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Le monde infirmier en marche au congrès 2012 du SIDIIEF

Publié le 18/07/2012


« Des pratiques cliniques novatrices : optimiser les compétences professionnelles », tel était le titre plutôt ambitieux et néanmoins prometteur du 5e Congrès mondial des infirmières et infirmiers francophones à l’initiative du SIDIIEF qui s’est tenu à Genève du 20 au 24 mai dernier. Quelques 1.800 professionnels infirmiers se sont ainsi retrouvés pour échanger et mener des réflexions communes dans le but de faire avancer les pratiques soignantes. Retour sur cet événement.

Environ 475 communications orales, une centaine de communications par affiches, des symposiums internationaux, des conférences et des ateliers thématiques... lors du Congrès du SIDIIEF, tous les trois ans, il n’y a guère le temps de s’ennuyer... La préoccupation majeure est plutôt de savoir comment ne rien rater, tant tout est intéressant et de haut niveau. Pour cette édition 2012, les enjeux du système de santé, l’avenir de la formation initiale infirmière et les perspectives de développement pour la profession ont alimenté les débats.

Apporter une plus-value à la profession

Comme l’a souligné Gyslaine Desrosiers, la très charismatique présidente du SIDIIEF, par ailleurs présidente de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ), « l’occasion nous est donnée d’échanger sur les défis des soins de santé et sur l’évolution de la profession. Le thème du congrès « Les pratiques cliniques novatrices : optimiser les compétences professionnelles » constitue un enjeu au cœur des systèmes de santé de tous les pays. Par rapport à la chronicisation des maladies, au développement rapide des connaissances et des technologies, à la pénurie de professionnels qualifiés, il devient impératif de renouveler les pratiques et de faire évoluer la profession tant par la recherche en sciences infirmières que par des complémentarités interprofessionnelles revues et corrigées. L’importance d’assurer des soins de santé accessibles, de qualité et sécuritaires comporte des exigences de renouvellement des savoir-faire et aussi du management. »

Concrètement l’ensemble des communications est venu apporter une plus-value à la pratique soignante. Quant aux différentes approches, aux regards conceptuels multiples, aux supports variés des intervenants, ils ont nourri la culture soignante.
Dans les séances parallèles, environ 60 infirmières ou cadres de santé français ont témoigné de leurs pratiques. Les thématiques tournant autour de la douleur, des parcours de vie en formation, de la coopération entre les professionnels de santé, de la carte conceptuelle, du portfolio, de l’esprit critique, de l’épanouissement professionnel… ont enrichi les productions présentées par les autres soignants francophones. C’est ainsi que cinq communications françaises par affiche ont présenté des résultats concrets de recherche infirmière dans différents domaines comme : l’éducation thérapeutique, la gestion et l’organisation des soins, la formation avec le portfolio ou encore l’infirmière de 2012. Si toutes ces communications ont aidé à la construction de la pensée soignante, elles ont surtout permis une interaction et un échange entre les congressistes. Soulignons également la présence de nombreux étudiants en soins infirmiers de différents pays, dont des étudiants français, qui ont communiqué oralement et par affiches… Nul doute en la matière, la relève est assurée !

Déclaration en faveur de la formation universitaire

Lors de son assemblée générale, les membres du SIDIIEF ont rédigé et validé une « déclaration en faveur de la formation universitaire pour les infirmières et infirmiers de l’espace francophone » demandant : « l’intégration de leur formation à l’enseignement supérieur aux trois cycles d’études, Licence/Master/Doctorat (LMD) ». Cette initiative a reçu différents appuis en faveur de cette déclaration comme, par exemple :

Il en est de même pour l’ensemble des pays de la francophonie. La déclaration est en ligne sur le site du SIDIIEF.

