En 2022, la profession infirmière était l’une des professions les plus en tension en France. En cause notamment, des conditions de travail qui se dégradent, cruellement mises en lumière lors de la crise Covid, et qui soit poussent les professionnels à quitter le métier, soit font fuir les candidats potentiels. Selon une récente étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le métier attire moins les jeunes au sein de ses pays membres. C’est dans ce contexte, à l’occasion du Salon infirmier*, qui dédie pour la première année un espace au bien-être des soignants, Infirmiers.com et la plateforme Emploi Soignant ont souhaité sonder la perception de ces professionnels sur leurs conditions de travail. Notre enquête révèle ainsi que, au total, près de 85% des répondants s’en disent insatisfaits, toutes spécialités et modes d’exercice confondues.
Le manque de reconnaissance, facteur numéro 1
Comme première explication à ce sentiment, les infirmiers avancent le manque de reconnaissance, qui continue de nuire à la profession. Ils sont ainsi 92,6% à déclarer que leur travail n’est pas suffisamment reconnu ni valorisé. La rémunération, notamment, est jugée insuffisante, pour 83,5% d’entre eux, et ce malgré les différentes mesures de revalorisation adoptées par le gouvernement (Ségur de la santé, revalorisations des heures de nuit et de week-end…). L’autre point noir est lié à l’organisation du travail, en particulier dans les établissements, qu’ils soient privés ou publics : horaires inadaptés (pour près de 27% des répondants), manque de personnel, dont manque de personnels compétents, surtout au regard de la charge importante de travail, ou encore tâches parfois mal définies. Les répondants listent enfin des relations problématiques ou un manque de communication avec la hiérarchie (14,8%), des lourdeurs administratives ou encore du matériel ne permettant pas des prises en charge de qualité. Par ailleurs, en libéral, certains professionnels dénoncent également une perte de pouvoir d’achat – les tarifs n’ont pas évolué depuis 2009 et les revalorisations concédées sur les indemnités forfaitaires de déplacement (IFD) sont loin de compenser l’inflation – mais aussi des difficultés avec les autres professionnels de santé, en particulier pour obtenir des ordonnances bien rédigées.
Le salaire et l'organisation des services, principaux critères de choix d'un emploi
Or rémunération et organisation des services constituent les premiers facteurs déterminants du choix d’un emploi, révèle l’enquête. Ils sont ainsi 81,6% à placer le salaire en tête de ces éléments. Les missions à réaliser et les horaires sont aussi mis en avant, par respectivement 58,6% et 54,6% des répondants. Quant aux aspects jugés gratifiants, ils portent essentiellement sur le relationnel, qu’il soit lié au travail en équipe ou aux relations nouées avec les patients et leur entourage. Certains citent également « la satisfaction d’être utile ».
Près d'un quart prêts à raccrocher la blouse dans les 5 ans
Conséquence de ce décalage entre les attentes et les réalités du métier, le maintien des professionnels sur le long terme n’est pas assuré. Ils ne sont ainsi qu’un quart (24,3%) à assurer vouloir continuer à l’exercer jusqu’à la fin de leur carrière. Parallèlement, ils sont dans une même proportion à déclarer envisager déjà de quitter la profession (23,8%). Le reste des répondants évoquent, quant à eux, la possibilité de changer de métier dans les prochaines années, à hauteur de 22,5% dans un délai de 5 ans ou de 19,1% dans un délai de 2 ou 3 ans.
Ceux qui veulent d’ores et déjà cesser d’exercer pointent, entre autres, un « stress » trop important, « une charge mentale qui se dégrade » et qui a, pour certains, des répercussions directes sur leur vie de famille, ou encore « la violence des patients ». Car la sécurité des soignants s’impose de plus en plus comme un autre enjeu majeur. Fin octobre 2023, le gouvernement diffusait ainsi un plan contenant 42 mesures, dont l’aggravation des sanctions pénales contre les auteurs de violences faites aux professionnels de santé, afin d’apporter des réponses à cette problématique.
L’enquête a réuni 563 réponses, l’essentiel des répondants (94%) étant en poste. Dans le détail :
- 74% d’entre eux exercent depuis plus de 10 ans, 17,3% entre 5 et 10 ans, et 6,7% entre 1 et 4 ans.
- La majorité (65%) a entre 41 et 60 ans.
- En termes de mode d’exercice, 63% indiquent travailler en libéral, 20% dans le public, et 11% dans le privé. Le reste exerce soit en association, en laboratoire ou encore en tant qu’intérimaires.
*du 21 au 23 mai 2024 à Paris, dans le cadre de SantExpo
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