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Témoignage - Des soignants dans l’ouragan le plus puissant de notre histoire

Publié le 14/09/2017
Organisation des secours saint-Martin ouragan Irma

Organisation des secours saint-Martin ouragan Irma

Organisation des secours saint-Martin ouragan Irma

Organisation des secours saint-Martin ouragan Irma

Organisation des secours Saint-Martin Ouragan Irma

Organisation des secours Saint-Martin Ouragan Irma

Crédit photo Raphaël Moutamalle

Crédit photo Raphaël Moutamalle

Organisation des secours saint-Martin ouragan Irma

Organisation des secours saint-Martin ouragan Irma

Organisation des secours saint-Martin ouragan Irma

Organisation des secours saint-Martin ouragan Irma

Organisation des secours Saint-Martin Ouragan Irma

Organisation des secours Saint-Martin Ouragan Irma

En contact avec des soignants du Centre Hospitalier de Saint-Martin, territoire français situé dans le Caraïbes et touché de plein fouet par la violence du cyclone Irma, la Rédaction d’Infirmiers.com tenait à saluer le travail exemplaire des acteurs de soins et autres hospitaliers. Au détriment de leur propre sinistre, ils sont restés sur place pour mener auprès de la population une guerre de résistance contre l’ouragan. Raphaël Moutamalle, Iade au Centre Hospitalier Louis Constant Flemming, nous envoie des nouvelles très récentes de la situation sur l’île, sur la gestion des soins. Lui-même n’a pas été épargné, comme on le voit sur la dernière photo de ce texte, posant devant les ruines de sa maison, et gardant pourtant le sourire !

Après le vent, c’est la pluie diluvienne et son cortège d’inondations qui s’abattirent sur le service des Urgences, qui dut alors faire face à cette contrainte supplémentaire dans l’organisation des soins. Crédit photo : Raphaël Moutamalle

Pour comprendre la force de l’ouragan Irma, il suffit peut-être de le comparer au cyclone Martin en 1999 qui ravagea une partie du Sud-Ouest de l’Hexagone, ce dernier infligea des vents à 200 km/h. Irma fit subir des rafales de vents à + de 400 km/h pendant 33 heures… Les météorologues parlent désormais du cyclone le plus puissant de notre histoire.

Les Antilles ont ainsi subi l’ouragan Irma, un géant démesuré qui a dévasté les territoires de Saint-Martin, Saint-Barthélemy, Anguilla, Barbuda, les iles Vierges et le territoire américain sur les côtes de Floride. Le bilan provisoire sur les îles de Saint-Martin et Saint-Barth fait état de 15 morts et 120 blessés. Sans compter les personnes disparues, qui risquent encore d’alourdir ce bilan dans les prochains jours.

Le deuxième round a commencé et la violence d’Irma a ajouté à la complexité de la situation en arrachant une partie du toit de l’hôpital

Affronter le pire

Les premières journées de résistance à l’Hôpital Louis Constant-Fleming ont été ordonnées en amont comme il se doit avec l’organisation d’équipes de soins réquisitionnées pour faire face dans toutes les spécialités au risque d’afflux massif de patients. Les patients les plus vulnérables ont ainsi pu être évacués dans le calme vers la Guadeloupe.

Au Bloc Opératoire, le premier contact avec l’ouragan n’a pas vraiment été perçu comme délétère, du fait d’une césarienne en urgence qui demandait la plus grande attention à la mère et à l’enfant. Pas de peur exacerbée à ce moment-là, d’autant que l’œil du cyclone amenant une accalmie, a permis de régler les soins dans l’ordre et dans un calme professionnel efficient. Mais le deuxième round a commencé et la violence d’Irma a ajouté à la complexité de la situation en arrachant une partie du toit de l’hôpital. A ce moment-là, les soignants ont pris en charge les patients exposés pour les rassembler dans le couloir, orienter certains d’entre eux avec les blessés vers la salle de réveil où les soins se sont organisés. Le fait d’orienter les patients les plus graves vers la Salle de surveillance post-interventionnelle (SSPI) semble avoir permis une visibilité efficiente sur le tri et les évacuations nécessaires ont pu être réalisées.

Après le vent, c’est la pluie diluvienne et son cortège d’inondations qui s’abattirent sur le service des Urgences, qui dut alors faire face à cette contrainte supplémentaire dans l’organisation des soins, en prenant la SSPI comme sas de décompression. L’ouragan quittait ainsi les côtes de Saint-Martin pour raser des terres plus lointaines sur son chemin.

