Conditions de travail délétères, baisse du pouvoir d'achat... Les soignants du service gériatrique de l'hôpital Edouard Herriot sont épuisés et ils le font savoir par le biais de ce "coup de gueule" qui restera anonyme...
Je suis actuellement infirmier dans un service de court séjour gériatrique à l'hôpital Edouard Herriot de Lyon. La gériatrie est un choix pour moi, car je trouve que c'est une médecine d'adaptation. J'y suis donc très attaché ainsi qu'aux valeurs du service public. Notre service est composé de 28 lits dont 5 lits scopés. En ce qui concerne les effectifs, nous sommes deux infirmiers le matin et le soir et un infirmier de journée pour les entrées et sorties. Nos patients sont polypathologiques et se retrouvent avec des problématiques du grand âge : retour à domicile impossible, insuffisance cardio-pulmonaire, infarctus du myocarde... Bref, ils sont en pertes d'autonomie et notre pratique se rapporte parfois plus à un service de réanimation...
Mon service a déménagé de l'hôpital gériatrique Antoine Charial (Lyon) pour se rapprocher des plateaux techniques et assurer un service de proximité pour les patients âgés de l'agglomération lyonnaise. Ce projet a été porté par une équipe professionnelle et motivée. Ce changement d'établissement permet en effet aux patients d'avoir accès à un réel service public adapté à leur pathologie. Mais nos conditions de travail se sont dégradées... Depuis ce déménagement, nous sommes amputés d'un temps plein infirmier alors que le nombre de patients accueillis n'a pas changé.
Nous nous retrouvons à faire du brancardage et à préparer quotidiennement les vingt-huit piluliers de nos patients. A l'hôpital Antoine Charial, cette tâche était confiée à une préparatrice en pharmacie. De plus, nos chariots sont totalement inadaptés à notre activité. Ils sont neufs, mais trop petits en hauteur et en largeur pour le personnel, ce qui fait que nous sommes voûtés sur notre chariot de soins. Nous avons essayé de les échanger avec d'autres services, mais lorsqu'ils les voient ils n'en veulent pas ! L'armoire à pharmacie se situe dans la salle de soins et l'infirmier de journée y prépare les piluliers en plus de s'occuper des entrées et sorties des patients. Cela rend sa pratique dangereuse, car c'est un lieu de passage, d'échange, de rangement, où le téléphone ne cesse de sonner. Précisons également qu'un médecin et une infirmière sont déjà en burnout sans que la direction ne se préoccupe du personnel restant.
Un pouvoir d'achat en baisse
Depuis 1993, le décret n° 92-93 du 19 janvier 1983 prévoit le versement d'une prime appelée "NBI" pour nouvelle bonification indiciaire pour le personnel de gériatrie. Cette prime, réservée pour les services de long séjour et cure médicale (devenus depuis soins de suite et de réadaptation), avait été étendue aux services de court séjour gériatrique pour compenser la charge de travail. C'était la pratique institutionnelle depuis 20 ans d'étendre cette prime à l'ensemble du personnel gériatrique. Mais à partir du 1er juillet 2014, la direction des Hospices Civils de Lyon a décidé de ne plus verser cette prime sous prétexte qu'il s agissait d'une erreur. Les équipes de gériatrie ont été au courant par simple courrier adressé à leur domicile leur indiquant qu'ils se verraient amputés de 46 euros sur leur pouvoir d'achat...
Nous nous sentons méprisés par une direction autocrate qui ne prend même pas le temps de venir informer ses équipes. Cette perte de pouvoir d'achat et la dégradation de nos conditions de travail est intolérable et des actions sont en cours, à l'initiative des syndicats. Un préavis de gréve est déposé par Force Ouvrière le 1er juillet 2014.
P., infirmier, Lyon
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