PARIS, avril 2004 (APM Santé) - Le tourisme sans risque n'existe pas -si tant est qu'il n'ait jamais existé-, comme le montre la liste des destinations déconseillées par le ministère des Affaires étrangères, mais le respect de certaines précautions permet néanmoins d'éviter de nombreux désagréments sanitaires, a déclaré en fin de semaine dernière le Pr Eric Caumes, du service des maladies infectieuses et tropicales de l'hôpital Pitié-Salpêtrière (Paris).
C'est à l'occasion d'une conférence consacrée aux réactions du corps humain en milieu extrême, organisée par le musée des Arts et métiers à Paris, que ce spécialiste a fait le point sur "les petites bêtes et les maladies" auxquelles les voyages peuvent nous exposer et surtout, sur la façon de prévenir un certain nombre de pathologies.
Pour éviter les soucis de santé au cours d'un voyage, "il faut consulter un dentiste, un médecin et un centre de vaccination avant le départ", a souligné le Pr Eric Caumes. En effet, un bilan de santé et des examens biologiques sont nécessaires pour identifier des contre-indications éventuelles au voyage envisagé (en fonction du mode de transport ou de la destination, par exemple).
La mise à jour du calendrier vaccinal s'avère également capitale "car la couverture vaccinale est insuffisante en France. Par exemple, seulement 82% des Français sont effectivement protégés contre le tétanos, alors que cette pathologie figure dans la liste des vaccinations essentielles", a déploré le spécialiste parisien. Dans cette même liste figurent les vaccinations contre la diphtérie, la coqueluche, la poliomyélite, les trois maladies infantiles rougeole-oreillons-rubéole ainsi que la tuberculose. D'autres vaccinations peuvent également être envisagées selon la destination : fièvre jaune, typhoïde, rage, ou encore grippe.
Au cours de ces consultations préalables, les praticiens délivrent également des conseils sur la composition d'une pharmacie de voyage adaptée à la destination et aux personnes qui en auront l'usage (notamment pour les personnes voyageant avec des enfants en bas âge).
"Il relève de la responsabilité du voyageur de souscrire une assurance ou une assistance avant son départ" qui le couvrira en cas de problème au cours de son voyage, a relevé l'infectiologue parisien.
À CHAQUE PROBLÈME SA PRÉVENTION
La prévention médicamenteuse du paludisme, ou chimioprophylaxie "commence avant le départ et se poursuit après le retour de voyage", a insisté le Pr Eric Caumes. Sur place, elle doit être complétée par la mise en oeuvre de mesures de protection contre les moustiques vecteurs de la maladie : port de vêtements laissant un minimum de peau découverte (chemises à manches longues, pantalons), pulvérisation de répulsifs sur la peau découverte et sur les moustiquaires.
Mais les problèmes peuvent survenir avant même d'arriver à destination, a prévenu l'orateur. Outre le mal des transports (ou cinétose), survenant quel que soit le véhicule, un certain nombre de désagréments peuvent se manifester lors d'un voyage aérien, comme le développement d'otites suite à des barotraumatismes, ou la transmission de maladies infectieuses du fait du recyclage de l'air de la cabine.
Au cours du voyage, il faut aussi se prémunir du "syndrome de la classe économique". "Ce trouble, contrairement à ce que son nom laisse à penser, touche autant les personnes voyageant dans les classes affaires des avions, mais aussi -même si c'est moins fréquent-, les personnes qui font de longs trajets en voiture, en train, en avion ou en bateau", a prévenu le médecin parisien. Dans cette pathologie, l'immobilisation prolongée en position jambes fléchies entraîne la formation d'un caillot de sang dans les veines. Cet agrégat peut remonter des membres inférieurs vers le coeur et sa fragmentation risque de provoquer une embolie pulmonaire (l'obstruction d'une artère du poumon) parfois mortelle.
La prévention, qui repose sur l'hydratation, la déambulation et les mouvements de jambe réguliers au cours du trajet, ainsi que le port de bas de contention élastiques, se montre particulièrement importante dans le cas des insuffisants veineux, des insuffisants cardiaques et des femmes enceintes, très susceptibles de développer ce genre de troubles.
Quant au décalage horaire, autre "bête noire" des voyages en avion, qui provoque des troubles du sommeil, de l'humeur, ainsi qu'une diminution des capacités intellectuelles et sportives, son impact peut être réduit par un décalage progressif des horaires de sommeil et de repas quelques jours avant le départ. "Dans tous les cas, il faut s'adapter aux horaires de la destination dès la montée dans l'avion et tenter de s'y tenir pendant le trajet", a conseillé le Pr Eric Caumes.
RESPECTER LES RÈGLES D'HYGIÈNE ALIMENTAIRE
Une fois sur place, pour éviter d'être victime de la diarrhée du voyageur, il faut boire de l'eau minérale, ou alors n'utiliser qu'une eau filtrée et bouillie au préalable. Les aliments consommés cuits et chauds ne présentent pas de risque et les fruits et légumes doivent être pelés.
Dernier conseil à respecter : "que l'on soit ou non en voyage, il faut éviter de s'exposer inconsidérément au soleil", a rappelé le Pr Eric Caumes. Mais il faut savoir que l'utilisation de crèmes solaires n'a d'intérêt que si elle vient s'ajouter au fait de porter des lunettes de protection et d'éviter les expositions prolongées, en particulier entre 12 heures et 16 heures, a-t-il ajouté.
Le fait d'avoir respecté cette longue liste de conseils et d'être revenu en bonne santé ne constitue pas pour autant une garantie et "s'il n'est pas nécessaire de consulter systématiquement son médecin au retour d'un voyage, c'est en revanche indispensable dès l'apparition de symptômes suspects", a finalement conseillé le Pr Eric Caumes./mr
- Cette conférence s'est tenue dans le cadre de l'exposition temporaire "La boussole et l'orchidée, une aventure savante. Humboldt et Bonplan aux Amériques (1799-1804)", organisée au musée des Arts et métiers à Paris, jusqu'au 31 mai 2004. Renseignements sur Internet : http://boussole-orchidee.arts-et-métiers.net/
- Des informations plus détaillées sur les différents aspects de la préparation du voyage et des risques sanitaires du voyageur sont disponibles :
sur le site Internet du centre médical de l'Institut Pasteur de Paris, www.pasteur.fr/sante
sur la page consacrée au thème "voyages internationaux et santé" sur le site Internet de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), en anglais : www.who.int/ith
dans "Le Vidal du voyageur"
dans les consultations de médecine des voyages, dont disposent la plupart des CHU
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