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AU COEUR DU METIER

La Vie jusqu'à la Fin

Publié le 12/10/2018
Crédit photo Sylvie Legoupi

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La photographe Sylvie Legoupi montre, une fois encore, ce qui nous est rarement donné à voir avec autant de justesse, de dignité et force de détails : la confrontation à la mort de l'autre et l'engagement des équipes soignantes de soins palliatifs à l'accompagner. Sans pathos ni voyeurisme ses diaporamas audio-photographiques nous touchent au plus profond. Un travail tout en finesse à redécouvrir à l'occasion de la Journée Mondiale des Soins Palliatifs le 13 octobre.

13 octobre : une Journée d'engagement pour une fin de vie digne

La Journée Mondiale des Soins Palliatifs est un jour d'action pour célébrer et soutenir l’accompagnement et les soins palliatifs à travers le monde. Le thème pour cette Journée mondiale qui se déroulera le 13 octobre 2018 est "Palliative Care – Because I Matter ! Soins Palliatifs parce que je compte !" A l’occasion de cette Journée, la Société Française d'Accompagnement et de Soins Palliatifs (SFAP) a organisé le 9 octobre son premier Colloque International anglophone - avec traduction simultanée -, sous le patronage de d'Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé. En effet, selon la SFAP, les états généraux de la bioéthique ont récemment confirmé que la fin de vie était une question sociale débattue dans la sphère publique. Au coeur de ce processus de construction collective, les soins palliatifs ont un rôle majeur à jouer de par leur expertise, leur histoire et leur souci d’innovation. Répondre aux besoins des patients et de leurs proches exige de faire évoluer aussi bien les pratiques cliniques que la formation, la recherche ou encore le bénévolat. Pour cela, il semble essentiel de regarder au-delà de nos frontières et de favoriser les échanges internationaux.

A l'occasion de cette journée mondiale, les sociétés savantes s'unissent pour le développement des soins palliatifs en France. Seul un financement transversal au sein de la médecine, et pérenne, des soibs palliatifs dans le cadre d'un plan gouvernemental, permettra de les développer suffisamment en quantité et en qualité pour répondre aux attentes des Français affirment-elles dans un communiqué.

Rappelons également l'engagement et l'action du ministère pour garantir aux malades une fin de vie digne. Alors qu’entre 150 000 et 200 000 personnes bénéficient chaque année de soins palliatifs, 50% des mesures du plan national 2015-18 pour l’accompagnement en fin de vie sont déjà réalisées ou en passe de l’être. D’autre part, des recommandations ont été produites pour les professionnels de santé par la HAS et l’agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM) pour faciliter le maintien à domicile des patients en fin de vie. À l'occasion de son audition par la commission des affaires sociales du Sénat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2019, Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, s'est exprimée sur la politique relative aux soins palliatifs. Elle fait part de son souhait de relancer le dynamisme de sa politique sur ce sujet. Nous allons travailler avec nos équipes sur un plan, précise-t-elle. La ministre insiste par ailleurs sur les outils destinés aux patients dans les situations de fin de vie. Elle souhaite ainsi que les dispositions de la loi Claeys-Leonetti de 2016 soient mieux connues, notamment les directives anticipées.

Enfin, cette journée est aussi une opportunité de s’informer et de s’exprimer sur ce que l’on souhaiterait si on était confronté à cette situation. Des campagnes de communication ont déjà été lancées pour sensibiliser le grand public comme les professionnels sur le sujet. Cette année encore, de nouvelles actions seront initiées à cet effet. Dans ce cadre, le Centre national des Soins palliatifs et de la Fin de Vie dévoilera le 15 octobre ses nouvelles actions d'information vers le grand public "La fin de vie si on en parlait" et les professionnels de santé. En effet, personne n’aime y penser et pourtant tous les Français ont des droits en matière de fin de vie, qu’ils soient en capacité de s’exprimer eux-mêmes ou dans l’incapacité de le faire et quel que soit leur âge. 40% des Français âgés de plus de 50 ans ignorent l’existence d’une loi et 81% ne savent pas précisément ce que sont les directives anticipées.

 Sylvie Legoupi est une photographe engagée. Riche de son éthique humaniste, elle valorise et sacralise des moments de vie professionnelle dans des services de soins « sensibles ». La douleur, les soins palliatifs, la fin de vie, la relation soignant/soigné… sont autant de sujets intimistes qui retiennent son attention et qu'elle traite d'une façon que l'on pourrait qualifier de « militante ». Nous l'avions rencontré en 2012 à l'occasion de la présentation de son travail photographique aux CHU de Rennes, de Nantes ou de Saint-Malo dans les services de néonatologie, soins palliatifs et hématologie ; des endroits où la vie et la mort se côtoient, ou naître et mourir s'entrecroisent dans le respect de la continuité de la vie.

Prendre le temps de faire les choses, l'attention, la douceur, l'écoute…  Le plus difficile c'est la souffrance, la souffrance dans le regard de ce patient qui veut dire plein de choses mais que l'on ne traduit pas : une forme d'impuissance à ne pas comprendre mais être là…

En mai 2016, elle a poursuivi cette recherche en réalisant un reportage « audio photographique » sur la fin de vie dans le service de pneumologie du CHU de Rennes. Pour Sylvie Legoupi, la finalité de ce travail intitulé « La Vie jusqu'à la fin » était claire, approfondir cette réflexion sur la fin de vie en associant deux regards professionnels, le mien en tant que photographe et celui des soignants. Il s'agissait donc de recueillir sous forme d’entretiens leurs ressentis et tenter ensuite de m’en imprégner et de photographier au plus juste afin de  les mettre en images.

