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RECHERCHE

La recherche en soins, « une nécessité pour des soins justes et conformes »

Publié le 16/01/2014

Après les CHU de Limoges et de Bordeaux, c'était à celui de Toulouse qu'est revenue l'organisation d'un 3e colloque interrégional Grand Sud-Ouest de recherche paramédicale le 29 novembre 2013. Retour sur les temps forts de cette journée dont le fil conducteur s’est attelé à démontrer combien la recherche en soins était "une nécessité pour des soins justes et conformes". 

Premier bilan d’un cycle de 3 ans

La visée de la recherche en soins : savoir et agir afin de garantir des soins sûrs, appropriés, conformes et au moindre coût…

Les années passent mais le trio de cadres supérieurs de santé qui œuvre au développement de la recherche paramédicale dans le Sud-Ouest est toujours aussi actif qu'à la première heure de leur collaboration. Depuis trois ans déjà, Pascale Beloni à Limoges, Valérie Berger à Bordeaux et Nadia Peoc'h à Toulouse n'ont en effet pas ménagé leur peine pour initier et valoriser la recherche en soins sous tous ses aspects. Leur bilan en témoigne : communications régionales, nationales et internationales, recherches multicentriques entre les trois CHU et avec des patients inclus sur les trois sites, mise en place de formations (initiation, DU, master), publications et des échanges d'expertises, présence au sein du jury national de sélection du Programme hospitalier de recherche infirmière et paramédicale (PHRIP), implication dans le Groupement interrégional de recherche clinique et d’innovation Sud-Ouest Outre-Mer (GIRCI-SOOM), propositions de formations et diffusion d’appels à projets, ainsi qu’un partenariat avec le département de sciences infirmières de l’Ecole des hautes études en santé publique (EHESP).

La recherche est bel et bien un travail de longue haleine, un cheminement intérieur, et rarement un long fleuve tranquille !

Retour sur des projets de recherche

Comme pour les deux manifestations qui ont précédé, ce 3e colloque interrégional, qui a réuni près de 300 participants sur le site de l’Hôtel-Dieu St-Jacques à Toulouse, a été l’occasion de présenter plusieurs travaux de recherche, notamment celui mené par Ophélie Kaczanowski, infirmière puéricultrice en néonatologie HME au CHU de Limoges, Intitulé « Brazmaman », ce PHRIP 20131 porte sur une étude de l’impact de la passation de l’échelle de Brazelton2 sur la confiance des mères à l’égard de leur nouveau-né prématuré à l’approche du retour à domicile. Les retombées attendues sont multiples : augmenter la confiance de la mère et améliorer la relation mère-enfant, diminuer les recours au système de santé, faciliter le retour à domicile, proposer des recommandations de bonnes pratiques en intégrant dans la pratique courante l’utilisation de l’échelle de Brazelton par des infirmières habilitées prenant en charge des prématurés arrivés à terme et leurs parents. De la formation à la passation de l’échelle, en passant par une revue de la littérature jusqu’à la rédaction du protocole de recherche, pas moins de trois ans ont été nécessaires.

La recherche est bel et bien un travail de longue haleine, un cheminement intérieur, et rarement un long fleuve tranquille ! Jean-Christophe Foissac, infirmier anesthésiste, et Anne Senechal, infirmière au CHU de Toulouse, en ont ainsi témoigné, tous deux à l’initiative de l’étude « Anxydol » portant sur la validation et la pertinence de l’utilisation de l’échelle visuelle analogique d’anxiété (EVA-A) dans la cadre de la prise en charge de la douleur par une équipe mobile douleur aiguë. Les objectifs de leur recherche sont d’abord de mesurer la validité et la pertinence de l’EVA-A pour déterminer la composante anxiogène de la douleur, puis de mesurer l’impact d’une consultation douleur « in situ » sur la composante anxiogène de la douleur, ainsi que l’utilité de l’EVA-A dans les champs disciplinaires des soins infirmiers et de la pratique clinique. Mais ce PHRIP 2012 a reçu un avis défavorable du Comité de protection des personnes (CPP) local au motif qu’il s’agissait d’un programme hospitalier de recherche clinique (PHRC), ont précisé ces derniers. Un avis que ne partage pas du tout Nadia Peoc’h qui, en tant que chargée de promotion de la recherche en soins et santé au sein de la direction des soins des Hôpitaux de Toulouse, a pris la parole pour affirmer qu’il s’agissait bien d’un protocole de recherche qui s’appuie sur une approche novatrice utilisée fréquemment par nos homologues canadiennes en sciences infirmières reposant sur un devis mixte simultané avec triangulation (soins infirmiers/sciences humaines), d’une recherche à visée compréhensive au lit du malade (plus-value grâce aux entretiens cliniques). Reste qu’aujourd’hui les porteurs de ce projet sont contraints de le reformuler méthodologiquement et de le représenter le plus rapidement possible pour obtenir en ce début 2014 l’inclusion des patients.

