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IADE

« Les infirmiers-anesthésistes diplômés d’état sont aussi spécialisés en médecine d’urgence ! »

Publié le 05/01/2016
brancard nuit urgences pompiers

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Notre profession vient de prendre connaissance de l'éditorial des Annales Françaises de Médecine d'Urgence1 parues en cette fin décembre 2015, cosigné par les représentants médicaux de la spécialité, intitulé : "Place de l'infirmier anesthésiste dans la médecine d'urgence de demain ?".  Voici en réponse, et par communiqué de presse (PDF), nos arguments, point par point, pour faire valoir notre place et nos compétences.

Les IADE répondent aux médecins urgentistes et font valoir leurs compétences.

Place de l'infirmier anesthésiste dans la médecine d'urgence de demain ?. C’est une question posée par les auteurs pour apporter une réponse cinglante à une publication de notre syndicat professionnel traitant de la place de l'infirmier(e)-anesthésiste diplômé(e) d’état (IADE) en Service Mobile d’Urgence et de Réanimation (SMUR)2. Par ailleurs, notre syndicat professionnel avait protesté3 lors de la publication récente du « livre blanc » de l’association « Samu-Urgence de France »4 qui occultait tout rôle paramédical dans l’organisation de l’urgence hospitalière française. Nous sommes (pour le moins) surpris par le manque de respect dont font preuve les auteurs et les entités qu’ils incarnent, feignant de nier une partie de nos compétences et de notre identité professionnelle.

Notre profession ferait ingérence dans une spécialité étrangère à son cœur de métier

Nous nous réjouissions de la création récente du diplôme d’étude spécialisées complémentaires de médecine d’urgence, nous n’imaginions pas que cela fusse synonyme d’une éviction de notre profession de par sa dénomination ! Les IADE ne sont pas étrangers à la médecine d'urgence, c'est historiquement une de leurs spécialités. Comme souligné dans l'éditorial, les IADE sont présents depuis la création des SAMU aux cotés des médecins anesthésistes puis urgentistes.

Nous sommes les représentants d’une profession paramédicale spécialisée, formée à la prise en charge des urgences pré-hospitalières, qui expriment un point de vue argumenté sur la plus-value évidente des infirmiers anesthésistes dans l’exercice pré-hospitalier. En consultant les textes officiels qui fondent notre cœur de métier, les auteurs auraient pu y lire sa définition officielle : L’infirmier anesthésiste diplômé d’ Etat réalise des soins spécifiques et des gestes techniques dans les domaines de l’anesthésie-réanimation, de la médecine d’urgence et de la prise en charge de la douleur.5 Nous affirmons que la formation conduisant au diplômé d'état d'Infirmier Anesthésiste est aussi destinée à former des professionnels de l'urgence pré-hospitalière ; afin qu’ils puissent la pratiquer prioritairement conformément aux textes réglementaires6. Cela a été réaffirmé en 2012 dans les référentiels de compétences, d'activités et de formation annexés à l'arrêté de formation conduisant au diplôme d'état d'infirmier anesthésiste7.

La formation IADE serait inadaptée, voire incomplète pour l’exercice en médecine d’urgence

Les auteurs sous-estiment les apports dispensés en école d'IADE concernant le raisonnement clinique et les capacités réelles des IADE à évaluer un état de santé et ce, malgré des connaissances approfondies reconnues en pharmacologie, médecine générale, organisation des systèmes d’urgence, anesthésie réanimation et soins8. Les apports théoriques et techniques sont adaptés voire consacrés à l'activité extra-hospitalière, avec notamment une unité d’enseignement (UE) dédiée à la prise en charge des urgences pré- hospitalières9 où l’on peut retrouver entre autres l’anesthésie avec un médecin non spécialisé et la réalisation d'un bilan lésionnel et fonctionnel d'une victime.

  • Les spécificités et conduites à tenir liées aux pathologies des patients (« terrains ») sont délivrées dans les UE dédiées à l’anesthésie.
  • Les grandes défaillances en situation d’urgence et « grands syndrômes » sont abordés : Traumatiques, cardio-circulatoires, respiratoires, neurologiques et métaboliques, brûlés, urgences pédiatriques et obstétricales…
  • Les connaissances nécessaires en « pharmacologie spécifique à l’anesthésie, la réanimation et l’urgence »10 sont dispensées.

Refuser de prendre en compte une formation de niveau master comme une plus-value dans la prise en charge des patients c'est remettre en question toute formation diplômante et universitaire.

Les IADE n’auraient pas reçu de formation en soins généraux : psychiatrie, traumatologie…

Avant de devenir IADE, nous avons été Infirmiers de soins généraux et très souvent issus des services d'urgences et de réanimation. Nous avons bénéficié de la même formation initiale et continue (processus psychopathologiques, traumatiques, soins d’urgence...)11 que nos collègues avec une expérience professionnelle dont ne bénéficient pas les recrutements sortant des Instituts de formation.

La présence des IADE en SMUR ne serait plus justifiée du fait des effectifs déclinants de médecins anesthésistes dans cette activité.

