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Hospitalisation à domicile : vers une accélération du développement ?

Publié le 26/01/2016
maison stéthoscope

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La Cour des comptes plaide de nouveau pour lever les freins au développement de l'hospitalisation à domicile (HAD), notamment en regroupant les petites structures et en accélérant la réforme de la tarification, dans une communication (PDF) faite aux députés le 20 janvier 2016.

La Cour des comptes encourage la croissance de l'hospitalisation à domicile.

La Cour a été saisie par la commission des affaires sociales et la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) de l'Assemblée nationale. Elles lui ont demandé d'actualiser un chapitre de son rapport annuel sur la sécurité sociale de 2013 consacré à l'HAD. Alors qu'en 2013 l'institution pointait un défaut de pilotage par les pouvoirs publics, elle constate désormais qu' une stratégie d'ensemble a été définie par la circulaire du 4 décembre 2013. Parmi ses objectifs figure le doublement d'ici à 2018 de la proportion de séjours hospitaliers réalisés en HAD. Mais les mesures prises depuis n'ont pas été proportionnées à l'objectif affiché et n'ont pas été suffisantes pour faire de la HAD une alternative à l'hospitalisation conventionnelle pleinement intégrée dans les parcours de soins, estiment les auteurs. Après avoir progressé de 7,7% en 2012, le nombre de journées d'HAD a crû moins vite en 2013 (+4,7%) et 2014 (+1,9%, à 4,4 millions de journées pour 106.000 patients). La hausse est très variable suivant les régions. Sur 2012-14, elle a dépassé la moyenne nationale (entre +13% et +34 %) en Languedoc-Roussillon, Champagne-Ardenne, Bretagne et Bourgogne, mais elle a ralenti en Basse-Normandie et en Ile-de-France. Une diminution a même eu lieu en Haute-Normandie et en Alsace.

Ces structures d’HAD mobilisent du personnel salarié ou des professionnels libéraux et s’appuient à cet effet sur une équipe de coordination pluridisciplinaire (infirmières, rééducateurs, assistante sociale, psychologue, diététicienne…) et médicalisée, avec en particulier la présence d’un médecin coordonnateur. » Rapport Cour des Comptes

La Cour constate que la prescription d'HAD par les médecins libéraux comme hospitaliers reste très limitée et que son potentiel de développement dans les établissements médico-sociaux et dans certaines indications comme la chimiothérapie reste sous-exploité. L'information des patients et de leurs familles est peu développée. Les magistrats font sept recommandations, reformulant d'abord les trois faites en 2013 :

  • Mener à son terme l'élaboration des référentiels d'activité de l'HAD. En décembre 2015, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Marisol Touraine, a rappelé avoir demandé à la Haute autorité de santé (HAS) de produire rapidement des indications pour l'admission en HAD, rappelle-t-on.
  • Réaliser des évaluations médico-économiques de l'HAD par rapport aux prises en charge hospitalières conventionnelles et à différents autres types de prise en charge extrahospitalière en ville.
  • Mettre en oeuvre la réforme de la tarification de l'HAD. Cette modernisation indispensable, attendue depuis plusieurs années, sans cesse retardée et désormais prévue pour 2019-20, doit être notablement accélérée, quitte à apporter des inflexions de méthode au processus suivi, argue la Cour. Elle propose de mener dans les meilleurs délais l'étude nationale des coûts (ENC) en s'appuyant en tant que de besoin sur des évaluations à dire d'experts.

Les patients pris en charge

Près de 60 % des journées d’hospitalisation concernent des patients âgés de plus de 65 ans Les patients de plus de 80 ans représentaient en 2014 23 % du total et 29 % des journées d’hospitalisation, avec des durées moyennes de séjour de 40,4 jours, contre 25,5 jours pour l’ensemble des patients. La prise en charge en HAD concerne en majorité (57 %) des patients nécessitant des soins lourds, la part des patients à l’état de santé le plus fragile progressant en particulier fortement en 2013 (+ 8,5 %) et 2014 (+ 15 ,6 %). Les deux tiers des patients proviennent d’un établissement de médecine chirurgie obstétrique (MCO) ou de soins de suite et de réadaptation (SSR) et 30 % seulement de leur domicile. Pour 57 % d’entre eux la sortie s’est faite vers le domicile, pour 33 % vers un établissement MCO ou SSR, tandis que 10 % sont décédés.

