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GRANDS DOSSIERS

Plaies et cicatrisations : quoi de neuf en 2018 ?

Publié le 02/02/2018

Le partage des savoirs en matière de plaies et cicatrisation est un mouvement dynamique, pérenne, sans cesse en mouvement et ce, pour des bénéfices/patients multiples. Pour en témoigner, du 21 au 23 janvier derniers, au Palais des Congrès de la Porte Maillot, à Paris, 3000 professionnels de santé français, de l'espace francophone et international, experts, cliniciens, chercheurs, de toutes spécialités et terrains d'exercice ont assisté aux Journées Cicatrisations 2018. Ils se sont exprimées avec vitalité lors de conférences plénières, de symposiums, d'ateliers, de posters... Extraits choisis.  

Luc Téot, Président de la Société française et francophone des plaies et cicatrisation (SFFPC) chirurgien plasticien, unité médico-chirurgicales plaies et cicatrisations (CHRU Montpellier) l'a rappelé en préambule de ces Journées Cicatrisation 2018 le monde de la plaie se renouvelle et se réinvente au fur et à mesure de sa croissante visibilité, de la crédibilité acquise par les acteurs médicaux et paramédicaux, oeuvrant ensemble pour assurer des parcours de soins adaptés dans le cadre d'un virage ambulatoire plus difficile chez les personnes présentant des co-morbidités que dans le reste de la population.

Quoi de neuf sur le traitement général et étiologique des plaies ?

Un congrès dont la finalité est de faire avancer l’art et la science dans les soins des plaies.

Sylvie Meaume, vice-présidente de la SFFPC, dermato-gériatre à Paris, dans la littérature médicale 2017, des travaux de recherche, des articles originaux, des études cliniques, des revues générales ou Cochrane actualisent le niveau des connaissances et la diffusion des différents traitements. Des rapports d'industriels et de nombreux cas cliniques réalisés dans le cadre d'études observationnelles permettent également de découvrir des produits innovants qui seront peut-être des traitements de demain de toutes ou parties des plaies. Et de souligner que des solutions nouvelles pour la mise en décharge des escarres ou des plaies du pied diabétique ou pour la compression des ulcères de jambe sont en particulier recherchés . De la même façon, des aides à la nutrition, des antibiotiques qui participent à la prise en charge de certains patients porteurs de plaies compliquées sont aussi rapportées. Cette clinicienne l'affirme, le traitement général des plaies reste, à l'heure actuelle, un savant mélange de preuves scientifiques et d'avis d'expert, tout comme le traitement local de celles-ci mais les études cliniques adoptent de plus en plus une méthodologie proche de celle du médicament.

Les smartphones, tablettes et le développement de nouvelles applications sont utilisables au lit du patient, en particulier pour l'évaluation des plaies, leur suivi et aide à la pratique de plus en plus développée de la télémédecine.

Quoi de neuf dans les infections des plaies ?

Pour le Pr Vincent Le Moing, médecin infectiologue, pôle cliniques médicales au CHU de Montpellier, les infections de plaies sont fréquentes et hétérogènes. Les deux principaux modèles étant l'infection du pied diabétique et l'infection d'escarre pelvienne. Une équipe américaine a récemment proposé une classification des infections de plaie basée sur l'extension locale en surface et en profondeur et l'existence d'une réponse inflammatoire systémique. Il a rappelé que la microbiologie des infections des plaies est dominée par les streptocoques et les staphylocoques qui restent sensibles aux antibiotiques de première ligne en France ; des schémas de première intention qui doivent rester empiriques et simples, dominés par l'amoxicilline-acide clavulanique et la pristinamycine. Pour cet expert, un travail de standardisation des pratiques paraît donc essentiel pour limiter les indications, la durée et le spectre des antibiothérapies prescrites dans les infections des plaies.

Le concept de « colonisation critique » doit être abandonné tant que l'on ne sera pas capable de prédire le potentiel de virulence des bactéries colonisant la plaie.

Quoi de neuf dans les pansements ?

Pour Christine Faure, pharmacien hospitalier (Unité des dispositifs médicaux stériles et implantables, CHU de Montpellier), la connaissance approfondie de la cicatrisation permet une prise en charge de plus en plus adaptée et dynamise l'industrie du médicament. Toutefois, la véritable innovation se fait rare et il s'agit le plus souvent d'évolutions incrémentales.  Cela étant dit, le nombre croissant d'études cliniques témoigne d'une prise de conscience des professionnels sur la nécessité de preuves scientifiques dans le domaine des plaies et cicatrisation, notamment pour l'obtention d'un remboursement ; qui plus est si le fournisseur souhaite une inscription en nom de marque. Christine Faure a souligné qu'à l'ère de l'e-santé, les applications smartphone, gratuites ou payantes, conçues par des associations à but non lucratif, par des industriels ou par l'Assurance maladie sont considérées comme les nouveaux outils d'aide au choix optimisé du professionnel de santé vers tel ou tel pansement. Pour elle, il est fort probable que le pansement de demain sera lui aussi connecté...

