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Les infirmiers de pratique avancée en font-ils trop ?

Publié le 03/10/2019
journées AFDS 2019 lille

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Les infirmiers de pratique avancée (IPA) sont-ils susceptibles de mettre leur grain de sel dans l’organisation d’un service, au détriment des cadres de santé ? C’est en tout cas ce que leur permet le Ministère et que n’a pas manqué de confirmer un IPA, lors des Journées d’études des Directeurs de soins aujourd’hui à Lille. Les congressistes n’ont pas approuvé, de même que les arguments qu’ils ont formulés en faveur de leur présence au sein des unités d’urgence.

Crédit - Fnesi -La pratique avancée infirmière est sans doute un progrès significatif pour l’ensemble du système de santé et pour la continuité des soins apportés aux patients. Mais les IPA ne devraient pas en faire trop dans leur désir de reconnaissance et adopter une communication homogène et réaliste, contrairement à ce que l’on a pu entendre aujourd’hui...

Les Journées d’Etude des Directeurs de Soins qui se déroulent du 2 au 4 octobre 2019 au Grand Palais de Lille ont fait l’objet, ce jour, d’une table ronde dédiée aux infirmiers de pratique avancée qui a suscité de vifs débats parmi les participants.

IPA : une position intermédiaire bien affirmée

Il s’agissait, pour les organisateurs, de faire un point sur les évolutions de ces nouveaux professionnels dans la pratique et d’identifier les différentes interactions qui se font jour avec les autres acteurs du soin. Florence Ambrosino et Julie Devictor, qui sont un peu les pionnières françaises en la matière, ont eu un discours très didactique sur le sujet. La première a tenté d’asseoir de manière pertinente la position des IPA dans une position intermédiaire entre le médical et le paramédical, dans les limites du champ des maladies chroniques et des missions spécifiques qui leur a été accordées. La seconde a, quant a elle, réaffirmé les compétences selon lesquelles l’IPA peut réaliser les consultations de suivi et renouveler les prescriptions médicales, entre autres, tout en insistant sur le fait que le diagnostic est dévolu au médecin.

Un rôle bénéfique pour tous les acteurs du soin

Les autres intervenants ont tout autant fait preuve de consensus, Guillaume Bonnet, IPA en formation et Jocelyn Schwinggrouber, IPA doctorant en recherche clinique et en Santé publique établissant une sorte de bilan de leur formation ou de leur jeune pratique. Le Pr François Puisieux, Chef de Pôle de Gérontologie au CHU de Lille, l’un des promoteurs de la pratique avancée infirmière, renchérissait en mettant en lumière l’importance de cette profession intermédiaire, tant pour les médecins qui espère voir leur charge de travail partagée, que pour les autres soignants qui pourraient s’appuyer sur des collègues aux compétences améliorées. Brigitte Feuillebois pouvait alors diffuser le discours feutré et consensuel de la DGOS pour laquelle elle est conseillère experte concernant les professions paramédicales.

Quelques informations ont tout de même fait réagir la salle, notamment lorsque Julie Devictor a évoqué les 10 € bruts mensuels que son DE d’IPA lui avait permis d’acquérir – On se moque de nous, a-t-elle justement lancé à ce sujet – ou lorsqu’elle a confirmé qu’un IDE ayant tout juste validé son DE avait tout loisir d’engager des études d’IPA – tout en ajoutant qu’il ne pouvait pas exercer en tant que tel tout de suite après l’obtention du diplôme d’IPA -.

Des missions qui entreront en conflit avec celles des cadres de santé

Mais les choses ont pris une toute autre tournure lorsque le temps des questions émanant de la salle fut venu. Faisant allusion aux textes réglementaires concernant les prérogatives des IPA et relatifs au Projet « Ma Santé 2022 » , un congressiste évoquait des missions d’organisation au sein d’une unité faisant partie intégrante des prérogatives IPA. Il en déduisait que le rôle du cadre de santé perdrait alors de son influence, ce qui est susceptible de poser un véritable problème de gouvernance. Une réponse a alors été donnée selon laquelle il faudrait, dans ce cas, se mettre autour d’une table et distribuer les rôles. Autrement dit, pousse toi de là que je m’y mette ! Cela promet de jolies empoignades.

Une présence non pertinente dans les services d’urgences

Un autre commentaire émanant de la salle a retenu notre attention, qui fustigeait le récent Plan de refondation pour les urgences annoncé par la Ministre Agnès Buzyn annonçant la mise en place de postes d’IPA au sein des services d’urgence. L’argument du congressiste consistait à démontrer que cette compétence ne cadrait pas avec la notion d’urgence et que ces postes risquaient d’être inutiles, étant donné, comme cela avait été dit plus haut, que ces professionnels ne seraient pas appelés à faire de diagnostic. Une réponse très alambiquée fut alors donnée pour essayer de démontrer la pertinence de cette annonce, affirmant notamment que les IPA pourraient, par exemple, assumer le rôle d’infirmier d’accueil et d’orientation. Tu parles d’une pratique avancée ! Valider une formation aussi poussée pour finir aiguilleur de lits ? Le brouhaha qui résulta de cette réponse sonnait comme un désaveu cinglant pour l’orateur.

La pratique avancée infirmière est sans doute un progrès significatif pour l’ensemble du système de santé et pour la continuité des soins apportés aux patients. Mais les IPA ne devraient pas en faire trop dans leur désir de reconnaissance et adopter une communication homogène et réaliste, contrairement à ce que l’on a pu entendre aujourd’hui.

Bruno Benque
Rédacteur en chef www.cadredesante.com
bruno.benque@cadredesante.com
@bbenk34


Source : infirmiers.com