Les pharmacies n’ont pas été épargnées par les pilleurs et les stocks restant ont été rassemblés au CH. Des navires sont en route pour amener rapidement les besoins en eau , médicaments et vivres de première nécessité.

Le meilleur de l’humanité est toujours plus discret que le pire

Les soignants eux aussi sont victimes de pillage à leur domicile. Saint-Martin, dans sa partie française, n’est pas que le paradis que l’on voudrait bien imaginer. Une forte proportion de la population vit largement en dessous du seuil de pauvreté dans des conditions d’hygiène et de précarité importantes. Ces populations, toujours les premières touchées par le désastre, voient l’opportunité du pillage comme un mode de survie. Les images de cette femme emportant d’un magasin un ventilateur encore dans son carton peuvent paraître déplacées, mais sans cautionner ces actes il faut aussi être capable de les traduire bien au-delà d’un simple besoin de « ventilateur ».

Si cela pourrait sembler normal pour certains, il est à noter que tous les acteurs qui ont œuvré au mécanisme hospitaliers lors de cet événement l’ont fait au détriment de leurs propres sinistres. Nombre d’entre eux ont vu leurs domiciles détruits, ont perdu leur véhicule et tous leurs biens qui ont fait l’objet de la destruction par le cyclone ou du pillage ordinaire lors de ce type de situation. Certains ont été tenus de quitter l’île pour mettre leur famille à l’abri mais la plupart est restée, et une vingtaine d’entre eux sont hébergés à l’hôpital par nécessité.

Cette expérience nous montre la puissance éthique de notre humanité et la force supérieure qui permet à  un soignant de rester soignant. Ces personnes profitent même de leur temps de repos pour se joindre aux équipes de secours afin d’apporter leur aide aux civils désemparés. Toutes ces personnes méritent la reconnaissance de tous. Ils méritent d’être reconnus par la nation elle-même et le gouvernement ne doit pas passer à côté de cette opportunité pour marquer les forces positives de nos rangs.

Nous devons aussi souligner la réactivité des aides en termes de compétences venant de :

  • La Martinique avec 1 médecin, 1 Iade, 2 IBODE et 1 IDE qui ont beaucoup aidé au tri au départ des Urgences
  • la Guadeloupe avec 1 médecin, 1 Iade, 1 cellule médico-psychologique qui a fait un travail très important et nécessaire auprès des patients comme auprès des soignants.
  • L’EPRUS avec 1 anesthésiste, 5 Iade, 2 Ibode, 3 médecins ils sont arrivés avec des moyens conséquents dont un Poste Médical Avancé.

Certes il est plus facile de nourrir la peur et la haine en diffusant de fausses informations spectaculaires comme l’évasion des prisonniers, le pillage des armureries et l’état de guerre civile, la fuite de la préfète, la hausse des billets d’avion pour les retours vers Paris… Autant de fausses informations qui ont à chaque fois tendance à masquer les actions solidaires toujours plus discrètes et non démonstratives car elles se font dans l’élégance du devoir d’humanité. Dans ce sens nous souhaitons aussi que des passerelles puissent se faire avec la partie hollandaise pour promouvoir la solidarité et la reconstruction.

La reconstruction

Mardi 12 septembre au matin, le Président de la République arrivait aux Antilles et force est de constater que le déploiement de moyens d’aide et de secours est très important et reconnu comme étant l’un des plus importants depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. La Nation doit rester à l’écoute de chacun de ses fils sans oublier ceux, isolés au cœur des océans, qui œuvrent pour elle.

Le Centre Hospitalier bénéficie de l’alimentation électrique car ses lignes sont enterrées. Les équipes sur places sont nourries, peuvent bénéficier de l’eau nécessaire pour la douche et la blanchisserie fonctionne permettant ainsi des conditions d’hygiène conformes au besoin. A Saint-Martin, Veolia, qui gère la production et la distribution de l'eau sur l'île, doit pouvoir installer une station mobile de dessalement d'eau de mer.

Nous saluons ces acteurs hospitaliers pour leur courage, leur force et leur engagement dans leur mission de soin. Nous espérons pouvoir être à la hauteur en leur rendant hommage face à la situation qu’ils traversent et qui va durer surement encore de longues semaines.

Merci à Christophe Pacific, cadre supérieur de santé, Docteur en philosophie, pour son précieux travail de mise en relation.


Source : infirmiers.com