Il reste des étapes à franchir pour disposer d'un pansement efficace cliniquement et abordable dans un système économique de santé restreint.

Quoi de neuf en chirurgie des plaies ?

La chirurgie des plaies présente une originalité spécifique, de par la multicomorbidité des plaies chroniques, l'exigence d'une détersion carcinologique et les impératifs de recouvrement par des options chirurgicales garantissant la pérennité de cette couverture a souligné Luc Téot, chirurgien plasticien, unité médico-chirurgicales plaies et cicatrisations (CHRU Montpellier). Comme il l'a explicité, le développement récent d'articles sur l'utilisation de dermes artificiels montrent l'obtention d'une couverture stable en évitant les décollements des lambeaux de couverture chez des sujets dévascularisés. Ces techniques combinées (thérapie par pression négative et dermes artificiels) sont particulièrement utiles dans la prise en charge du pied diabétique.

Si les principes de base du parage restent essentiels dans la prise en charge des plaies souillées ou infectées, la place croissante de la thérapie par pression négative est confortée par la littérature récente.

Communications, posters, symposiums… un savoir expert qui circule et se partage

Traitement du pied diabétiqueEnviron 25 % des diabétiques développeront un ulcère du pied au cours de leur vie, conduisant pour certains à une amputation mineure ou majeure. La mortalité après amputation est supérieure à 70 % à 5 ans. Des thérapies locales nouvelles pourraient changer les paradigmes de traitement de ces patients, particulièrement ceux qui souffrent d'ulcères neuro-ischémiques et chez qui la régulation des métalloprotéases de la matrice a démontré quelque très bons résultats. José Luis Lazaro-Martinez, Madrid, Espagne.

Plaies cancéreusesLes bonnes pratiques concernant ce type de plaies nécessitent avant tout une bonne connaissance du patient et un travail pluridisciplinaire afin de mettre en place des protocoles de soins personnalisés et confortables. Ceux-ci aideront à prendre en charge ce type de plaies qui ont un impact psychologique important et qui se chronicisent très souvent. Marguerite Nicodème, infirmière référente Plaies & Cicatrisation (Paris).

Hypnose et plaies - Les douleurs induites lors des soins de plaies ont fait l'objet d'études cliniques permettant d'améliorer les pratiques professionnelles, voire de proposer de nouveaux dispositifs médicaux. Plus récemment, l'hypnose s'invite dans cette réflexion comme une technique, une approche complémentaire aux soins et aux traitements. Elle s'avère un outil particulièrement efficace dans la prise en charge des douleurs liées aux soins et dans le traitement des douleurs chroniques. Pascal Vasseur, infirmier (Marseille) et Hervé Maillard, dermatologue (Le Mans).

Ethique et plaies - Soigner des plaies cutanées expose à des questionnements éthiques particuliers. Jusqu'où pouvons-nous proposer un soin douloureux aux patients hospitalisés pour soigner leurs plaies ? Est-ce toujours utile ? Faut-il poser une gastrostomie à cette patiente âgée de 83 ans pour l'aider à cicatriser son escarre développée suite à un AVC alors que sa récupération motrice et globale est minime ? Faut-il contraindre cet homme âgé de 50 ans, atteint de troubles mentaux, isolé et confiné à domicile, à être hospitalisé en raison d'une infection d'ulcères de jambe ? Cynthia Le Bon, Chargée de mission. Centre d'éthique clinique  (AP-HP), Nicolas Foureur, dermatologue (Paris).

Pansement à base de poisson ? - Dans la littérature, de nombreux arguments montrent que la peau de poisson est une source de matrice extracellulaire. L'avantage est que cette peau ne doit pas être transformée autant que les autres matrices extracellulaires de mammifères. Il existe une grande proportion de graisses et d'acide oméga 3 dans le dérivé cutané de poisson. A l'heure actuelle, ont été réalisés des travaux scientifiques fondamentaux sur la matrice extracellulaire fabriquée à base de la peau de poisson et il existe de plus en plus d'arguments en faveur de son utilisation clinique. John C. Lantis Li, chirurgien vasculaire, NewYork (Etats-Unis).

La prévalence des escarres dans les services de soins intensifs français est de 18,7 %. C'est un problème connu des services de réanimation malgré les efforts développés pour leur prévention qui doit être encore renforcée.

Une édition 2018 riche d'avancées scientifiques, d'échanges entre chercheurs, experts et cliniciens, de diffusion et de partage des savoirs ; autant de vecteurs et d'occasions de faire avancer l’art et la science dans les soins des plaies. Parmi les quelques 3000 participants, on note la forte présence des infirmiers (71%). Rendez-vous en 2019, les 20 et 22 janvier au Palais des Congrès de Paris Porte Maillot !

Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern


Source : infirmiers.com