Le positionnement en SMUR de notre profession ne doit pas dépendre de l’effectif des médecins anesthésistes au sein des structures d’urgence. Notre pratique pré-hospitalière, notre destinée n’est pas scellée aux orientations médicales de la spécialité d’anesthésie. Malheureusement ce « raccourci » est pris par certains décideurs, faisant disparaître IADE des équipages souvent au prétexte de restructurations et raisons budgétaires au détriment de la qualité des soins. Ce constat de disqualification de notre profession et de déqualification rampante de l'urgence pré- hospitalière a motivé depuis plusieurs années la volonté de la profession de promouvoir son rôle en SMUR.

Cette mise au point sur la définition de notre profession, l’affirmation de notre place et de notre formation de spécialité s’opposent aux principaux arguments distillés tout au long de l’éditorial.

Les IADE revendiqueraient leur place en SMUR en refusant l'exercice polyvalent en médecine d'urgence intra hospitalière et risqueraient de désorganiser les services.

Concernant l’exemple avancé sur la polyvalence des médecins urgentistes, cette règle n'est pas absolue car de nombreux médecins de SAMU et SMUR n'exercent pas au service d'accueil des urgences (SAU). En SAU il existe déjà des IADE en exercice complet ou mixte affectés aux salles de déchoquages et soins aigus. De par leur spécialité ils n'intègrent pas le roulement infirmier mais un roulement spécifique et exercent souvent un rôle de référent ou formateur (CESU). Cet exercice IADE est également répandu dans les unités de réanimations chirurgicales et centres d'accueil des patients traumatisés sévères. La polyvalence peut être une solution dans les services à faible activité mais ne doit pas être une position dogmatique car, il y a aussi le risque d’une maîtrise superficielle des différents domaines d'activités.

La maquette de formation IADE avec son stage obligatoire au SAMU ne serait plus réalisable (souhaitable…) ?

Qui fait de l'ingérence dans la formation d'une profession existant depuis plus de 60 ans ? Une profession d’autant plus confortée récemment dans son rôle par une réingénierie de sa formation (2012)12 et qui a obtenu la reconnaissance de son diplôme d’état au grade de Master II13 après évaluation des instances de l’enseignement supérieur (2014) 14. Il n'y a jamais eu de problème pour accueillir les stagiaires IADE en dehors d'une volonté de les exclure. Une situation locale ne doit pas être prise comme illustration d'un problème national. Nous percevons dans cet écrit une menace proférée envers toute la filière IADE.

Aucune anesthésie ne serait pratiquée en pré-hospitalier

Les différences sémantiques entre sédation-analgésie et anesthésie, ne convaincront personne. Les techniques, les procédures, la pharmacopée sont identiques. Ces aspects, associés à la gestion de la douleur, sont maîtrisées par les infirmiers-anesthésistes. C’est d’ailleurs ce qui en fait quotidiennement des adjoints de choix aux côtés des médecins urgentistes qui savent compter sur leur technicité, leur raisonnement clinique et la maîtrise des procédures de « sédato-analgésie » et de réanimation adaptées à tous les types de patients. Il est même souligné dans le document cité en référence que parfois une anesthésie doit être réalisée sur le bord de la route et que l'urgentiste doit se former à ces techniques au bloc dans les services d'anesthésies. contredisant en partie une démonstration se voulant péremptoire.

Les représentants médicaux de la médecine d’urgence s’opposent formellement à une réponse graduée à l’urgence où la paramédicalisation des secours aurait un rôle à jouer.

La paramédicalisation du secours à personne est une réalité d'aujourd'hui, non officiellement dans plusieurs SAMU, officiellement pour d’autres ; mais surtout par l'utilisation des Véhicules Légers Infirmiers des Sapeurs-pompiers dont une grande partie des interventions est aussi réalisée à la demande des SAMU. C’est aussi et surtout un choix supplémentaire, une réponse graduée à l’urgence pour le médecin régulateur qui doit actuellement décider d’envoyer soit une équipe médicale constituée soit un équipage secouriste… Quant à l’aspect tarifaire, le « livre blanc » de l’organisation Samu-Urgences de France15 souligne que le nombre d'urgences absolues n'est pas en augmentation et qu'un grand nombre d'interventions SMUR sont des levées de doutes liées à l'indisponibilité de la permanence des soins. Sachant que les interventions sont régulées médicalement, l'envoi de vecteurs paramédicaux intermédiaires - avec renfort médical secondaire déclenchable - permettrait de mettre en adéquation le coût et le rapport bénéfice / risque d'une partie des interventions du SMUR. Afin de garantir une sécurité optimum des intervenants, nous proposions, pour certains types d'interventions, une réponse adaptée à l’urgence avec un personnel spécialisé, garant d'un haut niveau de prise en charge. Les conclusions des travaux des Docteurs Pineau et Jannière16 concernant le rôle des IADE en situation de catastrophe prennent tout leur sens concernant les événements tragiques du mois de novembre 2015. Le retour d'expérience nous apprend qu'un certain nombre d'urgences absolues et relatives ont été prises en charge par des IADE seul(e)s en extra-hospitalier et que nos qualifications ont été activement recherchées.

