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AU COEUR DU METIER

L’exposition au risque chimique à l’hôpital : quand soigner devient un danger

Publié le 20/05/2015
contamination chimique

contamination chimique

En France, presque 10% des professionnels de santé sont régulièrement exposés aux risques de contamination chimique. Lorsque soigner représente un risque pour les soignants, il devient indispensable de développer des dispositifs médicaux performants afin d’assurer leur sécurité. C’est l’ambition de la société Becton Dickinson (BD). En commercialisant le dispositif de transfert en système clos PhaSeal®, BD espère diminuer les risques de contamination chimique liés à la reconstitution des médicaments cytostatiques. Un pari qui semble remporté, à en croire une récente étude menée par une équipe du CHRU de Lille.

En France, presque 10% des professionnels de santé sont régulièrement exposés aux risques de contamination chimique.

En France, environ 10% des soignants sont régulièrement exposés aux médicaments cytostatiques. Ces substances, qui inhibent la croissance des cellules saines et des cellules cancéreuses, peuvent provoquer des dommages biologiques et organiques irréversibles. Parmi ces produits, nous retrouvons notamment les antiviraux, les cytotoxiques, les radiopharmaceutiques et les médicaments contenant des organismes génétiquement modifiés. Leur utilisation expose les professionnels de santé, ainsi que les patients, à un fort risque de contamination iatrogène. Lorsqu’on considère les professionnels amenés à manipuler ces produits, on remarque des toxicités immédiates, mais également des toxicités retardées. Et, ce sont ces dernières qui nous inquiètent le plus, explique le Professeur Pascal Odou, chef de pôle adjoint de l’Institut de Pharmacie du CHRU de Lille. Certes, on a vite remarqué la présence de substances mutagènes dans les urines des patients traités par cytotoxiques. Mais, lorsqu’on s’est penché sur les infirmières qui manipulent ces produits, on en a également retrouvé dans leurs urines. C’est dans ce contexte que les dispositifs de transfert en système clos (DTSC) ont fait leur apparition sur le marché. Très vite, ils ont représenté un moyen efficace de diminuer ce risque.  

L'utilisation de médicaments cytotoxiques expose les professionnels de santé à un risque de contamination  chimique.  

Le système PhaSeal® : un dispositif de transfert efficient

Becton Dickinson (BD), acteur majeur dans le domaine des technologies médicales, a développé  PhaSeal®, considéré comme le premier dispositif de transfert en système clos.  La sécurité des professionnels de santé est notre priorité. À ce titre, nous travaillons avec les établissements de santé, dans une démarche collaborative, afin d’évaluer les risques et d’élaborer des solutions appropriées, affirme Audrey Fayard, Pharmacien Responsable de Gamme chez BD.  Pour tendre vers cet objectif commun, le Professeur Pascal Odou et son équipe ont mené une étude sur l’utilisation de ces dispositifs dans la préparation des médicaments cytostatiques. Présentée en mars dernier au Congrès Européen de pharmacie hospitalière, cette recherche est une comparaison du taux de contamination chimique entre deux dispositifs : le système PhaSeal® versus un système de reconstitution standard. Beaucoup de recherches ont été faites sur ces systèmes, mais dans une véritable unité de production avec un personnel classique travaillant selon des méthodes standard, précise le Professeur Odou. On a donc élaboré une étude afin de déterminer si le dispositif de transfert en système clos PhaSeal® était en mesure de réduire la contamination chimique, de façon significative, en condition réelle, au sein d’une équipe de soignants « aguerris ». Le deuxième objectif était de tester la simplicité d’utilisation de ce dispositif. Cette étude a été menée sur une période de 6 mois, dans une nouvelle structure de préparation de cytotoxiques exempte de toute contamination chimique. Durant cette longue période, le taux de contamination de 10 substances cytotoxiques1 différentes a été mesuré dans les conditions de travail standard d’une unité de reconstitution. Cette structure était équipée de 2 isolateurs séparés. Dans l’un, les médicaments furent préparés, durant toute l’étude, avec des dispositifs standard de préparation (spike ou aiguilles pour les petits volumes), tandis que dans l’autre, l’ensemble des préparations médicamenteuses fut réalisé avec le système PhaSeal®. Pendant ces 6 mois, 90 préparations par jour ont ainsi été effectuées dans chaque isolateur.  Les résultats démontrent un pouvoir protecteur significatif du système PhaSeal®.  On se rend compte que dans le cadre d’une utilisation du système standard, on a un taux de contamination de l’ordre de 23% environ. Mais lorsqu’on travaille avec PhaSeal®, on constate que cette contamination est diminuée de 50%, argumente le Professeur Odou. De plus, sur les 3 surfaces différentes (les gants, la face interne des vitres et le plan de travail) ayant été en contact avec ces substances cytotoxiques, on remarque une diminution de leur contamination de l’ordre de 50 à 90%, dans les conditions d’utilisation du système PhaSeal®. Hormis ces avantages, nous pouvons mettre en avant un maintien de la productivité des soignants. Dès les 15 premiers jours de cette étude, on relève une bonne opinion des professionnels de santé au sujet du système PhaSeal®. Et, cette opinion continue à évoluer favorablement durant les 6 mois de l’étude.

