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Quid des infirmiers de nuit mutualisés entre plusieurs EHPAD ?

Publié le 24/04/2019
Quid des infirmiers de nuit mutualisés entre plusieurs EHPAD ?

Quid des infirmiers de nuit mutualisés entre plusieurs EHPAD ?

Le manque de coordination entre les différents moyens de prise en charge des sujets âgés demeure un problème récurrent. Afin d’optimiser les parcours de soins, et limiter les hospitalisations non pertinentes, les EHPAD peuvent mutualiser des infirmiers pour sécuriser les équipes de nuits. L’Anap vient de publier un rapport sur les conclusions des diverses expérimentations de ce dispositif sur six territoires. Si des améliorations sont possibles, le bilan reste globalement positif.

Mutualiser des infirmiers de nuit, un bilan positif quelle que soit la modalité de la présence infirmière.

Basse-Corrèze, Bordeaux, Hautes-Pyrénées, Mayenne, certains arrondissements de Paris et Valenciennois-Quercitain font partie des neuf territoires pilotes qui ont expérimenté la mutualisation d’infirmiers en EHPAD pendant la nuit et les week-ends dans le cadre du programme personnes âgées en risque de perte d’autonomie (PAERPA). En pratique, cela consiste en la mise à disposition d’un infirmier diplômé d’État mutualisé sur plusieurs EHPAD toutes les nuits de l’année, que les équipes des maisons de retraite peuvent solliciter. Le but : améliorer le suivi et la qualité des soins, mais surtout réduire les appels aux services d’urgence et hospitaliers qui ne s’avèrent pas toujours nécessaires . L’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (Anap) vient de publier un rapport assez exhaustif détaillant les bénéfices du dispositif, listant les obstacles et les points à améliorer pour permettre une optimisation de ce projet.

Malgré certaines résistances initiales et parfois des difficultés à trouver des professionnels volontaires pour assurer cette présence de nuit, le bilan s’avère bénéfique et cela quelle que soit la modalité de la présence infirmière. Elle permet de rassurer les équipes de nuit, de favoriser la connaissance de l’ensemble des acteurs et d’assurer ainsi une meilleure continuité des soins -  souligne le texte.

Astreinte ou garde ?

Si le cahier des charges national du PAERPA envisageait la mise en œuvre de cette mesure sous forme d’astreinte, certains territoires ont préféré se tourner vers un modèle de garde. En effet, dans le premier cas, l’infirmier occupe un poste principal de jour. Il est mobilisable, suivant un planning, pendant une plage horaire de nuit et intervient donc sur demande des équipes. En revanche, un infirmier de garde occupe un poste à temps plein. Des locaux lui sont attribués chez l’établissement porteur (l’EHPAD ou le centre hospitalier). Choisir l’astreinte engendrait parfois des difficultés notamment en ce qui concerne les temps de récupération pour les soignants. Les différentes conventions collectives entre les établissements (ce qui sous-entend des règles de rémunération distinctes) compliquaient également la mise en place. Par ailleurs, les infirmiers appréhendaient parfois ce dispositif. Travaillant normalement la journée, ils prenaient en charge des patients dont ils connaissaient les antécédents alors que lors des interventions nocturnes, ils se retrouvaient face à des résidents inconnus. Les maisons de retraite aussi avaient des réticences à laisser entrer des personnels venant d’autres EHPAD de peur de jugement. Ce dernier point s’avérait nettement moins problématique quand l’établissement porteur était un centre hospitalier, ou quand les soignants mobilisés étaient des libéraux, les infirmiers étant considérés comme plus neutres.

Le choix du modèle joue sur le type d’intervention et les missions de l’infirmier. Alors que dans le cas prévu de l’astreinte, il n’est sollicité que lors d’urgences non vitales pour éviter le recours au centre 15, en cas de garde, le professionnel de santé effectue aussi des interventions programmées, ce qui peut s’avérer particulièrement utiles pour les soins de fin de vie .

Des bénéfices clairement identifiés

La mise en application ayant beaucoup varié selon les territoires, il était difficile de mesurer l’impact médico-économique du dispositif. Néanmoins, les acteurs du secteur ont constaté une baisse des hospitalisations en urgences durant la nuit ainsi qu’une diminution du nombre et de la durée des hospitalisations de court séjour quand l’infirmier était de garde (et non d’astreinte). Certaines ARS et certains services des urgences ont également noté une diminution des passages des personnes âgées la nuit.

D’autre part, les personnels impliqués sur les territoires mettent en avant l’aspect sécurisant du dispositif pour les équipes de nuit (AS, ASH notamment). Même lorsque l’infirmier est peu sollicité, sa présence suffit à rassurer les équipes qui se trouvent moins démunies et cela leur confère une aide supplémentaire quant à la prise de décision. En parallèle, l’arrivée d’un soignant de nuit a permis d’apaiser les relations entre le personnel des EHPAD et les équipes du SAMU. Suite au dispositif, ces derniers sont sollicités pour des vraies urgences et l’infirmier de nuit est souvent davantage en capacité de leur délivrer les informations médicales d’importance pour la prise en charge.
En ce qui concerne les résidents en fin de vie, la présence d’un infirmier de garde pouvant réaliser des interventions programmées permet d’accompagner au mieux la personne. Par exemple, la pose et la surveillance de perfusions représentent la majorité des actes effectués par le soignant dans le Valenciennois Quercitain fin 2017. Cela évite d’extraire le résident de son lieu de vie habituel. De manière générale, les personnes âgées nécessitant des soins techniques peuvent être plus facilement pris en charge par un infirmier de garde.

Les obstacles observés et les solutions envisageables

Cependant, le dispositif, pour fonctionner, requiert un engagement important en temps et en énergie de la part de la totalité des acteurs concernés. Il bouleverse l’organisation traditionnelle des établissements et demande des adaptations structurelles indispensables ainsi qu’une communication adéquate entre les personnels concernés. En outre, il n’est pas toujours évident de mobiliser ou de recruter les infirmiers même si les soignants qui ont finalement participé à l’expérimentation en retirent certains bénéfices. Ils notent davantage d’autonomie et une valorisation de leurs compétences.

Afin de garantir la réussite de ce projet, l’Anap liste les principaux moyens permettant au dispositif d’être efficient. Il est notamment nécessaire de formaliser les procédures pour garantir un certain nombre de sollicitations du soignant. Il est également majeur de communiquer et sensibiliser les acteurs. Une communication régulière constitue l'un des leviers essentiels de succès et de pérennité de ce dispositif, martèle le rapport et ce quel que soit le modèle choisi. En effet, une connaissance mutuelle entre les équipes des établissements et les infirmiers de nuit apporte des bénéfices non négligeables, cela participant à établir une relation de confiance. Prenons l’exemple des Hautes-Pyrénées : l’établissement porteur (le CHU de Lourdes) où les infirmiers d’astreinte étaient salariés a organisé une demi-journée de formation en présence des équipes de nuit des EHPAD et des infirmiers mobilisés. Cela leur a permis de se rencontrer et d’évoquer des cas pratiques.

Roxane Curtet Journaliste infirmiers.com roxane.curtet@infirmiers.com  @roxane0706


Source : infirmiers.com