SANTÉ DES SOIGNANTS

6 recommandations pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles dans la santé

Publié le 22/11/2024

La mission sur les violences sexistes et sexuelles provoquées dans le cadre d'une relation d'autorité ou de pouvoir, a remis ce lundi 18 novembre son rapport au gouvernement. Elle préconise 6 axes pour lutter contre ce fléau dans le secteur de la santé, qui n'est pas épargné.

agression, soignant

« Les violences sexistes et sexuelles sous relation d’autorité ou de pouvoir sont encore malheureusement un fléau qui s’étend bien au-delà des lieux de travail. » C’est la conclusion à laquelle est parvenue la mission sur les violences sexistes et sexuelles (VSS) sous relation d’autorité et de pouvoir désignée par six ministères en mars dernier, à l’issue de 70 auditions menées dans les secteurs du travail, de la santé, de la justice, du sport, de la culture et des institutions politiques.

La santé, un secteur qui pratique encore l'omerta et «l'esprit carabin»

Et son rapport, publié lundi 18 novembre, dresse un constat en demi-teinte. Si depuis 2017, plusieurs réformes destinées à lutter contre ces violences ont abouti, « sept ans après #MeToo, force est de constater la persistance des faits de violences sexistes et sexuelles sous relation d’autorité ou de pouvoir malgré les efforts déjà mis en œuvre pour les prévenir. » Plus de 1,4 million de femmes ont ainsi déclaré avoir subi des VSS hors du cadre familial en 2021, mais seuls 2% ont porté plainte.

Dans le secteur de la santé, ces phénomènes sont de plus en plus « ressentis » et « signalés », avance-t-il, citant le récent baromètre réalisé par l’association Donner des elles à la santé, qui estimait que la parole, si elle se libérait, le faisait encore trop peu. 39% des femmes médecins interrogées y déclaraient avoir été victimes de comportements sexistes au cours de l’année écoulée. Le rapport identifie également les étudiants en santé comme étant particulièrement vulnérables à ces phénomènes de violences. Il met surtout en avant « l’omerta » et « l’esprit carabin » qui caractérisent encore ce secteur, et qui agissent comme des facteurs facilitant l’apparition de ces violences. « Les victimes sont généralement des collègues, des salariées des services paramédicaux ou techniques, des stagiaires, des collaboratrices. Les auteurs abusent de leur pouvoir et de leur position d'autorité, dans un environnement où dominent l'ambiance sexiste et l'esprit carabin », dénonce-t-il ainsi.

La profession infirmière, elle, est exposée à ce phénomène du fait de sa proximité avec les médecins. Mais ce sont moins les VSS qui inquiètent l’Ordre (ONI) que celles provenant des patients, soulignent les autrices du rapport. Pour autant, en février dernier, celui-ci a été sollicité, au même titre que les autres Ordres des professions de santé, à participer à l'actualisation de la circulaire de 2013 qui cadre leurs relations avec le Parquet. « Nous avons lancé ce travail avec Frédéric Valletoux [ndlr : alors ministre de la Santé] avec les autres Ordres, que nous devions poursuivre avec le ministère de la Justice », indique Sylvaine Mazière-Tauran, la présidente de l'ONI. La dissolution est toutefois venue mettre un coup d'arrêt à ce travail. « Mme Darrieusecq, la nouvelle ministre de la Santé, devrait reprendre le dossier. » En attendant, l'Ordre a mené sa propre enquête auprès des inscrits à son tableau pour évaluer la fréquence de ces VSS. « On sent qu'il y a une vraie dynamique, de la part de l'ensemble des Ordres et des parties prenantes, à s'emparer du sujet. Et l'enquête a démontré qu'il était nécessaire de le faire », poursuit-elle. Dans une profession composée à 83% de femmes, tous les secteurs d'activité (hôpital, libéral, salariat...) sont concernés. Les résultats devraient être prochainement présentés au Conseil national de l'Ordre.

6 recommandations pour lutter contre les VSS en santé

Pour le secteur de la santé, la mission identifie une vingtaine d’acteurs qui « participent à la prévention, au repérage, aux sanction et à l’accompagnement des VSS » : Ordres professionnels qui peuvent notamment sanctionner les auteurs de VSS sur le plan disciplinaire, la Haute autorité de santé (HAS), qui établit des recommandations et des guides de bonnes pratiques, la Fédération Hospitalière de France (FHF) ou encore l'association Donner des elles à la santé. Les auteurs formulent également 6 recommandations pour remédier au phénomène dans le secteur de la santé, aussi bien pour agir sur la prévention que le repérage ou l’accompagnement de ces VSS. :

  • Ajouter aux critères de certification des établissements par la HAS la mise en place de formation et de cellules de signalement aux VSS
  • Évaluer la possibilité pour la HAS de formaliser une recommandation de bonnes pratiques sur le repérage des VSS pour toute consultation médicale et pour tout professionnel de santé
  • Permettre aux Ordres médicaux de consulter le casier B2 lorsqu’ils sont alertés sur des faits susceptibles « de constituer un manquement déontologique »
  • Intégrer les Ordres paramédicaux au sein de la circulaire du 24 septembre 2013, relative aux liens entre les Ordres des professions de santé et le Parquet
  • Elargir la publication des sanctions à la fonction publique hospitalière
  • Et réformer le dispositif « Mon soutien psy », qui permet à toute personne de bénéficier de 11 séances de suivi psychologique prises en charge par l’Assurance maladie, afin d’assurer l’accompagnement des femmes victimes de violences sur plusieurs mois.

Consulter le rapport

*Elle est composée de de Christine Abrossimov, administratrice de l'État ; Christine Caldeira, secrétaire générale de l'Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH) ; Angélique Cauchy, sportive de haut niveau et présidente de l'association Rebond ; Bariza Khiari, ancienne sénatrice de Paris et vice-présidente du Sénat ; Marie-France Oliéric, chef du pôle Femme-mère-enfant du CHR Metz-Thionville et présidente de l'association Donner des Elles à la santé ; et Rachel-Flore Pardo, avocate au barreau de Paris et activiste féministe.

La Rédaction d'Infirmiers.com

Source : infirmiers.com