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AU COEUR DU METIER

Ecrire et soigner (partie 2)

Publié le 12/07/2016
journal pliage

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Les documentalistes spécialisées en information paramédicale, le SIDOC (Sciences infirmières documentation) ont organisé une manifestation le 11 mai 2016, en partenariat avec la Cité de la santé, pour évoquer la littérature en soins infirmiers. Après avoir rappelé, dans une première partie, les apports du travail des documentalistes en faveur de la diffusion des savoirs infirmiers, nous revenons, dans cette seconde partie, sur les temps forts du colloque et notamment sur les autres formes d'écriture en dehors de l'écriture académique...

L’écriture académique

Pour Didier Morisot, infirmier en psychiatrie, l’écriture revêt un caractère salutaire, un besoin qui, associé à l’humour, lui permet de « résister à l’incohérence, de résister ».

Marielle Boissart, cadre supérieur de santé et secrétaire de l’Académie des sciences infirmières, a ouvert la première partie de la matinée qui était consacrée à l’écriture scientifique. En insistant sur les enjeux de l’écriture dans le cadre de la recherche, elle s’appuie sur les travaux scientifiques des infirmier(e)s et sur la formation initiale par la recherche, les formateurs eux-mêmes étant bien sûr invités à multiplier au maximum leurs activités de recherche et de publication. Directeur de l’Institut de soins infirmiers supérieurs, Christophe Debout (Phd) a présenté la Revue francophone internationale de recherche infirmière. Il a insisté sur l’importance à former les infirmier(e)s à la pratique fondée sur les données probantes. Isabelle Colombet, médecin chercheur en soins palliatifs, et Caroline Tête, documentaliste au Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie, ont ensuite livré l’expérience d’une collaboration réussie sur la lecture critique d’articles, dans un contexte de recherche documentaire de type interventionniste en soins palliatifs. Caroline Tête a insisté sur les méthodologies et les moyens de diffuser la recherche.

L’écriture engagée

Changement de ton et de format dans cette matinée consacrée à l’écriture engagée sur le net. Bernadette Fabregas, rédactrice en chef d’ infirmiers.com, et Babeth l’AS, twitteuse et bloggeuse, ont abordé le terrain de l’humour et des émotions avec le genre du témoignage, du récit. D’abord auxiliaire de vie, Babeth (Florence) a voulu raconter son quotidien, puis pousser des coups de gueule pour évoquer simplement la réalité du soignant. Elle a évoqué la complexité, parfois, d’utiliser un pseudo (Babeth l’AS), elle a d’ailleurs décidé de retrouver son identité et « d’assumer ». Un chemin parfois difficile qui l’a conduite de son blog « Vieux et merveilles » à une collaboration plus officielle avec « Les outils du soin ». Pour Bernadette, l’écriture engagée fait sens pour soi et pour les autres, elle est signe d’appartenance, d’un engagement qui vise à servir l’autre : celui qui nous ressemble, pour qui l’on se bat et se battra parce qu’on est plus libre que lui, pour qui on pourra parfois dire à sa place, et ainsi amplifier sa parole et la faire voyager…

L’après-midi : être auteur de sa pensée

Walter Hesbeen, responsable pédagogique du Groupe francophone d’Études et de Formations en Éthique de la Relation de Service et de soin (GEFERS), est resté fidèle à la philosophie humaniste du « Prendre soin ». Il a tenu à resituer la recherche et l’écriture à leur juste place, comme des moyens au service d’une finalité qui est la pratique clinique, rappelant que la finalité de cette pratique infirmière, c’est le malade… Walter Hesbeen a souligné l’importance de l’écriture et de la rigueur en formation en citant Nicolas Boileau : Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire viennent aisément. Belle transition pour les trois documentalistes du SIDoc qui ont ensuite présenté leurs expériences respectives d’ateliers d’écriture en Ifsi/Ifas. Pour Brigitte Bourgeois (Meaux), Catherine Hordesseaux (Longjumeau) et Stéphanie Pisot (Chartres), qui ont la même volonté d’accompagner les étudiants pour les aider à démystifier l’écriture, à s’approprier des techniques rédactionnelles et éditoriales par la rédaction d’un journal, d’une fiche de lecture, d’un résumé…

La littérature, espace de liberté

La lecture fait aussi partie du dispositif. Être auteur de sa pensée commence d’abord par l’ouverture à la pensée d’autrui. François Bégaudeau, romancier, a entrouvert une réalité soignante avec le livre « Le moindre mal » 1. Au cours de ces échanges, il a partagé son avis sur « l’intelligence d’écrire ». Pour cet agrégé de lettres, l’écriture fait prendre conscience que l’on est intelligent, dans le sens où elle donne la possibilité de formuler des pensées mais également de faire émerger de nouvelles idées. Pour Didier Morisot, infirmier en psychiatrie , l’écriture revêt un caractère salutaire, un besoin qui, associé à l’humour, lui permet de résister à l’incohérence, de résister. Ecrire pour comprendre, pour communiquer, pour diffuser » ont repris en substance Anne Perrault Soliveres, auteur notamment d’« Infirmières, le savoir de la nuit 2, et Brigitte Tison, auteur de « Soins et cultures » 3 . Pour Walter Hesbeen, la littérature ouvre l’esprit et souffle un vent de liberté sur la formation des étudiants qui ne se réduit pas à des théories et des concepts, une idéologie que l’on veut leur inculquer. Les romans et les biographies se mettent au service de la singularité et aident à affiner la vision que l’on a de la vie. La littérature met aussi entre parenthèses les jugement moraux, a ajouté François Bégaudeau, en insistant sur cet espace de liberté. Martin Winckler, auteur de « La maladie de Sachs » 4, et du « Chœur des femmes » 5, clôturait en différé (vidéo) le colloque sur le thème de l’écriture et du savoir démocratisés et accessibles.

Le SIDoc propose d’écouter l’intégralité des interventions en podcasts, ainsi que la vidéo de Martin Winckler. Retrouvez les informations plus complètes des intervenants sur ce lien. Les membres de l’association œuvrent déjà à la préparation du prochain colloque, programmé en 2018. Le rendez-vous est pris.

Stéphanie PISOT et Christine PAILLARD Sidoc  christinepaillard@gmail.com

Notes

  1. BEGAUDEAU, F. Le moindre mal. Seuil, 2014.
  2. PERRAUT SOLIVERES, A. Infirmières, le savoir de la nuit. PUF, 2001.
  3. TISON, B. Soins et cultures. Masson, 2007.
  4. Editions POL, 1998.
  5. Editions POL, 2009.


Source : infirmiers.com