La procureure a également demandé une interdiction définitive d'exercice pour l'infirmier.
Le jugement a été mis en délibéré au 28 janvier 2008 à 14 heures.
Les deux hommes comparaissaient pour "homicide involontaire" après le décès d'un garçon de 12 ans opéré pour une appendicectomie le samedi 25 septembre 2004 vers 17h30 à la clinique du Val d'Ouest.
Transféré par le Samu le lendemain de son opération à la demande de la clinique, le jeune Malo est décédé le 28 septembre dans un hôpital des Hospices civils de Lyon (HCL).
Le rapport d'autopsie a conclu que l'enfant était décédé d'une dépression respiratoire ayant conduit à une anoxie cérébrale à la suite de l'administration sous-cutanée de 50 mg de morphine.
L'enquête a permis de constater que l'infirmier Stephen Lopez, employé par intérim par la clinique, avait injecté par erreur au jeune garçon cinq ampoules de morphine, soit une dose dix fois supérieure à la dose prescrite (5 mg), oralement, par le médecin anesthésiste.
L'infirmier a expliqué qu'il avait utilisé des ampoules de morphine dont l'étiquetage présentait uniquement une formulation en pourcentage de principe actif par millilitre (1%/ml), sans indication de milligramme, et qu'il avait commis une erreur de calcul pensant que les ampoules étaient dosées à 1 milligramme chacune.
"Il a reconnu une erreur de conversion et admis qu'il avait administré la morphine sans prescription écrite", a précisé mardi à l'APM son avocate Me Myriam Picot qui n'a pas plaidé la relaxe compte tenu de ces deux aspects.
En ce qui concerne le médecin anesthésiste, le Dr Jean-Yves Chiara, il lui est reproché de ne pas avoir respecté les règles de prescription de médicaments relevant de la règlementation des stupéfiants en ne mettant pas par écrit sa prescription relative au changement de voie d'administration de la morphine et en n'indiquant pas certaines mentions obligatoires, comme le nombre d'unités thérapeutiques par prise.
Le médecin avait, dans un premier temps, prescrit de la morphine en comprimés. Mais l'infirmier l'ayant appelé pour signaler que l'enfant était nauséeux et risquait de vomir les comprimés, le médecin a modifié sa prescription, par oral, et demandé une injection en sous-cutanée à la même dose.
Il est également reproché au médecin une "mauvaise appréciation" de la gravité du surdosage morphinique dans la nuit après avoir été appelé par l'infirmière de garde, et des "défaillances" dans la prise en charge des symptômes présentés par le jeune garçon.
Selon l'avocate de l'infirmier, jointe mardi par l'APM, l'audience qui s'est déroulée lundi après-midi a également "mis en avant toutes les autres responsabilités de personnes ayant concouru au drame".
Elle indique que dans sa plaidoirie, elle a évoqué la société de travail temporaire qui a procédé au recrutement de l'infirmier par la clinique. Stephen Lopez, diplômé en décembre 2002 d'un institut de formation lyonnais, avait dit à la société d'intérim qu'il ne souhaitait pas exercer dans un pôle chirurgical, souligne Me Picot.
Elle souligne aussi que l'infirmier est arrivé le samedi, c'est-à-dire le jour de l'opération à la clinique, et estime qu'il n'a pas été accueilli et suffisamment encadré.
"Le problème est que Stephen Lopez faisait sa première journée à la clinique. Il n'a vu personne de l'administration, aucun médecin et n'a fait l'objet d'aucune évaluation. Lorsqu'il est parti le soir de l'établissement, personne n'avait son numéro de portable et ne pouvait donc le joindre rapidement pour savoir ce qu'il avait administré précisément", a relaté à l'APM un autre avocat présent à l'audience.
DEBAT SUR L'ETIQUETAGE DES AMPOULES DE MORPHINE
L'avocate de l'infirmier pointe aussi la responsabilité du fabricant des ampoules de morphine, le laboratoire Aguettant, qui a maintenu un étiquetage n'indiquant pas la concentration de la substance active en mg mais en % par ml, alors que plusieurs établissements lui avaient signalé un risque d'erreur au cours des mois précédant l'accident.
Dans un rapport établi fin 2004 et réactualisé en 2005, dont APM a eu connaissance, l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) se montre elle-même critique sur cette question et confirme qu'avant l'accident survenu à la clinique du Val d'Ouest, d'autres établissements hospitaliers publics et privés avaient signalé un risque d'erreur induit par la mention % par ml inscrite sur l'étiquette.
Selon l'Igas, deux accidents auraient même pu avoir des "conséquences cliniques graves", l'un signalé par le CH St Joseph-St Luc de Lyon en février 2004, l'autre par la clinique de la Reine blanche à Orléans en juin 2004.
Le laboratoire a mis sur le marché des ampoules comportant de nouvelles étiquettes le 24 juin 2004 portant l'expression en mg/ml et a arrêté dans le même temps la production des présentations en %/ml, précise l'Igas.
Mais cette commercialisation ne s'est pas accompagnée d'une décision de retrait immédiat de la présentation en pourcentage, a déploré l'Igas. Dans sa réponse, intégrée dans le rapport de l'Igas, le laboratoire a justifié cette absence de retrait par crainte de ruptures de stocks d'un produit considéré comme "indispensable". Les rappels des lots étiquetés en %/ml ont été effectués fin septembre et début octobre 2004.
INTERIM INFIRMIER : L'IGAS CRITIQUE UN MANQUE D'ENCADREMENT
Dans son rapport, l'Igas soulève aussi d'autres problèmes, comme la question de la formation des infirmiers au regard notamment de l'augmentation des quotas dans les écoles qui "rend difficile la recherche de terrains de stage".
Elle critique aussi le manque d'encadrement des conditions de la profession d'infirmier en intérim et l'absence de restriction apportée à cette pratique en particulier chez les jeunes qui sortent de leur école.
L'Igas émet aussi quelques remarques sur le fonctionnement de la clinique du Val d'Ouest et évoque la sécurisation "imparfaite" du circuit du médicament.
Elle se montre en désaccord avec "certaines conclusions" du collège de l'accréditation de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes) (aujourd'hui Haute autorité de santé, HAS), rendues en 2002, sur le circuit du médicament, sur l'existence de protocoles ou sur les procédures d'accueil des nouveaux embauchés.
L'Igas note en revanche que le recours au travail précaire est "réel mais sans être excessif".
Contacté mardi par l'APM, le directeur général de la clinique du Val d'Ouest a indiqué que l'établissement faisait "très peu" appel à l'intérim et qu'il avait créé pour cela un pôle d'une demi-douzaine d'infirmières pour faire face aux absences de personnel.
Il a par ailleurs indiqué que la clinique avait commencé en 2006 l'informatisation des prescriptions et qu'elle serait à 100% de prescriptions informatisées en 2008.
Après avoir été accréditée en V1 en 2002, la clinique du Val d'Ouest a obtenu sa certification en V2 en mars 2007, a précisé également le responsable de la clinique.
INFOS ET ACTUALITES
Prison avec sursis requise pour un infirmier intérimaire
Publié le 22/11/2007
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Source : infirmiers.com
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