Une offre en santé de qualité convenablement répartie, une plus forte coordination des acteurs, un élargissement du suivi de l’amélioration de la qualité des parcours en santé, un soutien plus grand en faveur de l’engagement des usagers ou encore un investissement impératif dans la prévention en santé, la HAS développe cinq axes d'interventions primordiaux pour améliorer la qualité des soins, dans une analyse remise aux pouvoirs publics lundi 7 octobre. Elle revient également sur le droit fondamental que constitue l’accès pour tous les citoyens au système de santé et souligne le caractère complexe et multidimensionnel de la qualité.
Les nouveaux métiers ne sont pas toujours bien identifiés par les patients, ni par les professionnels de santé d’ailleurs : infirmiers de pratique avancée dans leurs cinq domaines d’intervention, infirmiers-pivots en cancérologie
S'appuyer davantage sur les infirmiers et sur la coopération
Coté remède, la HAS insiste sur la nécessité «d’accompagner la reconfiguration des frontières professionnelles» en raison «du manque d'effectifs médicaux». «La création de nouveaux métiers (par exemple, infirmiers de pratique avancée, infirmiers délégués de santé publique, assistants médicaux) et l’élargissement de certaines compétences ont déjà été engagés (par exemple, pour les sages-femmes, les infirmiers, les pharmaciens d’officine, les kinésithérapeutes, les pédicures-podologues). Ils imposent d’être davantage accompagnés et soutenus par le biais de formations de qualité, mais également d’évaluations, d’analyses collectives et réflexives sur ces nouvelles modalités d’exercice. Le soutien aux compétences du travail en équipe, de coordination d’équipes pluriprofessionnelles, est également à encourager dans la formation initiale et continue des professionnels de santé et paramédicaux».
«Dans cette dynamique, l’implication des personnels du secteur social avec les professionnels (para)médicaux devient incontournable», assure la HAS. (...) «La capacité à travailler en réseau constitue un axe important des formations en travail social, une plus grande sensibilisation aux problématiques de santé constitue une piste à développer».
Elle note au passage que les «nouveaux métiers ne sont pas toujours bien identifiés par les patients, ni par les professionnels de santé d’ailleurs : infirmiers de pratique avancée dans leurs cinq domaines d’intervention, infirmiers-pivots en cancérologie, pour ne prendre que ces deux exemples».
Tension sur les effectifs et détérioration de l'offre de soins
Dans son analyse, la HAS détaille les raisons des difficultés d'accès à l'offre sanitaire : «Si l’on considère l’accessibilité aux médecins généralistes, aux infirmiers et aux masseurs- kinésithérapeutes, 20 % de la population est aujourd’hui confrontée à une difficulté d’accès dont la moitié à l’égard de plusieurs professions », note-t-elle par exemple. Et la HAS de relever «les tensions sur les ressources humaines» qui sont selon elle «l'un des motifs d’altération des capacités d’hospitalisation. Dans une enquête conduite par la Fédération hospitalière de France (FHF) en mars 2024, les difficultés de personnels ont été mises en cause dans 60 % des cas de fermeture des capacités d’hospitalisation en MCO (Médecine, chirurgie, obstétrique)». Des tensions et une détérioration qui, selon les projections réalisées par la DREES, vont se poursuivre «jusqu’en 2028».
Des difficultés d'accès accrues dans le médico-social et en psychiatrie
La Haute Autorité de Santé dresse également un tableau critique de l'offre de soins, particulièrement dans le secteur médico-social ou encore de la psychiatrie (cf notre encadré ci-dessous). Dans le médico-social, elle note par exemple que «les tensions de recrutement sont généralisées sur l’ensemble des secteurs. Fin 2023, la 2e édition du baromètre des tensions de recrutement Axess relevait 35 000 postes vacants (30 000 recensés lors de la précédente édition) avec des difficultés particulières dans les secteurs des personnes âgées et de la petite enfance. L’intérim se développe sans répondre aux besoins des personnes accompagnées et aux dépens du travail en équipe».
Les difficultés dans le champ de la psychiatrie
En France, le dispositif de psychiatrie est constitué d’une part d’établissements hospitaliers (publics et privés), d’autre part d’une offre ambulatoire (cabinets libéraux et centres médico-psychologiques (CMP)) et médico-sociale très diversifiée.
Une dégradation de l’accès : un recul de l’offre et un manque de ressources humaines
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Entre fin 2008 et fin 2019, 81 départements ont connu une baisse de la densité de lits en psychiatrie générale.
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Au 31 décembre 2022, près d’un quart des établissements hospitaliers (24 %) ont été contraints de fermer de 10 % à 30 % de leur capacitaire alors qu’ils n’étaient que 5 % à enregistrer de telles fermetures capacitaires avant 2020.
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Le manque de personnel médical et/ou paramédical est identifié comme étant le facteur principal de 88 % des fermetures structurelles de lits en 2022.
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Entre un quart et trois quarts des postes de médecins sont vacants dans 40 % des établissements et 8 % des établissements déplorent la vacance de plus de la moitié de leurs postes de médecins. En 2023, 63 postes de médecins psychiatres n’ont pas été pourvus par l’ECN (sur 547), nombre doublé par rapport à 2022.
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15 % de la population se situe à plus d’une heure d’un CMPP (26).
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Le délai moyen d’accès à l’ambulatoire est de 1 à 4 mois pour plus de la moitié des établissements (53 %) en ce qui concerne les soins en psychiatrie de l’adulte (26).
Situation particulièrement critique pour le secteur de la pédopsychiatrie
En psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, 45 % des établissements décrivent des délais d’accès à l’ambulatoire compris entre 5 mois et plus d’un an. Le délai moyen d’accès à l’hospitalisation en psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent est compris entre 1 et 4 mois pour 20 % des établissements et 13 % des établissements déplorent des délais d’accès à l’hospitalisation de 5 mois à 1 an.
La majorité des établissements (59 %) déplorent plusieurs années de délai, voire une dizaine d’années pour 3 % d’entre eux ; alors que les besoins ont augmenté depuis 20 ans, comme en atteste la progression de plus de 60 % du nombre de personnes suivies chaque année en psychiatrie infanto- juvénile, tous modes de prise en charge confondus (hospitalisation complète, hospitalisation partielle ou soins ambulatoires).
Cette analyse a mis en évidence le caractère multidimensionnel de la qualité du système de santé. Cette évidence a conduit la HAS à définir cinq priorités qui constituent «des leviers» précise-t-elle, mais «ne sont pas suffisantes et ne doivent pas occulter d’autres axes d’intervention indispensables à la qualité en santé».
«Un pilotage prospectif de l’offre de santé est indispensable pour permettre de répondre en tout point du territoire aux besoins des populations. Cela implique de veiller à une répartition homogène des compétences en tenant compte des complémentarités professionnelles, mais également de renforcer, selon un principe de subsidiarité, la structuration d’une offre graduée au service de la qualité et de la sécurité des soins. Ces organisations doivent permettre des exercices dans des conditions favorables», espère-t-elle, insistant sur l'importance «de la qualité de vie au travail et la santé des professionnels».
Retrouvez ici l'intégralité du «Rapport d'analyse prospective 2024» de la HAS.
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