Des communications françaises remarquées

Lors du symposium international sur la recherche en sciences infirmières : « un levier pour le renouvellement des pratiques », Chantal Eymard, diplômée d'État en soins infirmiers et docteur en Sciences de l'éducation, a présenté l’état des lieux de la recherche infirmière en France. Au côté de ses consoeurs - Claire Zablit, doyen de la Faculté des sciences infirmières de l’Université Saint-Joseph, présidente de l'Ordre national infirmier du Liban, de Sylvie Cossette, Ph.D., infirmière, professeure agrégée, Faculté des sciences infirmières, Université de Montreal, et d’Anne Sylvie Ramelet, Ph. D. Maître d'enseignement et de recherche à l’Institut universitaire de formation en recherche et en soins de Lausanne, en Suisse - elle a souligné le lourd retard dont souffraient les infirmières françaises en la matière. Les raisons que Chantal Eymard a mis en évidence sont nombreuses :

  • il n’y a pas de discipline en sciences infirmières, donc pas de laboratoire spécifique, ce qui entraîne un éparpillement des travaux dans différentes disciplines universitaires ;
  • il existe peu de publication en recherche infirmière et la production internationale est rare ;
  • il y a dissociation entre la recherche (à l’hôpital) et durant la formation (Ifsi) ;
  • Il y a à ce jour 28 docteurs et 26 doctorants de la filière infirmière en France.

Chantal Eymard a donc rappelé qu’il est urgent que la France réagisse, même si elle est consciente que la route sera encore longue, soulignant également l’importance de communiquer en transmettant les pratiques soignantes.

Philippe Tisserand, président de la Fédération nationale des infirmiers (FNI),a animé de son côté un symposium sur « Les nouvelles collaborations des professionnels de la santé : une optique thérapeutique optimale pour le patient ». Des représentants du Canada, de la France avec Danièle Cadet, Directrice des Soins CH Eaubonne (95), de la Suisse et du Nigeria se sont exprimés « sur la complémentarité et la solidarité des professionnels de la santé ». Il a été largement exposé la collaboration entre l’infirmière et le médecin dans les différents pays dans un souci d’optimisation des compétences professionnelles.

Danièle Cadet a souligné l’importance de définir de nouvelles collaborations entre les professionnels de la santé, tissant un lien avec la loi HPST (article 5) et interrogeant la manière d’optimiser l’optique thérapeutique proposée au patient. Précisant « qu’il ne faut pas multiplier les intervenants auprès des patients et plutôt miser sur le partenariat les uns avec les autres », elle a identifié 4 piliers indispensables pour la mise en œuvre de cette démarche à savoir : les politiques des ressources humaines, la création des métiers intermédiaires, un système rigoureux de la formation, une intégration de la formation à un niveau supérieur. Elle a également notifié des axes de propositions comme par exemple :

  • un programme national dans un système sécurisé ;
  • une tension entre offre et demande de soin (notamment en chirurgie, en oncologie…) ;
  • un cadre garant de la responsabilité ;
  • la création de masters professionnels.

Le but étant de favoriser la mise en commun des compétences en vue d’une pratique collaborative en santé qui favorisera un esprit de pluridisciplinarité. Cela suppose de redéfinir les métiers dans le but de la sécurité et de la qualité des soins, ce qui, pour Danièle Cadet impose« un réel changement de paradigme » et une optimisation sur quatre axes : mobiliser, sensibiliser, former et collaborer.

Lors du débat, Danièle Cadet a été longuement interrogé sur le rapport Hénart/Berland/Cadet. Les différents soignants de la francophonie ont en effet vivement contesté ce rapport, mettant en garde la France sur les risques d’une telle position, soulignant qu’il y a aussi une pénurie médicale dans les autres pays et que les infirmières ont su garder leur champ de compétences propres. Les médecins et les infirmières présents ont affirmé la nécessité de travailler l’axe de la collaboration et de la coordination pluridisciplinaire pour éviter, ou limiter, les glissements de tâches.

Pour conclure

Une belle ambiance a régné pendant ses cinq jours de congrès à Genève. Sans nul doute, la profession infirmière va de l’avant. Elle a envie de partager la richesse de ses recherches pour aider à la construction du monde infirmier de demain. Il reste maintenant à faire avancer les pratiques, à produire des écrits, à communiquer et à remplir nos valises du fruit de nos réflexion ou de nos recherches pour les partager dans trois ans, du 31 mai au 4 juin 2015, à Montréal, au Québec, lors du 6ème Congrès triennal des infirmières et infirmiers francophones.

Isabelle BAYLE
Cadre infirmier formateur Ifsi Saverne
isabelle.bayle@gmail.com


Source : infirmiers.com