À l’hôpital, la parole contre les violences sexistes et sexuelles se libère encore trop peu, alors que le mouvement #MeToo hôpital a bel et bien montré que le secteur n’échappait pas à la problématique. Et elle ne concerne pas que les professionnels de santé qui interviennent directement sur le terrain. Directeurs et directrices d’établissements dans la fonction publique hospitalière (FPH) y sont également régulièrement confrontés, démontre le Centre national de gestion (CNG). Placé sous la tutelle du ministère de la Santé et chargé d’assurer la gestion statutaire et le développement des ressources humaines des praticiens hospitaliers et des directeurs d’établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux, il constate suite aux résultats d’une enquête nationale (voir encadré) la persistance d’importantes inégalités entre hommes et femmes.
Une sous-déclaration persistante des violences sexistes et sexuelles
43% des répondants ont ainsi indiqué avoir été confrontés à des violences sexistes ou sexuelles (VSS) au cours des trois années précédentes, que ce soit en tant que témoin ou en tant que victimes. Ils sont 29% à avoir subi au moins une VSS, avec des écarts extrêmement importants observés en fonction des sexes. 42% des directrices déclarent ainsi avoir été victimes de VSS, soit 303 femmes, contre 9% des hommes. « Les auteurs de VSS sont à 77 % un homme ou des hommes. Dans 58 % des cas, l’auteur de VSS appartient à un cercle professionnel proche de la victime : un membre de la gouvernance (médicale et de direction) (22 %), un membre de l’équipe de direction (18 %), un supérieur hiérarchique (18 %) », précise le CNG. Dans 57% des cas, ces VSS sont déclarés à un tiers. L’absence de déclaration, elle, est due soit à la certitude qu’aucune suite n’y sera donnée, soit à la difficulté de réaliser la gravité des faits. « Lorsque le répondant est témoin, les faits de sexisme sont évoqués avec des tiers dans 74 % des cas. Pour les cas où le répondant est une victime, les faits sont peu évoqués/signalés mais plutôt gardés pour soi », est-il indiqué. Et seulement 37% des victimes jugent que ces VSS n’ont pas eu de conséquences pour elles. Les autres témoignent d’une dégradation de la relation de travail (32%), d’un sentiment d’insécurité au travail (26% chez les victimes directes) ou encore de conséquences sur la vie personnelle (15%). Les dispositifs de signalement, comme la plateforme dédiée de l’AP-HP par exemple, sont quant à eux encore trop utilisés.
Les jeunes davantage discriminés
L’enquête nationale révèle également des faits toujours prégnants de discrimination, principalement liés à l’âge chez les directeurs (ils sont 31% à en faire part) et au sexe ou à l’identité de genre (28%), ces derniers touchants touchant principalement les femmes. 42% d’entre elles en remontent, contre 7% des hommes. Ces discriminations sont « davantage ressenties chez les jeunes générations, (40 % chez les moins de 40 ans) », observe le CNG. Celles liées à l’origine arrivent en troisième position, et sont dénoncées par 11% des répondants. Quant à l’accès aux responsabilités, « les femmes (54 %) ont davantage l’impression que les hommes (47 %) de voir leurs capacités ou leurs compétences mises en doute. » Elles estiment également plus fortement que les hommes que maternité, réelle ou potentielle, et aspects familiaux peuvent constituer des freins à leur recrutement.
Les résultats de l’enquête font écho à ceux présentés en juin 2024 par l’association Donner des ELLES à la santé, qui notait que 29 % des femmes s’étaient « senties discriminées en raison de leur genre au cours des 12 derniers mois » et mettait en évidence « une perte d’intérêt pour les postes à responsabilités » au sein des professionnelles de santé en général, poursuit le CNG. Il invite tous les directeurs et directrices d’établissements qui seraient témoins ou victimes de VSS ou de discrimination à recourir plus largement à son formulaire de signalement.
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