Tout manager qui se respecte cherche perpétuellement à trouver le juste niveau de récompense à attribuer aux membres de son équipe afin que ces derniers exercent de manière optimale.
Quel niveau de récompense un manager doit-il mobiliser pour obtenir une efficacité optimale des agents ?
L’expérience a prouvé que le niveau de rémunération n’était pas le seul critère de satisfaction des employés, la qualité de vie au travail (QVT) et l’équilibre entre vie professionnelle et vie professionnelle se plaçant parmi les facteurs de satisfaction, et donc de productivité des agents, et plus particulièrement des personnels soignants. Il n’en reste pas moins vrai que les leviers du manager, dans sa recherche d’optimisation de son organisation, doit introduire une dose de récompense à attribuer aux agents qui donnent satisfaction.
Mais quel pourrait être le niveau de récompense adéquat dans ce cadre ? Un agent ayant fait son travail de manière satisfaisante recevra une récompense minime, un autre ayant réalisé une tâche au-delà du prescrit se verra attribuer une récompense plus importante, quant au troisième, qui aura accompli une action exceptionnelle, gagnera ce que l’on pourrait appeler le « jackpot ». Ce mécanisme, qui semble relever d’un cheminement logique, est-il réellement efficace ? Rien n’est moins sûr, si l’on en croit des scientifiques du Center for the Neural Basis of Cognition à Pittsburgh (Pennsylvanie - USA).
Une productivité pas forcément significative lorsque le niveau de récompense est très important
Une étude qu’ils ont récemment menée sur ce champ voient en une récompense de type « jackpot » une forme de pression supplémentaire mise sur l’agent et qui atténue son efficacité. Pour ce travail de recherche, ils ont mis en place une tâche informatique dans laquelle des singes rhésus recevaient une récompense après avoir déplacé rapidement et précisément un curseur sur une cible. Chaque essai donnait aux singes des indices quant à savoir si la récompense serait petite, moyenne, grande ou « jackpot ». Les récompenses du jackpot étaient rares et inhabituellement importantes, créant une situation aux enjeux et aux récompenses élevés.
À l’aide d’une petite puce recouverte d’électrodes implantée dans le cortex moteur du cerveau des singes, les chercheurs ont observé l’évolution de l’activité neuronale entre les scénarios de récompense. Dans les scénarios de jackpot, ils ont observé que l’activité des neurones associés à la préparation motrice, qui gouverne à la façon d’effectuer un mouvement, diminuait, ce qui sous-tendait une sous-préparation et donc une sous-performance. Ils en ont déduit que le comportement médiateur récompense-résultat n’est pas linéaire.
À partir d’un certain seuil, un niveau de préparation du cerveau qui régresse à mesure que la récompense augmente
Ainsi, une récompense qui augmente ne serait pas obligatoirement synonyme de meilleurs résultats. Mais quel est donc le mécanisme qui atténue la préparation motrice dans les scénarios à enjeux élevés ? Une analyse de la manière dont la motivation des récompenses et la préparation neuronale était liée aux performances des singes a suggéré que, à mesure que la taille d’une récompense augmente, l’activité neuronale atteint un point de préparation maximale. Mais pour des récompenses encore plus importantes, la préparation commence à faiblir, poussant le cerveau hors de son point d’efficacité idéal. Les chercheurs appellent cela l’hypothèse du biais neuronal.
Les chercheurs vont pousser plus loin leurs investigations afin de voir, tout d’abord, comment d’autres régions du cerveau réagissent dans des situations de jackpot, et savoir, dans un deuxième temps, si l’étouffement sous la pression peut être évité, si le fait d’obtenir des informations sur l’activité cérébrale d’une personne pourrait aider à optimiser ses performances. Les recherches menées sur les singes devront alors s’étendre à l’observation du cerveau humain. Et il n’est pas évident qu’ils obtiennent les mêmes résultats...