Lorsque la CNAMTS attaque, Convergence infirmière contre-attaque ! Face à la tournure que prennent les négociations conventionnelles concernant les futurs assistants médicaux, le syndicat est monté à nouveau au créneau et a rédigé plusieurs courriers pour scander son désaccord aux présidents des syndicats des médecins, de l'ordre national des infirmiers et à la ministre des Solidarités et de la Santé.
Les négociations conventionnelles ont débuté le 24 janvier dernier à la CNAMTS et l'on sait que pour l'instant, les discussions sont tendues entre les médecins et l'Assurance maladie
. Les syndicats représentatifs des infirmiers libéraux ont également fait savoir leur inquiétude concernant ce nouveau métier et ont récemment crié au scandale quand ils ont eu en main les directives
concernant une modification réglementaire pour étendre le champ d’intervention des aide-soignants au milieu ambulatoire, ainsi que sur la possibilité à se voir déléguer des missions directement par les médecins (aujourd’hui délégation d’intervention par les infirmiers uniquement).
Imaginez alors certains employeurs n’embauchent plus que des AS en lieu et place d’infirmiers dans un souci économique ! C’est une véritable crainte !
Pour garantir la sécurité des soins : du personnel formé, que diable !
Convergence infirmière persiste et signe. Le syndicat a rédigé un courrier adressé aux présidents des syndicats des médecins afin de leur expliquer son point de vue et afin de demander une entrevue avec eux. Dans cette lettre Ghislaine Sicre, (Présidente du syndicat) rappelle que la formation d'aide-soignant repose sur 10 mois de formation contre trois ans d'études et 24 mois dans une structure après le DE pour les infirmiers libéraux. Vous vous doutez bien que le niveau n’est guère le même en termes de compétence, d’approche globale et personnalisée de la personne soignée. Les laisser intervenir sans les directives, la coordination et la surveillance d’un infirmier auraient des conséquences désastreuses pour la prise en charge de nos patients, la qualité et la sécurité de leurs soins
, argumente Ghislaine Sicre. Et le moins que l'on puisse dire c'est que Convergence Infirmière ne mâche pas ses mots quand il s'agit des tutelles : La France et ses gouvernements successifs n’appellent malheureusement pas à augmenter le niveau de qualification mais bien a contrario à niveler par le bas pour diminuer les coûts !! Dès lors que cette profession d’aide-soignant se voit octroyer des nouveaux actes, elle pourrait bien entendu les pratiquer dans n’importe quelle situation : imaginez alors certains employeurs n’embauchent plus que des AS en lieu et place d’infirmiers dans un souci économique ! C’est une véritable crainte !
Pour justifier encore davantage ses propos, le syndicat cite une étude du BMJ portant sur les hôpitaux européens où les résultats montraient clairement que les patients voient leur risque de décès augmenter jusqu’à 20% dans certains services ou établissements dans lesquels les infirmières dûment qualifiées ont été remplacées par du personnel non formé. Corolaire indiscutable de la même étude : les services et établissements qui comptent plus d’infirmières que d'aides-soignantes accusent des taux de mortalité plus faibles, après une intervention.
Cependant, le syndicat affirme comprendre la position des médecins et l'utilité pour eux d'être assistés notamment concernant les tâches administratives incompréhensibles et lourdes.
Mais pourquoi pas plutôt avoir recours à une secrétaire avec quelques prérogatives supplémentaires qui pourrait remplir le rôle recherchée par les médecins ?
Le syndicat propose un dialogue pour trouver un consensus salutaire pour chacune des professions et énonce que les infirmiers peuvent faire gagner du temps aux praticiens, notamment via un nouvel acte de surveillance clinique infirmière pour améliorer le suivi des pathologies chroniques. Cette proposition, véritable avancée du travail en équipe, nous permettrait de faire évoluer nos prises en charge et améliorerait le suivi des patients chroniques en favorisant la qualité !
Convergence Infirmière a également écrit une deuxième lettre ouverte destinée à Patrick Chamboredon, président de l'Ordre nationale Infirmier afin que l'ONI interpelle toutes les composantes de la profession infirmière, de recueillir leurs doléances et de faire le poids auprès du ministère des Solidarités et de la Santé, afin d’avoir des éclaircissements sur les projets de la CNAMTS, et, surtout, de nous prémunir des intentions comme du dessein que nous pressentons, et qui nous inquiètent fortement
. L'Ordre avait d'ailleurs déjà réagi sur ce sujet.
Pour une raison qui nous échappe, nous n’avons jamais eu droit à votre considération.
Madame Buzyn, vos mesures sont-elle un replâtrage des trous ?
Dans un troisième courrier, Convergence Infirmière s'adresse directement à Agnès Buzyn évoquant dès le début un désamour entre le ministère et la profession. Le syndicat attaque d'emblée les décisions de la ministre affirmant que ce sont de fausses bonnes idées
et que cette mesure de création d'assistants médicaux ressemble à un véritable "replâtrage des trous" dans l’accès aux soins et solution d’urgence d’un monde médical carencé.
Cette lettre souligne d'ailleurs que si la ministre plaide souvent en faveur de la coordination et de la coopération entre les professionnels de santé, sa politique n'arrête pas de monter les professions les unes contre les autres en organisant la discorde ; la profession d’infirmière faisant toujours les frais des cartes que vous tenez en mains
. En effet, les infirmiers reste les grands oubliés car le plan de transformation du système de santé ne prévoit rien pour eux sinon quelques mesurettes
. En ce qui concerne la convention nationale des infirmières, les négociations ont, certes, repris,
mais sans ambition, sans avancée, sans reconnaissance, sans valorisation.
Les infirmiers seraient pourtant, selon le syndicat, les mieux placés pour faire gagner du temps médical précieux. Une collaboration bien menée avec un infirmier doté d'un bilan de soins pourrait épargner bon nombre de visites au médecin. Mais vous préférez budgétiser 200 millions d’euros pour 4 000 assistants médicaux, plutôt que de mettre en place le BSI, en gestation depuis 2015, et qui ne verra sans doute pas le jour… ou alors très partiellement. Madame la Ministre, il s’agit de notre rôle propre et on ne touche pas au rôle propre de l’infirmier!
Le courrier prend exemple sur les Pays-Bas qui serait numéro 1 en matière de système de soins – alors que la France n’est que 11ème
où des équipes de soins de proximité composées d'infirmiers jouant un rôle majeur en terme de santé publique
.
Pourtant, la profession d’infirmière serait heureuse de se voir confier des rôles et des missions qui sont déjà pleinement dans leurs compétences. Les CPTS
et les Equipes de soins primaires (ESP) dont vous voulez inonder la France devraient être les espaces au sein desquelles cette efficacité devrait s’exprimer
. Cependant, si les infirmiers répondent présent ils ne le feront pas non plus à n’importe quel prix comme les tarifs qui nous sont proposés dans le dispositif conventionnel et sur lesquels vous pouvez intervenir à tout moment.
Si l'harangue à la ministre pourrait rester sans réponse, on ignore quelle sera celle des syndicats médicaux, mais l'on sait déjà que la création de ce nouveau métier telle qu'envisagée par la CNAMTS ne les réjouit guère plus que les infirmiers.
Roxane Curtet Journaliste infirmiers.com roxane.curtet@infirmiers.com @roxane0706
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