Les Transports infirmiers inter-hospitaliers (T2IH)

Les TIIH ont été actés de façon réglementaire et se généralisent. Nous ne contestons pas la capacité de nos collègues infirmiers en soins généraux à surveiller un patient intubé, ventilé et « sédaté » en réanimation ou Salle de Surveillance Post-Interventionnelles. La grande différence repose sur la capacité de la gestion en autonomie de cette sédation et des gestes nécessaires qui restent de la pratique courante de l'IADE lors de ses prises en charge. Lors des T2IH le renfort médical n'est pas comparable à celui d'un service de réanimation. Même si ces activités semblent dédiées aux compétences IADE elles ne doivent pas être les seules retenues. En conscience, sur le fond et sur la forme, le choix de publier cet article dans une revue largement diffusée, orientée en priorité sur l'expression scientifique médicale, ne pose t-il pas un problème à ses auteurs ? Comment conclure à l’obsolescence des infirmier(e)s-anesthésistes dans la médecine d’urgence de demain quand on sait tout ce qu’ils/elles continuent d’y apporter quotidiennement en expertise auprès des patients, aux côté des médecins urgentistes, infirmier(e)s et ambulancier(e)s diplômé(e)s d’état ? C’est la synergie des compétences qui est garante de l’efficience de l’ensemble du système, avec comme unique objectif, l’intérêt supérieur des patients au-delà de tout autre.

N'en déplaise à certains médecins urgentistes : nous sommes les infirmier(e)s spécialisé(e)s de leur spécialité médicale et sommes d'ailleurs prêts à renforcer les liens existants et à recréer ceux qui se sont apparemment distendus au fil de l'histoire de l'urgence pré-hospitalière française.

Notes

  1. "Quelle place pour l'infirmier anesthésiste dans la médecine d'urgence de demain ?" F. Braun · P.Y. Gueugniaud · D. Pateron · B. Riou , Ann. Fr. Med. Urgence - SFMU et Lavoisier SAS 2015
  2. "Place de l'infirmier en service mobile d'urgence et de réanimation, perspectives d'avenir", B.Huet SNIA 2014
  3.  Lettre Ouverte à « Samu-Urgences de France » SNIA 4 Novembre 2015
  4. Livre blanc : Organisation de la médecine d’urgence en France, Les propositions de Samu-Urgences de France, 2015
  5. Annexe III de l'arrêté du 23 juillet 2012, Référentiel d'activité infirmier anesthésiste, Définition du métier.
  6. Article R4311-12 et Article R4311-10, 9° a) et b) du Code de la Santé Publique « Les transports sanitaires mentionnés à l'article R. 4311-10 sont réalisés en priorité par l'infirmier ou l'infirmière anesthésiste diplômé d'Etat».
  7. Arrêté du 23 juillet 2012 relatif à la formation conduisant au diplôme d'état d'infirmier anesthésiste NOR:AFSH1229694A
  8. Répertoire des métiers de la santé et de l’autonomie – Fonction publique hospitalière, Ministère de la Santé
  9. Unité d’Enseignement 4 sous-UE 4.1, 4.2 4.3 Référentiel de formation IADE, annexe III de l’arrêté du 23 janvier 2012 (Voir Référence n°7 Pages 89 (61))
  10. Sous-UE 2-4 du référentiel de formation (lien référence n°7)
  11. Arrêté du 31 juillet 2009 relatif au diplôme d’Etat d’infirmier – Annexe III
  12. Voir référence n°7 Arrêté du 23 juillet 2012
  13. Décret 2014-1511 du 15 décembre 2014 relatif aux diplômes de santé conférant le grade master
  14. « Evaluation de la formation conduisant au diplôme d’Etat d’infirmier anesthésiste, en vue de la délivrance du grade de master » - Agence d’évaluation et de la recherché et de l’enseignement supérieur (AERES) – 2012
  15. Livre blanc : Organisation de la médecine d’urgence en France, Les propositions de Samu-Urgences de France, 2015
  16. « Infirmiers Anesthésistes dans les situations de catastrophe »,D ; Janniere, C. Pineau Samu 75 – Journées d'enseignement post-universitaires 2000.

Paris le 5 Janvier 2015 - Les IADE sont aussi les infirmier(e)s spécialisé(e)s de la médecine d'urgence !

Pour le conseil national du SNIA Jean-Marc SERRAT (Président) Syndicat National des Infirmier(e)s-Anesthésistes

Pour le Bureau du CEEIADE Jean-Pierre ANTHONY (Président) Comité d’Entente des Ecoles d’Infirmier(e)s-Anesthésistes Diplômé(e)s d’Etat

Pour le conseil d’administration de l’ANEIA Gérald DELARUE (Président) Association Nationale des Etudiants Infirmiers-Anesthésistes


Source : infirmiers.com