De l'importance des cadres de proximité à l'hôpital

Les cadres de proximité doivent retrouver du temps pour "réanimer" le dialogue avec leurs équipes et améliorer ainsi la qualité de vie au travail, a expliqué le Pr Mathieu Detchessahar, du Laboratoire d'économie et de management Nantes-Atlantique (Lemna), à l'occasion du salon Hôpital Expo, à Paris.

Il a présenté les résultats d'une enquête menée de manière approfondie auprès de quelques établissements de santé et médico-sociaux (hôpitaux, cliniques, maisons de retraite, centres de convalescence) mais aussi d'entreprises et de professionnels du téléphone ("call centers"), lors d'une session d'Hôpital Expo intitulée "Qualité de vie au travail: quel intérêt à agir ?".

Le Pr Detchessahar a montré que la mauvaise qualité de vie au travail ne serait pas causée par une omniprésence des cadres, en raison du développement des nouvelles formes de management, mais au contraire par l'absence des cadres de proximité auprès de leurs équipes. Alors que les contraintes se multiplient, cela revient à retirer "sous les pieds [des personnels] le soutien managérial", pourtant nécessaire pour arbitrer certaines situations, a-t-il expliqué. Cette absence n'est pas due à une réduction du nombre de cadres mais plutôt au fait que les cadres sont "happés" par d'autres tâches, notamment "l'entretien et l'alimentation de la machine de gestion" (tableaux de bord, plannings,...) qui leur prennent un "temps considérable, enfermé dans [leur] bureau et suant devant l'informatique". La conséquence est qu'il n'y a jamais eu aussi peu de communication sur le travail opérationnel, a remarqué le Pr Detchessahar.

De plus, cet "intense travail administrativo-gestionnaire" suscite peu de vocation pour devenir cadre au sein des équipes ou alors les vocations de personnes voulant quitter les contraintes de leur métier, a-t-il ajouté.

Le cadre de proximité est par ailleurs happé par les réunions qui consistent à l'informer des décisions des échelons supérieurs ou à discuter de projets innovants en gestion.

Le Pr Detchessahar a mis en garde contre la multiplication de ces projets innovants en gestion qui sont en général lancés par des organisations extérieures à l'hôpital, notamment les tutelles, et visent souvent à se mettre en conformité par rapport à la législation mais ne concernent pas des problèmes concrets de l'équipe.

« Désempêcher » le cadre plutôt que le former

En réaction à cette situation, il a préconisé que les cadres, notamment au sein des pôles, réfléchissent à la place du management pour le remettre dans l'activité de l'équipe, dans l'accompagnement des actions concrètes et dans l'animation des discussions et des débats. Pour lui, il faut "désempêcher" le cadre de proximité pour le remettre en première ligne. "C'est plus important que la formation", a-t-il souligné. Il lui semble important de revoir les fiches de poste des cadres en analysant toutes les activités connexes qui se sont accumulées et en retravaillant le périmètre managérial et les marges de manœuvre possibles. Parallèlement, il recommande aux directions d'accompagner les cadres à réanimer le dialogue sur le travail.

Enfin, il a pointé la tendance à la déprofessionnalisation du cadre de proximité, alors qu'il est important qu'il connaisse le métier exercé par son équipe, et les changements fréquents de cadres alors que la stabilité est nécessaire pour établir la confiance.