Petite question par curiosité :
êtes-vous infirmier ?

Merci d'avoir répondu !

INFOS ET ACTUALITES

Radioactivité : des effets sanitaires limités

Publié le 13/01/2014

Pierre Bey, Professeur émérite de Cancérologie et de Radiothérapie à l'Université de Lorraine, et Dominique Minière, Directeur délégué de la Direction Production Ingénierie EDF, nous rappellent ce qu'il faut savoir sur les rayonnements ionisants et plus particulièrement sur leurs effets sur la santé.

Les examens radiographiques,  principale source d'irradiation artificielle de la population

Régulièrement, le Conseil Scientifique Santé et Énergies EDF se réunit pour informer les professionnels de santé sur la radioactivité et ses impacts sanitaires. Comme l'a souligné Pierre Bey, Professeur émérite de Cancérologie et de radiothérapie à l'Université de Lorraine, lors d'une conférence de presse qui s'est tenue le 13 décembre 2013 à Paris, nous sommes chaque jour soumis à des rayonnements ionisants à la fois naturels et artificiels. Rappelons en effet que depuis plus de quatre milliards d'années, la vie s'est développée avec la radioactivité naturelle liée aux rayonnements cosmiques et à ceux de la Terre et au radon, un gaz issu des roches granitiques, indique le Professeur Jean-Pierre Gérard, PU-PH de Cancérologie et de Radiothérapie, Centre de lutte contre le cancer Antoine Lacassagne à Nice. Près de 31 départements français sont particulièrement exposés au radon. Quelle que soit l'origine de la radioactivité, les effets sont les mêmes. Tout dépend de la dose reçue et absorbée par l'organisme, ajoute-t-il. A Paris par exemple, la dose moyenne annuelle reçue de rayonnements ionisants s'élève à 2,5 millisieverts (mSv)1 alors qu'elle est de 5 mSv à Clermont-Ferrand, une ville située au cœur d'une région granitique riche en radon. Dans certaines régions du monde, cette dose peut s'avérer bien supérieure, notamment au Kérala, en Inde, où elle atteint 70 mSv par an.

Des rayonnements ionisants artificiels sont également créés par l'homme à des fins industrielles et médicales. Les examens radiographiques sont la première source d'irradiation artificielle de la population. Ils représentent une irradiation de 1,3 mSv par an.

Les rayonnements ionisants : tout est toxique, rien n'est toxique. Tout est une question de dose

L'irradiation, une question de dose et d'âge

Lorsque les doses sont inférieures à 100 mSv, peu de morts cellulaires sont constatées et les cellules sont capables de réparer les lésions sublétales2 de l'ADN engendrées par les rayonnements ionisants. Aucune étude épidémiologique ne prouve le risque de cancers chez l'adulte ayant reçu une dose inférieure à 100 mSv, souligne le Pr Jean-Pierre Gérard. Pour les très faibles doses, aucun effet héréditaire n'a été constaté chez l'homme. Entre 100 et 1 000 mSv, les morts cellulaires sont également faibles mais les cellules sont soumises à un risque aléatoire de réparations fautives de l'ADN. Certains effets cancérigènes associés aux rayonnements ionisants peuvent alors apparaître. Quant aux doses fortes supérieures à 1 gray (Gy)3, elles provoquent la mort cellulaire et, au-delà d'un certain niveau, donnent lieu à des effets tissulaires obligatoires.

Pour les salariés susceptibles d'être exposés à des rayonnements ionisants (radiothérapie, médecine nucléaire, radiodiagnostic, industrie nucléaire...), les valeurs limites d'exposition s'élèvent à 20 mSv par an (ou 100 mSv sur cinq ans). Ces normes sont issues des recommandations de la Commission internationale de protection radiologique (CIPR).

Toutefois, chez l'enfant, il est à noter que les risques de cancers liés aux rayonnements ionisants sont amplifiés. Le Pr Jean-Pierre Gérard explique que le cartilage de croissance d’un enfant de 2 à 5 ans est particulièrement radiosensible. Son exposition à des doses fortes de 15 ou 20 grays entraîne une perturbation fondamentale de son développement osseux et de sa croissance. Mais l’âge est également très important pour les petites doses et leurs effets cancérogènes. Une dose de 100 mSv chez les adultes n’a aucun effet en risque de cancer radio induit ; pour un enfant, il est possible que jusqu’à 50 mSv, on ait un risque augmenté de cancer radio induit.

Bien doser les examens radiographiques pour limiter les risques

La justification de l'utilisation de rayonnements ionisants dans le cadre d'examens radiographiques est particulièrement importante chez l'enfant, les scanners pouvant délivrer une dose proche de 10 mGy. Il faut donc que le bénéfice attendu soit toujours bien supérieur au risque potentiel. La dose d'irradiation distribuée doit quant à elle être la plus faible possible pour atteindre l'objectif médical.

Chez la femme enceinte, une irradiation du fœtus durant les trois premiers mois de grossesse peut entraîner un excès de malformation. Ce risque s'observant si la dose reçue au niveau de la région de l'abdomen de la mère dépasse 250 mGy, tous les examens radiologiques ne sont pas contre-indiqués. Toutefois, le fœtus ne doit jamais être directement irradié et doit être protégé du rayonnement diffusé. A titre d'exemple, même si un scanner du crâne n'a aucune incidence sur le fœtus, il est contre-indiqué par principe de précaution.

Depuis l'accident en radiothérapie d’Épinal de 2006, beaucoup de contrôles sont effectués notamment par des inspecteurs qui visitent chaque année les installations. Tout dysfonctionnement fait l'objet d'une analyse et, s'il est significatif, est signalé à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Aujourd'hui, le Pr Pierre Bey estime que l'usage des rayonnements ionisants est parfaitement maîtrisé et que de gros efforts sont faits pour limiter les doses médicales.

Notes

  1. La dose efficace se mesure en sieverts (Sv), voire en millisieverts (mSv). Elle exprime le risque aléatoire des rayonnements ionisants sur les tissus humains pour des faibles doses.
  2. Lésions sublétales : lésions qui peuvent être réversibles ou non.
  3. La dose absorbée correspond à la dose physique mesurable reçue par les tissus. L'unité de mesure est le gray (Gy). Les grays sont convertis en sieverts (Sv) ou un millisieverts (mSv) pour les très faibles doses de manière à prendre en compte le plus précisément possible la nature des rayonnements ionisants et des tissus exposés.

Aurélie TRENTESSE Rédactrice Infirmiers.com aurelie.trentesse@infirmiers.com


Source : infirmiers.com