Sans se passer d’un cadre conceptuel solide, tout projet de recherche en soins doit être ancré dans les pratiques du terrain

De la recherche pour quelle visée ?

La recherche en soins s’inscrit dans la « Flèche du temps » pour reprendre l’expression de Jankélévitch, au temps, permet l’ouverture des possibles, s’ouvre à la pluralité des mondes, permet à tout soignant de se révéler l’auteur de sa pensée, invite à poser sur ses pratiques professionnelles un regard empreint de curiosité et d’esprit critique, accepte l’errance du cheminement, a précisé Nadia Peoc’h. Mais le soignant-chercheur ne doit pas oublier la visée de la recherche : savoir et agir afin de garantir des soins sûrs, appropriés, conformes et au moindre coût… Au final, une amélioration des pratiques de soins au bénéfice des patients, raison pour laquelle, sans se passer d’un cadre conceptuel solide, tout projet de recherche en soins doit être ancré dans les pratiques du terrain.

Soutien institutionnel et des DRCI

Toutefois, il ne peut y avoir de recherche en soins sans le soutien des directions générales et surtout celui des délégations de la recherche clinique et de l'innovation (DRCI). Les PHRIP sont une véritable aubaine, cela fédère les énergies et il y a un enjeu managérial très fort. La recherche paramédicale, c’est pratiquement que du bonheur. Cela libère les énergies et donne de la créativité et de l’innovation, a pour sa part indiqué Luc Durand, coordonnateur général des soins au CHU de Bordeaux3. Certes, le PHRIP reste un guichet très sélectif puisque le taux de réussite cette année est de 15 %4. Mais comme l’a souligné en préambule Odile Sechoy, directrice de la DRCI du CHU de Toulouse, outre les publications et cette sélection, la valorisation des travaux de recherche peut aussi s’effectuer par la propriété intellectuelle (dépôt de brevets).

Alors si l’envie vous taraude, lancez-vous et rendez-vous à Limoges en septembre prochain5 pour un nouveau congrès interrégional recherche du Grand Sud-Ouest qui se déroulera désormais sur une journée et demie au lieu d'une, preuve s’il en faut que la communauté soignante porte de plus en plus d'intérêt à la recherche paramédicale.

Notes

  1. La Direction générale de l’offre de soins (DGOS) a dévoilé le 20 décembre dernier les 20 projets retenus au PHRIP 2013.
  2. Appelée Newborn Behavoral Assessment Scale (NBAS), l’échelle de Brazelton est un examen clinique dont le but est de mettre en évidence les compétences du nouveau-né à terme jusqu’à l’âge de 2 mois ou jusqu’à 48 semaines après la date de la conception pour des nouveau-nés prématurés.
  3. A noter, le n°8 (déc. 2013) de la revue Recherches, revue annuelle de la recherche clinique du CHU de Bordeaux, est entièrement dédié à la recherche paramédicale. Pour en savoir plus : www.chu-bordeaux.fr
  4. Communiqué de la DGOS du 23 décembre 2013 : « Recherche et innovation : la DGOS publie les résultats de ses appels à projets »
  5. 25-26 septembre 2014 sur le thème "La recherche en soins, de la formation initiale à son application", avant Bordeaux en 2015 et Toulouse en 2016.

Valérie HEDEF- CAPELLE


Source : infirmiers.com