Le système PhaSeal® permet de sécuriser la reconstitution des médicaments cytotoxiques.  

Cependant, l’utilisation d’un dispositif efficace, tel que le système PhaSeal®, ne suffit pas à réduire ces risques dans leur intégralité. Encore faut-il respecter les recommandations définies par les autorités sanitaires. Dès le début de l’utilisation de ces substances, dans la prise en charge des patients, il y a eu des discussions. Puis, sont arrivés différents textes, notamment la directive européenne de 1990. Ensuite, est apparu le décret sur les règles de prévention des substances cancérogènes en 2001. Enfin, depuis 2007, les bonnes pratiques de préparation à l’hôpital prévoient « une méthode de préparation maitrisée, validée pour limiter les risques de contamination des locaux de préparation ». Ces recommandations prescrivent  avant tout l’utilisation d’un équipement adapté. On a assuré une certaine sécurité, notamment en mettant en place des isolateurs et des hottes. Le but étant, à l’époque, de favoriser une protection collective, puis individuelle, en formant les professionnels à la manipulation de ces médicaments. L’amélioration de cette sécurité fut possible grâce à l’apparition des dispositifs de transfert en système clos, souligne le Professeur Odou. Et de poursuivre : Ici, avec le système PhaSeal, nous sommes sur quelque chose d’excellent, en termes de présentation et d’utilisation.  

A Robert Debré, afin de réaliser avec le maximum de sécurité les 9000 chimiothérapies prévues en moyenne chaque année, nous assurons la formation de 70 infirmiers, de 35 aides-soignants et de 6 préparateurs en pharmacie.  

Sensibiliser le personnel soignant

Lorsque l’on passe en revue ces risques chimiques, d’une façon plus précise, on se rend compte que chez les infirmières qui manipulent les cytotoxiques, la probabilité d’un avortement spontané est multipliée par deux, les cas de grossesse extra utérine sont plus importants, et l’apparition d’anomalies chromosomiques  est plus fréquente, selon le Docteur Marie Perrinet, praticien hospitalier au sein du service de pharmacie de l’hôpital Robert Debré. Autant de raisons qui justifient la mise en place d’une politique de sensibilisation du personnel soignant. C’est au cours de l’administration que le risque de contamination des infirmiers est le plus important. À l’hôpital Robert Debré (APHP), un travail de prévention a été mis en place. Durant l’administration, le risque majeur est de se retrouver en contact direct avec la chimiothérapie. Pour éviter cela, notre pharmacie fournit aux services des préparations équipées d’une tubulure préalablement purgée par un solvant neutre pour les poches, ou de systèmes sécurisés pour les seringues, explique le Docteur Victor Massot, assistant spécialiste en pharmacie. Ce qui représente un élément majeur de cette prévention, c’est la formation continue des soignants et la rédaction de protocoles spécifiques. A Robert Debré, afin de réaliser avec le maximum de sécurité les 9000 chimiothérapies prévues en moyenne chaque année, nous assurons la formation de 70 infirmiers, de 35 aides-soignants et de 6 préparateurs en pharmacie. Cette formation aborde des points méthodologiques très variés tels que la façon d’éviter toute contamination individuelle lors du retrait de son équipement. Ce n’est pas parce qu’on a des gants, une charlotte et une casaque qu’on évite la contamination. Il y a également un risque au moment où le soignant ôte sa tenue. Il doit l’enlever de façon correcte parce qu’il peut aussi se contaminer au cours de cette étape. Or, les professionnels de santé n’en ont pas toujours conscience. Cet aspect formatif du personnel est d’une importance majeure : La formation initiale à la manipulation des médicaments cytostatiques est totalement déficiente dans les études médicales et paramédicales. Seuls les préparateurs en pharmacie disposent de quelques bases.      

C’est au cours de l’administration que le risque de contamination des infirmiers est le plus important.  

