Réunis en séminaire le 10 juin dernier, les responsables départementaux de la Fédération Nationale des Infirmiers ont accueilli experts, institutionnels, professionnels, responsables ordinaux autour du thème de la e-santé (télésanté et télémédecine).
Les infirmiers libéraux se sont dits non seulement prêts, mais aussi en attente de partage d’information et d’implication dans l’application des Tic au domicile des patients.
Pourquoi ? Pour que la révolution technologique dans la santé ne se fasse pas au détriment du mieux soigner, mais dans le cadre d’une Haute sécurité santé (HS2) qui réponde à la dimension sociale du développement durable.
En effet, les applications des Tic dans la santé sont en passe de bouleverser l’organisation des soins.
Mais comme le souligne Jacques Lucas, vice-président du Conseil national de l’ordre des médecins : « tout ce qui est technologiquement possible n’est pas éthiquement souhaitable. » De fait, la délocalisation en Asie des actes de radiologie et du suivi des patients chroniques n’est souhaitée ni des patients, ni des professionnels.
Les infirmiers libéraux, qui conçoivent leur mission comme celle d’une prise en charge globale des patients, devront demain :
- accompagner les patients à utiliser les nouveaux outils de la e-santé,
- se situer à l’interface entre le patient et le monde médical,
- assurer, avec le médecin traitant, le suivi des patients chroniques,
- contribuer, comme aujourd’hui, à réduire les durées d’hospitalisation et mieux organiser la prise en charge des patients de retour à leur domicile,…
Pour cela, il ne faut pas de rupture dans la prise en charge, ce qui impose une fluidité et un partage des données médicales.
Ce qui bloque aujourd’hui, ce ne sont ni les solutions techniques, ni la volonté des professionnels, mais la place que l’on concède à l’exercice infirmier. La loi Hôpital, Patients, Santé, Territoires, qui confie aux seuls médecins toute la coordination, y compris l’élaboration du plan de soins, constitue le frein majeur à l’implication des infirmiers libéraux, notamment dans le suivi des patients chroniques, infirmiers exclus du champ du premier recours.
Industriels, patients, infirmiers partagent les mêmes attentes et les infirmiers libéraux utiliseront tous les leviers d’action dont ils disposent pour contribuer à l’amélioration de la qualité de vie des patients en s’impliquant dans la mise en oeuvre des solutions technologiques au domicile et dans une organisation de la santé structurée autour d’une chaîne de télésanté.
Jusqu’à présent et malgré les contributions apportées, les infirmiers libéraux se sentent exclus de la valorisation du dossier médical personnel.
« Les infirmiers libéraux constituent véritablement la plaque tournante de la télésanté entre le patient et le monde médical. Ils sont le ciment logistique de la télésanté », décrit Michel Schaller, vice-président du Gixel (Groupement des industries de l’interconnexion, des composants et sous éléments électroniques). « Vous avez un rôle non pas important mais essentiel », ajoute Yannick Motel, délégué général de Lessis (industriels des systèmes d’information en santé), « pour mieux organiser notre système de santé. C’est une évidence absolue que la télésanté est un enjeu majeur pour les infirmiers libéraux. »
« Le rôle des infirmiers s’inscrit dans la définition d’une chaîne de télésanté. Ils auront à manipuler des objets du quotidien mis à la disposition du patient pour suivre sa pathologie », précise Michel Schaller. « La dimension humaine de la relation soignante devra être renforcée et son besoin sera plus fort », complète Jean-Marc Pocard, infirmier, membre de la commission Galien, concepteur de solutions techniques.
Les intervenants, industriels, experts s’accordent sur la nécessité de confier aux infirmiers libéraux un rôle d’interface entre le patient et le médecin, pour la récolte et le suivi des données, le dispatching des informations, les soins de première urgence, l’accompagnement du patient dans son utilisation de ses implants communicants, de ses dispositifs portés.
Mandaté par Jean-Yves Robin, directeur général du GIP-DMP (Groupement d’intérêt public-Dossier médical personnel), le conseiller médical à la direction générale, Jean-Marie Picard, a proposé aux infirmiers libéraux de participer à la concertation sur l’élaboration de référentiels des systèmes d’information de santé partagés. Ainsi, Jean-Marie Picard a proposé à la Fédération Nationale des Infirmiers d’être associée dès 2009 au sein du programme de relance du DMP dans l’objectif de réaliser des expérimentations au domicile en 2011. Ces expérimentations auraient pour vocation de tester l’implication des infirmiers libéraux dans la mise en oeuvre du DMP et l’activité au domicile des patients.
Pour y parvenir, le conseiller médical estime que les infirmiers libéraux doivent instamment travailler à la formalisation de leurs besoins et de la valeur ajoutée attendue des systèmes d’information partagée. « Pour passer du rêve à l’action, il faut formaliser les choses pour les concrétiser. » Ce qui passera aussi par une réflexion entre la profession infirmière et les autres professionnels de santé avec lesquels leurs liens sont les plus étroits.
Par ailleurs, en réponse à l’invitation de sa présidente le 10 juin, la FNI devrait rejoindre les membres de la commission Galien, commission qui regroupe des compétences transversales dans le domaine de la santé, de façon indépendante et attachée à s’inscrire dans une optique d’intérêt général. Galien rassemble des personnalités légitimes, des associations de patients, universitaires, hauts fonctionnaires, représentants d’industriels spécialisés et vise pas moins de faire de la France un leader de la e-santé.
Pour Philippe Tisserand, président de la FNI, on ne peut pas être choqué de voir le métier de l’infirmier libéral s’adapter aux évolutions technologiques, ni que dans le futur, des actes puissent être abandonnés. « Nous avons fait retirer de notre nomenclature, il n’y a pas si longtemps, les ventouses scarifiées, qui ont pourtant eu toute leur place à une époque. On peut imaginer que demain, du temps soit dégagé aux infirmiers libéraux pour s’investir dans l’éducation thérapeutique, la prévention, le suivi des patients chroniques et que ce rôle soit enfin reconnu. C’est bien l’évolution du cadre législatif réglementaire qui demeure à la traîne des pratiques. Anticiper, proposer, innover, reste du domaine du militantisme. Aujourd’hui, l’urgence qu’il y a à développer ces nouvelles technologies doit au contraire être pour nous un moteur d’évolution. »
Ce qui inquiète le président de la FNI ne porte pas sur les capacités d’adaptation des infirmiers libéraux, mais plutôt sur l’ignorance des décideurs politiques et de leurs administrations sur la nature même des pratiques des infirmiers libéraux et de la valeur ajoutée de leur expertise.
Guy ISAMBART
Rédacteur en chef
Http://www.infirmiers.com
Guy.isambart@infirmiers.com
Pour en savoir plus :
Fédération Nationale des Infirmiers
7, rue Godot-de-Mauroy
75009 PARIS
Tél. : 01 47 42 94 13
Fax : 01 47 42 90 82
Internet : http://www.fni.fr – E-mail : fni@fni.fr
Résumé
Lors de leur séminaire le 10 juin dernier, les responsables départementaux de la Fédération Nationale des Infirmiers ont accueilli experts, institutionnels, professionnels, responsables ordinaux autour du thème de la e-santé (télésanté et télémédecine). Les infirmiers libéraux se sont dits non seulement prêts, mais aussi en attente de partage d’information mais aussi ils sont prêts à s’impliquer plus dans les Tic au domicile des patients.
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