Les urgences sont en crise depuis plus de 6 mois et le mouvement a maintenant atteint l'ensemble des hôpitaux publics arrivés eux aussi à saturation. L'ensemble des personnels de la fonction publique hospitalière est donc appelé à manifester ce jeudi 14 novembre à Paris. Le rassemblement est prévu à midi à Port-Royal puis le cortège partira vers 14h en direction du Sénat, de l'Assemblée nationale et de Matignon.
Quelque 10 000 personnes dans les rues de Paris, cet après-midi, qui se mobilisent et défilent pour sauver l'hôpital public ; ça bouge aussi en province...
Quand l'hôpital sort de son lit, c'est difficile de l'y remettre, met en garde Olivier Véran, député LREM. Le diagnostic concernant l'hôpital public n'est pas nouveau, loin de là, pourtant le gouvernement semble avoir été pris au dépourvu par la situation. Déjà l'an dernier, le milieu médico-social, les EHPAD
et le secteur de la psychiatrie
étaient descendus dans la rue. Depuis mars 2019, les services d'urgence parisiens ont débuté une grève qui, après s'être étendue à tout le pays, semble aujourd'hui sans fin. Ni les 100 euros net mensuels de prime de risque
, ni le pacte de refondation
annoncé par la ministre des Solidarités et de la Santé en septembre dernier n'ont apaisé les tensions. A présent, l'hôpital dans son intégralité est en colère
et compte bien le montrer car beaucoup l'ont maintes fois signifié sur les réseaux sociaux il n'y a pas qu'aux urgences que la situation est devenue intolérable
. Le mois dernier, le nouveau collectif Inter-Hôpitaux lançait un appel à manifester ce 14 novembre afin de faire une démonstration de force.
Les hôpitaux ne sont pas des marchandises ! Ce sont des biens communs
[En direct de la manifestation du #14novembre] « Madame la ministre faites quelque chose, Messieurs Macron et Philippe, on ne vous entend pas, vous êtes sourds ! » Le message de Laëtitia Saint-Martin, infirmière au #SMUR d’Orsay et aux #urgences depuis 13 ans... @agnesbuzyn pic.twitter.com/6F9yPMRrAb
— Infirmiers.com (@infirmierscom) November 14, 2019
L'hôpital public traverse une crise sans précédent
De manière générale, ils sont tous d'accords, aides-soignants, infirmiers, médecins, chefs de service et jusqu'aux directions des établissements de soins : cela ne peut plus durer ! Les économies successives demandées aux hôpitaux publics depuis 10 ans ont conduit à des difficultés majeures d'accès aux soins, à une dégradation de leur qualité et de leur sécurité
, souligne le collectif Inter-hôpitaux associé au collectif Inter-urgences. C'est pourquoi nous demandons un plan d'urgence pour l'hôpital public avec un financement à la hauteur des besoins de santé de la population
. Des propos partagés au moins en partie par la Coordination Nationale des Infirmiers (CNI) qui affirme être prête à se battre contre la destruction programmée du système de santé public
. Nous professionnels de santé ne tolérerons pas plus longtemps les attaques répétées, basées sur des dictats financiers et politiques, que nous subissons
, argumente le syndicat dans un communiqué de presse. Celui-ci exige notamment : la définition de ratios soignants/patients en adéquation avec la charge de travail, une revalorisation de l'Ondam à hauteur des dépenses de santé ou encore l'attribution de fonds permettant aux établissements la mise en place d'effectifs adéquats, le remplacement en cas d'absentéisme ainsi que la gestion de postes aménagés.
De son côté l'Union Syndicale de la Psychiatrie (USP) ne mâche pas ses mots. Selon elle, il est question d'arracher l'hôpital public des mains de l'infamie. La psychiatrie n’est pas à vendre ! Les hôpitaux ne sont pas des marchandises ! Ce sont des biens communs. L’USP exige donc des moyens pour soigner les patients accueillis en psychiatrie. Nous voulons simplement pouvoir proposer un accueil digne de ce nom, par des équipes pluriprofessionnelles, en ambulatoire et à l’hôpital.
Quant au Syndicat National des Professionnels Infirmiers (SNPI), il met l'accent sur la paupérisation de la profession qu'il représente. La profession infirmière est maltraitée, méprisée même, par un éxécutif qui ne reconnait pas nos compétences, ni nos diplômes, à leurs justes valeurs. Dans les années 1980, un IDE gagnait deux fois le SMIC. Aujourd'hui, c'est 1450 euros net pour un débutant soit 1,2 fois le SMIC
, estime Thierry Amouroux, porte-parole du syndicat.