Et cela, Becton Dickinson l’a bien compris. Hormis, son objectif d’élaborer des dispositifs facilement manipulables, BD met un point d’honneur à former leurs utilisateurs. Aujourd’hui, on reste confronté à des infirmières qui n’ont pas forcement cette sensibilité aux risques chimiques. Or, chez BD, on s’engage fortement dans la formation des soignants. Nous avons un groupe d’infirmières « support clinique », non commercial, qui travaille avec les établissements de santé et qui est dédié a la formation et a l’accompagnement des soignants, souligne Audrey Fayard. Récemment, nous avons participé à la mise en place d’un groupe de travail au sein d’un CHU. Dans cet hôpital, les pharmaciens,  en charge des chimiothérapies et des dispositifs médicaux,  collaborent avec  les cadres de santé et les infirmières, dans le but d’évaluer les risques liés à l’administration ou à la reconstitution  de ces produits cytotoxiques, en situation d’urgence. Cette sensibilisation doit également passer par un suivi médical régulier des soignants exposés aux risques chimiques. Pour le Docteur Victor Massot, il est indispensable que le personnel concerné soit fréquemment examiné par un médecin du travail et que les infirmières enceintes arrêtent d’administrer  les chimiothérapies dès le début de leur grossesse. Cependant, le Professeur Odou émet quelques réserves à ce sujet. Actuellement, le dosage urinaire des substances mutagènes chez les professionnels exposés aux risques n’est pas systématique. En effet, pour l’instant il nous est impossible d’établir des liens entre leur présence dans les urines et de potentielles conséquences cliniques. La deuxième raison c’est que nous ne savons pas encore à quel moment il est nécessaire de déclencher une procédure afin d’interrompre l’activité des soignants exposés. Enfin, lorsque que vous annoncez à un professionnel la présence d’anticancéreux dans ses urines, cela entraine un vent de panique. Enfin, si cette sensibilisation semble efficiente chez le personnel paramédical, elle reste limitée chez les médecins. A Robert Debré, le risque majeur réside chez les médecins car ce sont eux qui font les injections intrathécales avec des aiguilles qu’il nous est impossible de sécuriser. Il n’est pas rare de voir des praticiennes enceintes manipuler ces produits, malgré les dangers. Les médecins sont finalement beaucoup moins vigilants et sensibles que les infirmières. En effet, ces dernières ont  immédiatement adhéré à nos mesures de prévention, réagit le Docteur Marie Perrinet.  

Becton Dickinson s’engage fortement dans la formation des soignants afin de renforcer leur sécurité.  

La formation initiale à la manipulation des médicaments cytostatiques est totalement déficiente dans les études médicales et paramédicales. Seuls les préparateurs disposent de quelques bases.

Les aides-soignants et le personnel d’entretien également concernés

Lorsqu’un patient est traité par des médicaments cytostatiques, une élimination de ces produits s’effectue par voies naturelles jusqu’au 15ème jour suivant le début de la cure. Or, la contamination des toilettes, et notamment des cuvettes des WC, est particulièrement importante. Elle représente un risque pour ceux qui les entretiennent, explique le Professeur Odou. Et d’ajouter : Certains hôpitaux commencent à réfléchir sur le traitement de ces effluents contaminés. Aujourd’hui, ce que nous sommes en train de démontrer, c’est que le retour de ces patients en ville entraine une contamination importante des logements. En outre, les différents services d’un même établissement sont eux aussi facilement contaminés. Aujourd’hui, le port de gants est, certes, réalisé, mais le personnel hospitalier travaille en manches courtes. Donc toute la partie au-dessus des mains reste nue, et c’est à ce niveau-là que la peau peut être contaminée. Vous avez aussi le problème de la contamination disséminée provoquée par la circulation d’un chariot non nettoyé d’un service à un autre. De ce fait, bien qu’elle mérite une sérieuse réflexion, la problématique du nettoyage de ces substances reste en suspens pour le moment. Nous sommes plusieurs équipes à travailler sur la performance du nettoyage. On sent que c’est une chose compliquée car ces cytotoxiques ont un comportement très particulier. Il n’en demeure pas moins qu’une réelle avancée, en matière de prévention des risques chimiques à l’échelle individuelle, a été possible grâce à la commercialisation du système PhaSeal®. Et puisque la société Becton Dickinson s’inscrit dans une démarche d’amélioration des pratiques, ces risques tendent vers une diminution significative, grâce à leurs dispositifs médicaux.  

Note

  1. Cyclophosphamide, ifosfamide, dacarbazine, 5-FU, methotrexate, gemcitabine, cytarabine, irinotecan, doxorubicine et ganciclovir 

Gwen HIGHT  Journaliste Infirmiers.comgwenaelle.hight@infirmiers.com@gwenhight

Cet article, réalisé en partenariat avec Becton Dickinson (BD), rend compte de l'atelier de presse organisé le 21 avril 2015 à Paris sur la thématique suivante « Exposition des soignants au risque chimique et biologique à l'hôpital : renforcer la sensibilisation et les bonnes pratiques de prévention lors de la manipulation des molécules dangereuses ». 


Source : infirmiers.com