Barbara est infirmière au sein du centre de santé du CREPS (Centre de Ressources, d’Expertise et de Performance Sportive) de Bordeaux. Ses patients : des jeunes entre 13 et 22 ans, qui vivent en internat et se forment à une pratique professionnelle de sport de haut niveau. En tout, ce sont 22 pôles qu’accueille la structure, parmi lesquels l’athlétisme, le football, le cyclisme ou encore le rugby. Soit autant de conditions qui induisent une prise en charge infirmière spécifique de ces publics, entre soins techniques d’urgence particuliers, suivis rythmés par les impératifs des fondations sportives, et missions de prévention et de promotion de la santé répondant au jeune âge des patients.
Quelles sont les spécificités de la mission d’infirmiers travaillant auprès de jeunes sportifs, comparées à l’exercice « classique » du métier ?
Nos missions sont relativement similaires. Nous travaillons dans un centre de santé, donc nous réalisons des soins techniques (prises de sang, pansements…) qui se font ailleurs. La différence, c’est que nous sommes au contact d’une population très jeune, avec des enfants qui vivent en internat loin de chez eux et qui font beaucoup d’heures de sport par semaine. La traumatologie représente donc une partie importante de nos missions. Nous prenons en charge fréquemment des blessures de ligaments croisés du genou, notamment, car c’est quelque chose de très spécifique aux sportifs. Les blessures dépendent du sport pratiqué, comme des traumatismes de l’épaule, des entorses graves de la cheville ou du genou… En judo, il y a des fractures du nez, par exemple. Ce sont des choses que l’on rencontre peu en population générale. Sur les 22 pôles que compte le CREPS, les sports de contact comme le rugby, le football américain, le judo provoquent le nombre le plus élevé de blessures ; et les sports comme le roller course ou le BMX sont générateurs de chutes. On réalise donc des pansements assez spécifiques.
Nos missions recouvrent une autre partie, que nous appelons le Suivi Médical Réglementaire (SMR), qui représente une bonne moitié de notre activité. Elle est imposée par les fédérations sportives et correspond essentiellement à réaliser des visites médicales : test de la vue, mesure du poids et de la taille… Nous faisons également passer des électrocardiogrammes et des échographies cardiaques, en présence d’un cardiologue. La fréquence de ces visites est déterminée par les fédérations. En football, par exemple, seule une visite médicale par an est requise, alors que le handball en demande deux. Mais chaque jeune doit obligatoirement en faire une par an. Et enfin, il y a les épreuves d’effort, qui sont très spécifiques au monde sportif et qui ont représenté quelque chose de très nouveau pour moi quand je suis arrivée au CREPS.
En quoi ces épreuves d’effort consistent-elles ?
Elles consistent à faire réaliser des efforts physiques aux jeunes sportifs, en les faisant courir sur un tapis ou pédaler sur un vélo, afin de mesurer leurs rythmes cardiaque et respiratoire. C’est évidemment à but médical ; comme ils sont très jeunes et qu’ils pratiquent le sport de manière intensive, il s’agit de contrôler la manière dont réagit leur cœur lorsqu’il est poussé à l’effort. Dans la pratique, le jeune la réalise un jour où il n’a pas d’entraînement de prévu, car l’épreuve d’effort est assez intense. En premier lieu, nous réalisons un électrocardiogramme au repos, puis un au moment de l’effort. Le médecin interprète ensuite les résultats. Il peut éventuellement demander l’avis d’un autre cardiologue s’il relève des choses particulières. À l’instar des visites médicales, ce sont les fédérations sportives qui déterminent la fréquence de ces épreuves d’effort : certaines exigent d’en réaliser une par an, d’autres en demandent une tous les 4 ans. Cela dépend donc du type de sport. De manière générale, les épreuves d’effort ne sont pas aussi fréquentes que les autres examens, comme l’électrocardiogramme ou les échographies cardiaques. Tous les pôles ne l’imposent d’ailleurs pas. Sur ce point aussi, nous sommes donc vraiment soumis aux directives des fédérations.