[#Manif 14 novembre ] « Je n’ai pas fait infirmière pour soigner mal ou mettre en danger mes patients » Sandy Ferary est #infirmière depuis 25 ans. Elle estime avoir « beaucoup de recul sur l’hôpital d’avant et de maintenant ». Et le constat est plutôt alarmant... #hopital pic.twitter.com/uZCPh3DUbu
— Infirmiers.com (@infirmierscom) November 14, 2019
D'autre part, la Fédération Nationale des Etudiants en Soins Infirmiers (Fnesi) soutient également le mouvement. Aujourd’hui nous observons un système à bout de souffle, avec des professionnels épuisés, augmentant ainsi le risque de mise en danger des patients comme des soignants. L’hôpital public manque cruellement de moyens financiers, logistiques et humains pour répondre aux besoins de santé actuels. La rémunération des infirmières et des infirmiers, chantier ouvert le 13 octobre 2019 par Madame la Ministre des Solidarités et de la Santé, doit être repensée à la hauteur des compétences et responsabilités inhérentes à la profession
, explique-t-elle par voix de communiqué.
Par ailleurs 70 directeurs médicaux de l'AP-HP l'ont affirmé mercredi 13 novembre via une tribune publiée par Le Monde : l'hôpital public s'écroule
! Ils réclament instamment une hausse du budget alloué à la santé redoutant un point de rupture irréversible
. Nous ne sommes plus en mesure d'assurer nos missions dans de bonnes conditions de qualité et de sécurité des soins
, s'alarment les signataires, à la tête des départements médico-universitaires (DMU) récemment créés à l'AP-HP. Face à la pénurie de personnel, des centaines de lits d'hospitalisation et des dizaines de salles d'opération
sont fermés, chaque semaine des unités de soin ferment
, insistent les auteurs de la tribune. Principales conséquences : les délais de prise en charge s'allongent au point d'obliger les patients à se tourner vers le privé. En outre, trop peu de recrutements de soignants sont en vue pour espérer un retour à la normale
, toujours d'après les directeurs médicaux. De même, la fuite des médecins des hôpitaux universitaires met en péril la formation de toute la profession et le niveau de la santé en France
.
Enfin, la fédération des mutuelles de France s'est aussi engagée avec les professionnels de santé ce 14 novembre car malgré la mobilisation historique des personnels hospitaliers, la réponse gouvernementale est toujours totalement insuffisante.
Paramédicaux des urgences, infirmiers anesthésistes, infirmiers de bloc opératoire, et ensemble du monde hospitalier... Tous ensemble mobilisons nous le #14novembre !
— L'Inter-Urgences (@InterUrg) November 12, 2019
Avec @InterUrg, @AFIADEenLutte et @CBlocs #EnsembleSauvonslHopital#SoutienAlaGreveDesUrgences pic.twitter.com/O51yjoF7v0
Le jeudi noir des blouses blanches
Ainsi les revendications sont claires et demeurent les mêmes : revalorisation salariale, augmentation des effectifs et réouverture des lits fermés. Mais vont-elles enfin être entendues ? D'autant plus que cette fois l'interlocuteur privilégié n'est pas le ministère de la Santé mais bel et bien Bercy ! En effet, même si Agnès Buzyn travaille sur un nouveau plan de soutien qu'elle devrait présenter dans le courant du mois de novembre, l'enjeu a changé.
Toutefois, Bruno Le Maire avait rappelé suite à la déclaration présidentielle où Emmanuel Macron
admettait qu'il allait falloir remettre des moyens, parce qu'il faut qu'on réponde à la souffrance des personnels de santé
, qu'il n'avait pas l'intention d'augmenter les dépenses. L'état de nos finances publiques justifie que, si l'on dépense de l'argent pour l'hôpital, nous trouvions des économies en face
. L'idée d'une reprise, même partielle, de la dette des hôpitaux publics leur permettant ainsi d'emprunter à des taux négatifs et d'économiser quelques centaines de millions d'intérêts par an, n'est pas une option envisagée
, avait par ailleurs souligné le ministère de l'Économie et des Finances.
Néanmoins, le gouvernement pourrait activer d'autres leviers, en particulier via le PLFSS 2020 qui est actuellement examiné par le Parlement et qui, pour l'instant ne permet pas d'assurer les recettes suffisantes pour faire face aux besoins des usagers et pour reconnaitre davantage le travail et l'engagement des personnels de santé
comme l'affirme la Fédération Syndicale Unitaire (FSU), qui soutient également la manifestation. D'autre part, Agnès Buzyn a annoncé récemment au Sénat que des débats avaient lieu au sujet de l'Ondam qui prévoit une progression limitée à 2,3%, dont 2,1% pour l'hôpital. Ces discussions sont lourdes de conséquences, elles nécessitent des arbitrages difficiles
, a prévenu la ministre.
A voir maintenant si la manifestation d'aujourd'hui va changer la donne.
[En direct de la manif du 14 novembre] #Infirmiers, IPA, IADE, IBODE, cadres de santé, formateurs ... ils sont tous dans la rue pour « sauver l’hôpital », notre hôpital. #hopitalpublic pic.twitter.com/dXQQRtbT3M
— Infirmiers.com (@infirmierscom) November 14, 2019
Roxane Curtet Journaliste infirmiers.com roxane.curtet@infirmiers.com @roxane0706
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