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Hôpital : les intérimaires continuent de coûter très cher

Publié le 14/11/2017
stéthoscope instrumentation soins

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Des soignants qui cumulent, ponctuellement ou régulièrement, leur activité principale avec une autre secondaire, via des vacations et/ou des missions d'intérim. Infirmiers.com avait consacré un article à ce sujet. Or, comme le relève une sénatrice LR, l’hôpital public, par manque de moyens et pour assurer la continuité des soins, continue de faire régulièrement appel à des médecins, urgentistes ou encore anesthésistes intérimaires. Le problème ? Le coût exorbitant de ces missions. 

C’est un peu Koh-Lanta, j’arrive dans des endroits où, souvent, je suis seule, je n’ai même pas de collègues, même pas une direction à qui parler, témoigne une infirmière. Ses missions en intérim lui permettent de doubler ses revenus.

Un demi-milliard d’euros par an. C’est ce que coûte le recours à des intérimaires hospitaliers, payés trois fois plus chers que leurs collègues titulaires. Un système qui grève le budget de la Sécurité Sociale. Or le problème ne date pas d’hier. Déjà en 2013, le député socialiste et praticien hospitalier, Olivier Véran, dénonçait dans un rapport intitulé « Hôpital cherche médecins, coûte que coûte »,  des rémunérations de médecins intérimaires grimpant jusqu'à 15.000 euros par mois et un surcoût de 500 millions d’euros par an pour les hôpitaux. La situation a-t-elle évolué en 2017 ? On dirait bien que non. La sénatrice LR Frédérique Gernaud alerte, dans un courrier adressé le 2 novembre à la ministre des Solidarité et de la Santé Agnès Buzyn , à propos d’un système qui persiste avec un recours abusif aux praticiens intérimaires. L’intérim s’avère, dans un contexte de pénurie de médecins dans les services d’urgence, particulièrement lucratif, comme le souligne la sénatrice : En juillet-août 2017, les hôpitaux de la région Centre Val-de-Loire se sont livrés à une surenchère indécente pour en recruter. Des rémunérations allant de 1 800 à plus de 2 000 euros pour 24 heures de garde ont été observées. Cette anomalie aboutit à la constitution d'un corps de médecins intérimaires qui reviennent excessivement cher aux hôpitaux, et elle incite les praticiens titulaires « plein temps » à démissionner ou à se mettre en disponibilité pour se consacrer à l'intérim, plus rémunérateur. Autrement dit : rien n’a changé.

La nécessité d’assurer les gardes contraint les hôpitaux à recourir de plus en plus à des praticiens intérimaires, dont ils se disputent les services au prix fort.

La situation empire

Rien n’a changé depuis 2013 et pire, la situation serait même en train d’empirer, si l’on en croit un reportage à ce propos diffusé par Europe 1 le 8 novembre. Le manque criant d’urgentistes, d’anesthésistes ou de radiologues dans les hôpitaux expliquerait en partie la situation. La nouveauté, c’est que l’interim touche désormais d’autres métiers à l’hôpital, comme celui des infirmiers, explique la journaliste au micro d’Europe 1, avant de donner la parole à l’une d’entre elles. Les missions en intérim de cette infirmière lui permettent presque de doubler ses revenus. Je travaille une vingtaine de jours par mois, j’arrive à gagner dans les environs de 2500 à 3000 euros, explique-t-elle. Si j’avais été dans le public en tant que jeune diplômée, j’aurais été autour de 1500 à 1600 euros. Je fais de tout : je vais dans le public, le privé, je fais de la clinique, de la maison de retraite. Les inconvénients ? C’est un peu Koh-Lanta, j’arrive dans des endroits où, souvent, je suis seule, je n’ai même pas de collègues, même pas une direction à qui parler, il faut vraiment savoir s’adapter à du nouveau matériel, à de nouveaux patients… La situation est donc loin d’être satisfaisante : les intérimaires viennent ponctuellement à l’hôpital, ne connaissent pas les services ou encore le matériel, ce qui complique le suivi ou la qualité des soins, parfois même, au détriment du patient.

Les solutions ? « Il faut plafonner le niveau de la rémunération qui peut être versée à un médecin temporaire et contrôler les pratiques, tout en parvenant à attirer à l'hôpital.

Quelles solutions apporter ?

Pour Frédéric Valletoux, président de la Fédération Hospitalière de France (FHF), interrogé sur Europe 1, la situation n’a pas évolué en un an, alors que l’ex ministre de la Santé, Marisol Touraine avait pris des mesures pour favoriser le recrutement à l’hôpital. Il n’y a pas grand-chose qui a changé, parce que c’est un sujet prégnant. Un directeur d'hôpital, quand il doit faire tourner un service, même s'il ne trouve plus de médecin, eh bien il faut qu'il trouve des solutions, rappelle-t-il. Effectivement, l’intérim est une gangrène parce que ça pénalise les budgets hospitaliers, concède Frédéric Valletoux, mais pour l’instant, on n’a pas trouvé de solution. Faire la guerre aux intérimaires ? Cela reviendrait à se tromper d'ennemi, selon lui. Ça ne sert à rien de s'attaquer aux intérimaires si derrière, on ne met pas les moyens pour accompagner la carrière d'un radiologue. Un radiologue qui, arrivé à 45 ans, se voit proposer trois fois son salaire s'il va dans une clinique, évidemment, il va être tenté... Les solutions, pour ce professionnel, ne sont donc pas miraculeuses mais bien pragmatiques : Il faut mieux rémunérer, il faut donc des budgets qui le permettent aux hôpitaux parce qu'un directeur d'hôpital, son obligation, c'est de faire tourner un service. Quant à Olivier Véran, il proposait déjà des solutions dans son rapport de 2013 : Il y a deux urgences. Tout d'abord, faire stopper les abus pour assainir le marché. Il faut plafonner le niveau de la rémunération qui peut être versée à un médecin temporaire et contrôler les pratiques. Il est indispensable qu'une instance soit enfin chargée du dossier. Parallèlement, il faut réussir à attirer à l'hôpital. Il faut moduler les rémunérations afin qu'en début de carrière un jeune médecin puisse gagner plus que 3 000 euros nets par mois, mais aussi faire en sorte que les petits hôpitaux coopèrent pour recruter à plusieurs, et ainsi offrir des postes bien plus intéressants.

Susie BOURQUINJournaliste susie.bourquin@infirmiers.com @SusieBourquin


Source : infirmiers.com