Quatre diaporamas de 6 à 7 minutes en découlent. C'est très beau, investi, engagé et bien évidemment l'humanité qui s'en détache touche au plus profond celui qui les regarde.

Dans les soins palliatifs, il n'y a plus le thérapeutique, il ne reste que le presque rien, mais qui est le presque tout du prendre soin.

Sylvie Legoupi le souligne, dans la chaîne des soins continus, après les soins curatifs, les soins palliatifs exigent une approche particulière où l’écoute et la présence attentive de chacun requièrent une forme de disponibilité qui ne saurait exclure la compassion. C’est une tâche difficile mais où la part retrouvée de l’Humain enrichit celle ou celui qui l’apporte. Aujourd’hui, une évolution des mentalités s’impose encore dans notre pays pour faire admettre l’idée que la mort est un passage inéluctable et qu’elle doit être entourée de soins spécifiques comme l’est la naissance.

Même quand on un cancer on a le droit de vivre, d'autant quand on a une maladie grave qui engage le pronostic vital.

Les diaporamas audio-photographiques de la photographe en témoignent. Ils témoignent de la vie, de la vie qui continue encore et toujours, quelles que soient les circonstances de dureté imposées par la maladie.  Les images défilent, montrant des soignants qui s'agitent, qui s'interpellent, qui discutent, sérieux ou souriants, ancrés dans la vie d'un service de soins actif et dynamique, même s'il s'agit de traiter des patients en souffrance et /ou en fin de vie. Le son, bien présent, atteste de cette vie, car rien ne s'arrête. La journée est ponctuée de soins, parfois techniques, parfois de confort, mais toujours riches d'un relationnel qui fait toute la différence. Je suis là pour soigner les gens, nous dit un médecin pneumologue, les soigner et le plus souvent ne pas les guérir. La culture des soins palliatifs est présente dès le début. Médecin, soignant, je suis un être humain confronté à la souffrance de son semblable. Cela passe par l'attention, l'écoute, la prise en compte de ses besoins, même ceux qui nous paraissent les plus futiles… Même quand on un cancer on a le droit de vivre, d'autant quand on a une maladie grave qui engage le pronostic vital. Mon état d'esprit n'est pas de soigner une maladie mais une personne malade. Et une infirmière de renchérir pour bien saisir les petits détails, tout ce qui rattache le patient à la vie, il faut que le soignant soit très disponible et qu'il vive vraiment dans un moment de partage et d'abandon le moment présent. Cette intensité du moment réinjecte de la vie, de la vie jusqu'à la fin.

On prend du temps quand on est auprès du patient, on se pose avec lui, on profite du temps qui nous est donné...

Le travail de Sylvie Legoupi montre ce qui nous est rarement donné à voir avec autant de justesse, et force de détails, la confrontation à la mort de l'autre, cet autre qui nous ressemble, cet autre qui vit ses derniers moments avec ses propres ressources, apaisé ou angoissé, accompagné des siens ou isolé socialement. Le soignant, inexorablement ramené à sa propre finitude, nourrit sa pratique de ses valeurs soignantes, ses valeurs d'empathie et d'humanisme, explore avec les patients en fin de vie de nouveaux chemins, des chemins de traverse où chaque seconde à de l'importance, où le plaisir de la rencontre et du partage domine. Dans les moments difficiles, quand la douleur physique et morale est là, quand la petite flamme vacille, soignants, patients, familles, bénévoles peuvent s'appuyer les uns les autres, dans une culture commune qu'ils ont travaillé au fil du temps. L'improvisation - car oui, il faut savoir « improviser » quand les événements se précipitent et ils ne sont jamais identiques - reste maîtrisée car la formation des soignants et leur culture palliative enrichie sans cesse de leur quotidien l'autorise.

Au fil des images et des témoignages, l'intimité avec la mort se précise. Les gestes, les paroles et les attentions bienveillantes de chacun, l'engagement des équipes soignantes, témoignent de l'accompagnement fait au plus près et au plus juste des patients en fin de vie. Jusqu'au bout accompagner la vie, avec dignité, oui c'est bien ce que la photographe a voulu restituer et son travail, sans pathos ni voyeurisme, est en ce sens particulièrement réussi et convaincant.

Accédez aux diaporamas audio-photographiques de Sylvie Legoupi

Soins palliatifs - Repères

  • Les soins palliatifs améliorent la qualité de vie des patients et de leur famille confrontés aux problèmes associés à des maladies potentiellement mortelles, qu’ils soient d’ordre physique, psychosocial ou spirituel.
  • On estime que, chaque année, 40 millions de personnes ont besoin de soins palliatifs et que 78% d’entre elles vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire.
  • À l’échelle mondiale, environ 14% seulement des personnes ayant besoin de soins palliatifs en bénéficient actuellement.
  • Des réglementations trop restrictives pour la morphine et d’autres médicaments essentiels sous contrôle empêchent l’accès à un soulagement suffisant de la douleur et aux soins palliatifs.
  • Le manque de formation et les connaissances insuffisantes des soins palliatifs chez les professionnels de santé sont un obstacle majeur à l’amélioration de l’accès à ces soins.
  • À l’échelle mondiale, les besoins de soins palliatifs continueront d’augmenter, à cause du fardeau croissant des maladies non transmissibles et du vieillissement des populations.
  • L’instauration précoce des soins palliatifs réduit le nombre d’hospitalisations superflues et le recours aux services de santé.

Soins palliatifs, principaux faits, février 2018, Organisation mondiale de la santé

Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern


Source : infirmiers.com