Travaillez-vous en pluridisciplinarité et, auquel cas, quel est votre rôle au sein de l’équipe médicale, précisément ?
Au sein du centre de santé, nous sommes effectivement deux infirmiers, et nous travaillons avec deux médecins, qui sont présents de manière permanente, trois kinésithérapeutes, une psychologue, une diététicienne, ainsi qu’avec des vacataires : un ostéopathe et un podologue. Nous avons également un préparateur physique, qui prend en charge la réathlétisation. C’est-à-dire qu’il s’occupe des sportifs qui ont été blessés longtemps ou qui ont eu à subir une opération importante afin de les aider à reprendre progressivement le sport. Il intervient généralement après le kinésithérapeute ou en accompagnement. De notre côté, notre rôle est avant tout d’accueillir les sportifs en urgence quand ils sont blessés. On donne les premiers soins, on effectue les pansements. Si besoin, en cas de traumatologie grave par exemple, nous les orientons immédiatement vers le médecin. Malgré tout, nous ne sommes pas organisés complètement en silo. L’ensemble des professionnels de santé du centre travaille au même endroit. Nous travaillons toujours en équipe, nous nous réunissons toutes les semaines, nous discutons entre nous. Personne n’opère seul dans son coin. Il y a donc un accompagnement du sportif dans sa globalité.
Et puis, en tant qu’infirmiers, nous faisons aussi de la promotion de la santé et de la prévention. Nous nous chargeons de délivrer l’information sur tout ce qui a trait à la contraception, par exemple. Notre porte est toujours ouverte, et les jeunes savent qu’ils peuvent venir spontanément nous poser des questions sur leur santé. Au quotidien, nous sommes également à même de donner des conseils à un jeune sportif diabétique, de le guider et de le suivre. Comme nous travaillons au contact d’une population jeune, nos missions ont nécessairement quelques similitudes avec celles des infirmières scolaires
. En revanche, pour tout ce qui touche aux interrogations spécifiquement liées à la pratique sportive, les jeunes se dirigent plutôt vers les médecins.
Que vous apporte de travailler auprès de cette population de jeunes sportifs ?
Auparavant, j’ai beaucoup travaillé auprès de personnes âgées, en maison de retraite et en libéral. Cela fait désormais deux ans que je suis infirmière au CREPS et, dans la pratique, ce qui est intéressant, c’est que l’activité est extrêmement variée. Il n’y a pas de monotonie, ce qui est plutôt agréable. On reçoit les jeunes quotidiennement et aucun jour ne se ressemble. On les voit tous mais, sur l’intégralité de la saison, on va accueillir régulièrement un peu toujours les mêmes, qui vont avoir des blessures récurrentes. C’est malheureux pour eux, mais il se crée aussi entre nous une vraie relation de confiance. Et puis, il y a la jeunesse. Mes patients sont jeunes, ils vivent des choses à part pour leur âge. C’est tout de même particulier de devoir partir de chez soi à 13 ou 14 ans, de devoir tout gérer d’un coup, le sport, l’école, sans avoir leurs parents au quotidien. C’est très intéressant pour eux d’avoir leur vision et de les accompagner sur ce chemin. Nous sommes un peu des interlocuteurs privilégiés.
Propos recueillis par Audrey ParvaisJournaliste audrey.parvais@gpsante.fr
INTERNATIONAL
Infirmiers, infirmières : appel à candidatures pour les prix "Reconnaissance" 2025 du SIDIIEF
HOSPITALISATION A DOMICILE
Un flash sécurité patient sur les évènements indésirables associés aux soins en HAD
THÉRAPIES COMPLÉMENTAIRES
Hypnose, méditation : la révolution silencieuse
RECRUTEMENT
Pénurie d'infirmiers : où en est-on ?