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IDEL

Des panseurs sans pensées les IDEL ?

Publié le 26/01/2015
caducée voiture infirmière libérale

caducée voiture infirmière libérale

La dernière étude de l’Observatoire Régional de Santé (ORS) Pays de la Loire, réalisée en partenariat avec le ministère de la Santé et la Drees, intitulée « Intégration d’infirmiers au sein de cabinets de médecine générale : l’opinion des médecins généralistes des Pays de la Loire » (1) irrite, une fois encore, la communauté des infirmiers libéraux, et l'un de ses principaux syndicats, le SNIIL ; et pour cause. Explications.

Réagissant dans un communiqué daté du 22 janvier 2015, le Sniil, adopte un ton à la fois vif et outré comme le titre en témoigne "A quand la mise sous tutelle de toutes les infirmières libérales ?"

Au sein de cette enquête, réagit Annick Touba, présidente du Sniil, c’est bien, de nouveau, à des médecins que l’on demande de se prononcer sur l’avenir de la profession infirmière… alors que jamais encore on ne l’a demandé aux infirmières elles-mêmes !

Des IDEL rémunérés par un forfait de l’assurance maladie...

Pour le Sniil, l'étude de l'ORS des Pays de la Loire "demande aux médecins de disposer sans aucune vergogne de la vie des infirmières libérales..."

De quoi parle exactement cette étude et que dit-elle de l'opinion des médecins généralistes des pays de la Loire sur l’intégration d’infirmiers au sein de cabinets médicaux pour des missions spécifiques de suivi de certains patients à risque ou  atteints de pathologies chronique (diabétiques de type 2, patients à risque cardiovasculaire, fumeurs à risque de BPCO, personnes âgées...), notamment dans le cadre du protocole ASALEE2. Le document l'affirme en préambule : L’opinion des généralistes par rapport à ces nouveaux modes d’organisation varie notamment en fonction de l’âge et des  conditions d’exercice des médecins, mais également selon le  type d’actes confiés aux infirmiers, et en fonction des régions. Dans les Pays de la Loire, l’adhésion à ces nouvelles pratiques  est nettement plus forte qu’en moyenne en France. Voilà qui est rassurant ! L'audit met en avant qu'une proportion importante des médecins (76%) estime que ces nouvelles formes de coopération apporteraient un supplément de qualité des soins et ils sont environ 80 % à être "favorables" à déléguer une ou plusieurs tâches à un infirmier rattaché au cabinet pour quelques permanences dans la semaine, rémunéré par un forfait de l’assurance maladie.

Pour le Sniil, "cette étude est dans la norme de ce qui se passe actuellement… mépris et méconnaissance de la profession infirmière par les pouvoirs et institutions publics..."

Quid de l'autonomie des IDEL...

Annik Touba, présidente du Sniil, s'insurge : Transformée, sans qu’on ne lui ait rien demandé en tâcheronne corvéable à merci et payée par la Sécu, l’infirmière voit son travail imposé par les médecins via des « délégations de tâches ». Parmi elles : la « surveillance de la tension artérielle », « l’éducation thérapeutique du patient diabétique ou asthmatique » ou encore « l’éducation nutritionnelle. Et de souligner, dépitée, que tous les actes cités pour être délégués aux infirmières font déjà partie intégrante de leur rôle propre. Autrement dit, les libérales n’ont pas besoin d’une « délégation de tâches » pour pouvoir, déjà, les pratiquer en toute autonomie... Un constat qui illustre parfaitement selon le Sniil l'attitude de mépris des pouvoirs publics et institutions publics envers la profession infirmière ainsi qu'une forte méconnaissance de leurs rôle et compétences. Rappelons tout de même que les infirmiers libéraux sont les professionnels de santé les plus nombreux de France3 mais aussi les plus proches des patients4.

Ce n'est pas pour autant qu'ils sont consultés sur les politiques de santé à venir, et notamment au sujet de la prochaine Loi de Santé qui devrait être présentée à l'Assemblée nationale en avril prochain. Le Ministère n’accorde des entretiens qu’aux syndicats de médecins généralistes, et ce bien qu’un pan entier de l’activité infirmière libérale, celle de la vaccination, pourrait être confié aux pharmaciens. De plus, le groupe de travail chargé d’élaborer le référentiel du métier d’infirmière en pratique avancée au sein du ministère de la Santé n’est pas piloté par une infirmière, mais par un membre de la Direction Générale de l’Offre de Soins et un médecin généraliste poursuit le Sniil qui, devant tant de "dédain", appelle donc instamment les pouvoirs publics à choisir entre aller jusqu’au bout de leur logique, et placer officiellement sous tutelle toutes les infirmières libérales… ou avoir plus de considération et de justesse dans l’appréciation du métier infirmier libéral en mettant notamment en oeuvre des études sérieuses sur la profession.

Le temps gagné par les médecins permettra, pour 40% d’entre eux, de profiter davantage de leur vie privée !"

Les IDEL, des décérébrés sans idées ?

Lorsque l'on regarde de plus près les arguments mis en avant par les médecins sur les bénéfices de la délégation des tâches, on remarque que pour plus de 50% d'entre eux cela permettrait d’utiliser le temps gagné pour réaliser des consultations supplémentaires et pour 43 % de bénéficier de plus de temps de loisirs ; bon d'accord pour 73% des médecins, cela permettrait aussi de revoir le contenu de la consultation pour améliorer la prise en charge du patient ; ouf ! on est passé près du carton rouge et cela n'a pas échappé au Sniil ! Et tout ira ainsi très bien dans le meilleur des mondes puisque le temps gagné par les médecins permettra, pour 40% d’entre eux, de profiter davantage de leur vie privée !"

Bref, et même si les résultats de cette étude sont plutôt favorables à la délégation des tâches des médecins libéraux vers les infirmiers libéraux, on comprend bien la grogne de ces derniers et la question qui les taraude : ne sont-ils que des décérébrées incapables d’avoir la moindre idée sur le devenir de leur propre métier et, à fortiori, sur l’évolution des politiques de santé publique ?. Il semblerait que la réponse apportée par cette étude mette réellement en doute leurs apports en termes de soins de proximité, de compétences et d'autonomie...

Notes

  1. « Intégration d’infirmiers au sein de cabinets de médecine générale : l’opinion des médecins généralistes des Pays de la Loire » in Panel en Médecine générale n°10, décembre 2014.
  2. Initialement autorisé par l'Agence régionale de santé (ARS) Poitou-Charentes, le protocole est désormais déployé dans la quasi-totalité des régions de France, à des degrés variables. Le réseau Asalee compte en tout quelque 300 infirmiers, dont les deux tiers sont salariés (souvent à temps partiel) et un tiers libéraux. Un millier de médecins participent au dispositif, qui associe un même infirmier à plusieurs praticiens. (Arrêté du 12 janvier 2015, Journal officiel du jeudi 22 janvier 2015, texte 15)
  3. 98 249 infirmières libérales sont actuellement en exercice contre seulement 67 432 médecins généralistes (source : DREES, chiffres 2014, métropole uniquement, répertoire Adeli ; DRESS, santé-protection sociale, 2014).
  4. 65% des visites à domicile effectuées par les infirmières libérales ont lieu dans leur commune d’exercice et 90% dans une commune se situant à moins de 15 minutes alors que seulement 56% des consultations médicales s’effectuent au sein de la commune de résidence des patients (source : « Offre de soins de premier recours : proximité ne rime pas toujours avec accessibilité », DREES, études et résultats n°817, oct. 2012).

Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern


Source : infirmiers.com