Les magistrats de la rue Cambon formulent aussi quatre nouvelles préconisations :

  • Expérimenter de nouveaux modes de financement de manière à inciter au recours à l'HAD à la sortie d'une hospitalisation conventionnelle ou pour éviter une telle hospitalisation. Marisol Touraine a annoncé en décembre 2015 le lancement au 1er mars d' expériences de coopération entre établissements pour favoriser des sorties précoces de chirurgie à l'aide de l'HAD, note-t-on.
  • Recomposer fortement l'offre de soins en HAD par regroupement des petites structures. Certaines s'avèrent trop faibles pour prendre en charge des situations qui requièrent intensité, complexité et technicité des soins avec le même impératif de qualité, de sécurité et de continuité qu'en hospitalisation conventionnelle, estime-t-elle.
  • Simplifier le régime d'autorisation et assouplir la répartition des missions entre médecin traitant, médecin coordonnateur d'HAD et le cas échéant médecin coordonnateur d'Ehpad (établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes), pour faciliter notamment l'ajustement des prescriptions à l'évolution de l'état de santé des patients
  • Faciliter par un cadre réglementaire adapté les coopérations entre services de soins à domicile (Ssiad) et HAD, pour permettre la prise en charge conjointe de certaines situations. Il s'agit d'une demande de plusieurs fédérations, rappelle-t-on (cf APM NC5NOJTEY). En décembre, Marisol Touraine avait indiqué que des travaux à ce sujet étaient engagés et devraient aboutir "dans les mois qui viennent".

La chimiothérapie est passée de 1,7 % des journées en 2012 à 2,3 % en 2014, soit une progression de + 21 % en nombre de journées. Pour autant, cette activité reste encore marginale par rapport à l’hospitalisation de jour : moins de 1 % du total des journées de chimiothérapies se font en HAD. » Rapport Cour des Comptes

La Fnehad en ligne avec la cour

La présidente de la Fédération nationale des établissements d'hospitalisation à domicile (Fnehad), Elisabeth Hubert, interrogée par l'APM le 21 janvier 2016, a dit accueillir plutôt bien ce nouveau rapport favorable à l'HAD. S'agissant des évaluations médico-économiques, elle a rapporté que des travaux préparatoires avaient commencé avec la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnamts). Il faut encore définir précisément quelles données seront étudiées dans ce cadre, ce qui est complexe car il faut prendre en compte les hospitalisations conventionnelles évitées ou non, le coût des médicaments, les dépassements d'honoraires, etc., a-t-elle expliqué. Elle a rappelé que la Fnehad est demandeuse de référentiels d'activité de la HAS, et est consciente de la nécessité pour les structures d'HAD d'atteindre une taille suffisante, en particulier pour répondre aux critères de certification et être à l'équilibre financier.

Elisabeth Hubert s'est aussi exprimée le 21 janvier lors d'un colloque de la Fédération nationale des associations de directeurs d'établissements et services pour personnes âgées (Fnadepa) à Paris. La part des séjours d'HAD effectués en établissements sociaux et médico-sociaux n'a été que de 4% en 2014, a-t-elle observé. Là encore, on constate de très grandes variations entre les régions. Selon des données de l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH) reprises dans le dernier rapport annuel de la Fnehad, ce taux oscille, pour la métropole, entre 10,5% en Provence-Alpes-Côte-d'Azur (Paca) et 1,3% en Ile-de-France. Un aspect "cocasse" est que le taux de conventions signées par les structures d'HAD avec les établissements pour personnes âgées de leur territoire atteint "facilement" 60%, 70%, 90% suivant les lieux. Autrement dit, beaucoup de conventions ne vivent pas. Elisabeth Hubert a cité plusieurs explications, comme la complexité de la réglementation (notamment la lourdeur du dossier d'admission, peu compatible avec des demandes urgentes) ou le fait que tous les modes de prise en charge de l'HAD ne soient pas autorisés dans le médico-social. Il arrive que des Ehpad contactent l'HAD pour être suppléés sur des traitements qu'ils ont du mal à assumer (médicament coûteux par exemple) mais qui ne relèvent pas non plus de l'HAD. Celle-ci refuse alors la prise en charge, ce qui ne conduit pas à une grande compréhension respective de nos métiers, a glissé Elisabeth Hubert. Parfois, les équipes d'Ehpad ont des réticences à recourir à l'HAD parce que l'hospitalisation conventionnelle semble plus simple à mettre en oeuvre, ou par crainte d'être dépossédées de leurs compétences, de leur savoir-faire.

L’information des patients sur la possibilité d’être pris en charge en HAD, soit à partir de leur domicile, soit en vue de raccourcir un séjour hospitalier, reste très imparfaitement assurée. » Rapport Cour des Comptes

Inversement, certaines structures d'HAD peuvent être peu enclines à travailler avec des Ehpad car les tarifs subissent alors une minoration de 13%, a-t-elle signalé. Constatant que les établissements médico-sociaux allaient être de plus en plus incités, dans le cadre de leurs contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (CPOM) à recourir à l'HAD, elle a espéré que cela conduirait de part et d'autre à dialoguer et à faire des efforts.

Cour des comptes, L'hospitalisation à domicile, évolutions récentes (PDF)


Source : infirmiers.com