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Tatoue-moi mon état de santé !

Publié le 09/09/2019
tatouage

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Alors que les tatouages ont récemment été suspectés de susciter des allergies, il semblerait que la e-santé compte pourtant bien marquer la peau des patients à l’encre indélébile. En effet, plusieurs équipes de chercheurs sont en train de mettre au point des « tatouages intelligents » qui permettront de surveiller son état de santé. Un pas en avant dans la médecine préventive…

Battements de cœur, glycémie, anomalies métaboliques… Quand les tatouages fournissent des informations sur notre santé.

Et si un tatouage pouvait améliorer la vie quotidienne de personnes présentant des maladies chroniques ? Alors qu’une étude récente suggère que, non seulement l’encre, mais aussi les aiguilles employées lors des tatouages pourraient causer des allergies (voir encadré), des travaux de e-santé sont en cours afin de mettre en place des dispositifs de tatouages capables de surveiller notre santé. Deux études récentes sont parues coup sur coup en mai et juin 2019.

Du tatouage électronique

La première a été réalisée par une équipe de chercheurs à l’Université du Texas. En effet, des spécialistes américains optimisent un dispositif de tatouage électronique capable de mesurer l’activité électrique du cœur. Celui-ci pourra notamment estimer de manière très précise la pression artérielle et ainsi détecter de potentielles anomalies cardiaques.

Plus précisément, ce e-tatouage est composé d’une lamelle de graphène ultra mince et extensible. Ces minuscules capteurs effectuent des électrocardiogrammes et des sismocardiogrammes simultanément. De telles mesures effectuées de façon synchrone permettent d'extraire de nombreux intervalles de temps caractéristiques du fonctionnement du cœur parmi lesquels l'intervalle de temps systolique (IST) qui lui-même présente une forte corrélation avec la pression artérielle, explique les auteurs de l’étude. Celle-ci pourra donc être évaluée en continu et de manière non invasive à l’aide de ce dispositif.

Les scientifiques spécifient néanmoins qu’il est important de bien positionner l’appareil afin d’éviter que d’éventuels mouvements brouillent la prise des mesures. C’est pourquoi les spécialistes réalisent des séries d’images 3D afin d’identifier le meilleur emplacement possible. Ce tatouage électronique peut avoir plusieurs utilités. Par exemple, on pourra y recourir pour mesurer la systole pendant le repos et l'exercice pour diagnostiquer une maladie coronarienne ou dans d’autres contextes comme en cas d’apnée du sommeil, précise les auteurs.

Les recherches se poursuivent encore et le procédé reste en phase de test. Dans les travaux futurs il est question notamment d’intégrer des dispositifs sans fils tel que le Bluetooth, ce qui permettrait d’employer le tatouage pour des applications ambulatoires pratiques

Au tatouage caméléon

De ce côté-ci de l’Atlantique, d’autres travaux sont parus sur le même sujet quasiment au même moment. En effet, une équipe de l’Université technologique de Munich est également en passe de mettre au point son propre prototype de tatouage intelligent. Si, à première vue celui-ci n’a rien d’original, en réalité c’est l’encre employée qui est particulière car elle change de couleur en fonction de nos paramètres vitaux ! En outre, la teinture varie en fonction du PH, de la concentration de glucose et du taux d’albumine. Selon Ali Yetisen, principal auteur de l’étude interrogé par Science et Avenirce concept très futuriste, qui en a surpris beaucoup pourra changer la vie de beaucoup de personnes souffrant de pathologies chroniques comme le diabète, l’insuffisance rénale ou autres maladies hépatiques.

Les encres utilisées pour ces dispositifs sont des « biocapteurs » qui réagissent soit directement au PH acide, soit par exemple au peroxyde d’hydrogène formé à partir du glucose suite à une réaction chimique. Cette molécule oxyde la teinture et celle-ci change de couleur, cela donne une estimation du taux de glucose dans le système sanguin. Ainsi, comme pour un tatouage conventionnel, des pigments colorants sont injectés dans le derme, la seule différence c’est que ces encres varieront de teintes en fonction de leur environnement sous la peau, c’est-à-dire en fonction du liquide interstitiel (composé qui remplit l’espace entre les capillaires sanguins et les cellules). Sa composition étant similaire à celle du plasma sanguin, il donne une indication précise de la glycémie comme de l’acidité du sang.

Ces tatouages innovants s’avéreraient donc pratiques, non invasifs et surtout très fiables. Du moins ils seraient plus précis par rapport aux alternatives déjà disponibles comme les patches autocollants. Ceux-ci analysent la sueur, un produit qui ne reflète pas correctement ce qui se passe dans le sang, explique le Ali Yetisen. Ou sinon, il y a les puces implantées qui sont plus efficaces mais très invasives. D’autre part, ces dispositifs viendraient à moindre coût puisqu’ils utilisent des teintures déjà employées pour des tests d’urine. Ils seront également simples d’utilisation car les scientifiques ont déjà mis au point une application permettant d’analyser la couleur du tatouage et d’envoyer les résultats à un professionnel de santé.

Néanmoins, les spécialistes poursuivent leurs recherches, d’abord ils continuent de tester leur procédé sur les animaux pour être sûr de leur innocuité avant de pratiquer des essais cliniques sur des patients mais aussi car ils souhaitent aller plus loin. Aujourd'hui, on peut déjà mesurer le glucose et l'acidité, mais nous travaillons pour pouvoir mesurer aussi la déshydratation, en analysant le sodium et d'autres ions nécessaires pour rester hydraté, ainsi que le calcium, pour calculer la perte osseuse lors des voyages dans l'espace, s'enthousiasme Ali Yetisen. Un dispositif qui pourra in fine permettre de vérifier si une personne âgée est observante dans ses traitements médicamenteux. Enfin, pour ceux qui trouvent le fait de « marquer » son corps quelque peu inesthétique, les scientifiques imaginent des teintures infrarouges invisibles à l’œil nu. Il en faut pour tous les goûts mais chacun souhaite rester en bonne santé !

De l’encre à l’aiguille

Si les encres utilisées pour les tatouages ont déjà été soupçonnées de susciter des allergies, ce sont à présent les particules de métal susceptibles de se détacher des aiguilles qui sont suspectées. En effet, du chrome et du nickel provenant de l’abrasion des aiguilles pourraient migrer vers les ganglions lymphatiques et potentiellement engendrer des réactions d’hypersensibilité.

Alors que 18% des Français de plus de 18 ans sont aujourd’hui tatoués, il est important de noter que la libération de ces particules n’a rien à voir avec un manque d’hygiène. Mais ce phénomène mécanique arrive seulement avec des encres colorées contenant du dioxyde de titane, nullement avec des teintures noires au carbone. D’autre part, d’autres travaux sont nécessaires pour avoir une idée réelle des effets à long terme des tatouages et cela ne sera possible que via des études épidémiologiques regroupant des milliers de personnes et s’échelonnant sur des décennies, soulignent les auteurs de l’étude. Ils conseillent, pour les plus soucieux, de se limiter à des tatouages noirs, le temps d’éclaircir la situation.

Roxane Curtet Journaliste infirmiers.com roxane.curtet@infirmiers.com  @roxane0706


Source : infirmiers.com