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Edito - « Je veux vieillir chez moi »

Publié le 23/10/2015
Je veux vieillir chez moi

Je veux vieillir chez moi

auxiliaire de vie

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auxilaire de vie

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auxiliaire de vie sénior

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Construit comme un reportage, constitué de portraits, d’interviews et de points de vue d'experts du grand âge, ce bel ouvrage « Je veux vieillir chez moi » dépasse les clichés, pose les bonnes questions et présente une vision de la vulnérabilité liée au grand âge, où les auxiliaires de vie apparaissent comme des sentinelles attentives à la vie, quelle qu’elle soit. Un ouvrage utile et bienveillant.

A lire - Un regard sensible sur les auxiliaires de vie

Indispensables au maintien à domicile des personnes âgées parmi les plus vulnérables, les auxiliaires de vie sociale sont des travailleurs « invisibles ». Qui les connaît, les reconnaît, valorise leurs compétences, met en lumière leur travail quotidien ? En effet, sans Fatiha qui fait ses courses, Suzanne ne mangerait plus de fruits frais. Sans Johana qui l’aide à se préparer pour la nuit, Lucienne dormirait toute habillée. Sans Bertrand qui fait la toilette de Monique, Jacques ne pourrait plus garder sa femme auprès de lui. Sans Halima qui boit le café avec elle, Arlette traverserait les jours sans parler à personne…

S'ils sont des acteurs essentiels dans le maintien à domicile des personnes âgées, et qu'ils sont d'ailleurs reconnus comme  tels par leurs bénéficiaires – "on nous accueille comme le soleil" déclarent-ils, leur travail n'est pas valorisé

La journaliste Véronique Châtel, spécialisée dans les sujets de société et les récits de vie et le photographe Serge Verglas ont décidé de proposer un autre regard sur ces sentinelles attentives à la vie et à la vulnérabilité du grand âge. Leur ouvrage « Je veux vieillir chez moi. Reportage sur les auxiliaires de vie », s'appuyant sur des portraits, des interviews et des points de vue de spécialistes dépasse les clichés et présente une vision différente de la vulnérabilité liée au grand âge où les auxiliaires de vie sont des héroïnes du quotidien de par leur présence rapprochée et leurs multiples actions envers tous ceux qui souhaitent vieillir chez eux et qui y parviennent grâce à elles. Comme Véronique Châtel le souligne, cet ouvrage est  né d'un paradoxe, d'un côté on accorde de l'importance à la vie qui se prolonge et de l'autre, on la déconsidère. Comment expliquer en effet qu'on envoie au domicile de femmes et et d'hommes qui vivent depuis plus longtemps que d'autres, dont le capital humain est par conséquent particulièrement riche, des femmes et des hommes dont on ne s'offusque pas qu'ils soient des travailleurs pauvres et non reconnus, alors même qu'ils vont y jouer un rôle d'auxiliaire de vie ?

Un regard sur les auxiliaires de vie, ces sentinelles attentives à la vie et à la vulnérabilité du grand âge

Aussi doux et prévenants soient-ils, les auxiliaires de vie représentent cependant une intrusion dans ce que les gens ont de plus cher. De fait, chaque domicile a ses codes et ses mystères que l'auxiliaire de vie doit vite décrypter… Le métier d'auxiliaire de vie social peut donc exposer à une forme d'agressivité de la part des bénéficiaires. C'est inévitable vu qu'il s'exerce à leur domicile. Or le domicile n'est pas seulement l'endroit où vivent ces personnes. Il représente bien plus que cela, surtout quand elles sont âgées et restent chez elles l'essentiel de leurs journées. Le domicile est une sorte de peau qui contient les angoisses et protège des dangers de l'extérieur écrit Véronique Châtel. Blanche, 92 ans, l'explique très bien, C'est très agaçant de voir débarquer chez moi des personnes que je ne connais pas pour faire mon lit, trier mon linge sale, me laver les cheveux. Je me sens toute bête. Comme si elles savaient mieux que moi ce qu'il faut faire pour moi. Il y a des moments où je ne me sens plus chez moi.

Un avis que Jean-Paul , 77 ans ne partage pas. Récemment, alors que j'étais très affaibli, j'ai du faire ma toilette au lit. J'ai craint le pire. J'en étais presque recroquevillé de terreur. Mais l'auxiliaire de vie s'y est prise d'une manière si délicate, si bienveillante, que j'en aurais pleuré. Elle a réussi à ce que je ne me sente pas dévalorisé parce que fragilisé. Avec ses gestes doux et précis, elle m'a signifié que je méritais qu'on s'occupe de moi. Je n'oublierai jamais ce moment : cela a été pour moi une leçon d'humanité. On peut se sentir un homme, même dans les pires situations… mais cela dépend de la qualité de certains êtres.

Jasmine, 48 ans, explique que la première fois que j'arrive chez quelqu'un, j'ai toujours un petit coup au coeur. Et si la personne refusait de me laisser entrer ? Je fais ce métier parce que j'aime rendre service aux gens et me sentir utile. Passer d'un domicile à l'autre, c'est à chaque fois entrer dans une nouvelle histoire et d'une semaine à l'autre, le comportement des bénéficiaires peut évoluer. Un auxiliaire en témoigne : on ne pas fonctionner au radar, tous nos sens sont interpellés. L'imprévu qui guette à chaque intervention à domicile est aussi le fait de l'âge avancé des bénéficiaires.

Mal connue, pas reconnue et donc pas rémunérée à sa juste valeur, la profession d'auxiliaire de vie n'attire pas que des passionnés...

Il faut s'immerger dans ces échanges entre ces professionnels et leurs bénéficiaires pour comprendre la complexité du travail d'auxiliaire de vie sociale, poursuit Véronique Châtel et l'arrivée des hommes dans cette profession permet d'en avoir une lecture plus objective. Et de poursuivre : plus la profession d'auxiliaire de vie sera reconnue à sa juste valeur, plus elle attirera des professionnels de la qualité de ceux que ce livre amis en lumière. Si on peut faire confiance au professionnalisme des auxiliaires de vie, on accueillera ces derniers plus facilement à son domicile. C'est en donnant de la valeur aux auxiliaires de vie et en reconnaissant leurs qualifications que l'on donnera de la valeur à la vie dans le grand âge, y compris en perte d'autonomie.

Un ouvrage particulièrement utile à l'heure où les politiques de santé s'interrogent sur la prise en charge de nos aînés, d'autant lorsqu'ils sont en perte d'autonomie, et que vieillir à domicile et y rester le plus longtemps possible, constitue un défi de taille pour notre société. Sans aides et soutiens humains, beaucoup n'y parviendraient pas. Voilà pourquoi vieillir à domicile n'est envisageable qu'avec la contribution, à un certain moment, des auxiliaires de vie sociale dont la mission quotidienne doit s'articuler au mieux avec celle d'autres acteurs, garants également d'un maintien à domicile efficient, à savoir notamment les infirmiers libéraux.

Je veux vieillir chez moi de Véronique Châtel, Editions Scrinéo, Les carnets de l'info, octobre 2015, 144 p. 29,90 €. Photos et copyright de Serge Verglas.

Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern


Source : infirmiers.com