La commission approuve la plupart des décisions gouvernementales, prises dans un contexte d'incertitude. Mais elle regrette la rigidité de l'organisation de la campagne, la décision de ne vacciner qu'en centres sans faire appel aux libéraux et une communication dispersée, faite sans concertation avec les professionnels. Elle refuse de se prononcer sur les problèmes liés à l'expertise.
Le rapport de la commission d'enquête "sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination de la grippe A(H1N1)", rédigé par le député UMP Jean-Pierre Door (Loiret), dont APM a eu copie, donne des appréciations sur la campagne de vaccination et émet 42 recommandations.
Jean-Pierre Door indique avoir exclu de son champ le rôle de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et de ses experts ainsi que les questions sur les modalités d'utilisation des antiviraux ou la pertinence des procédures d'autorisation de mise sur le marché (AMM) des vaccins prépandémiques.
Il met en avant "la crise de confiance" entre Etat et citoyens, révélée par la pandémie. Les citoyens "ne croient plus aux messages de prévention et de santé publique, se défient de la parole de l'Etat en période de crise sanitaire et préfèrent s'en remettre à d'autres sources d'information, aux intérêts divers mais très médiatisées".
"Les pouvoirs publics n'ont fait et bien fait que leur devoir" dans la conception de la campagne et la commande de vaccins et les "apparentes tergiversations" des pouvoirs publics ne reflètent "que la progression, en temps réel, des connaissances sur la pandémie à laquelle ils devaient faire face", conclut-il.
Mais le gouvernement a commis des erreurs de communication. De facture classique, la communication gouvernementale a été "abondante" et essentiellement axée sur l'information, mais n'a pas suffisamment pris en compte les fluctuations de l'opinion publique, notamment sur les intentions de se faire vacciner.
La "stratégie de maximisation du risque" adoptée au départ "n'a pas porté ses fruits" et a même "desservi le gouvernement, dont la communication est progressivement apparue en décalage avec la réalité de la pandémie".
Le gouvernement a aussi été débordé par le débat d'experts en santé publique se déroulant dans les médias. Jean-Pierre Door critique d'ailleurs les médias qui ont été "excessifs" et ont donné "un large écho à des prises de position de personnalités extérieures à l'expertise sanitaire" et à "des informations oscillant entre alarmisme et banalisation sur la sûreté des vaccins pandémiques, reposant sur des malentendus et des amalgames".
Il relève aussi "l'absence de réaction appropriée" du gouvernement "face aux rumeurs" diffusées via internet. Il demande des mesures pour "réagir aux rumeurs et présenter des contre-arguments".
Pour l'élaboration des messages, le rapporteur suggère de reprendre les propositions que va émettre la Conférence nationale de santé (CNS) sur "la concertation en phase de préparation et de gestion de la crise sanitaire" et d'instaurer, en cas d'alerte pandémique, une "conférence nationale" constituée de représentants des collèges scientifiques pour élaborer "une communication consensuelle sur la nature du risque et les moyens médicaux disponibles pour y faire face".
Les unions régionales des professions de santé (URPS) qui se mettent en place à l'automne devraient jouer le rôle de "relais de l'information délivrée par le gouvernement en cas de crise". Inversement, les professionnels de santé devraient communiquer leurs coordonnées électroniques aux URPS et aux conseils départementaux de l'ordre, pour que l'information leur parvienne.
Mobilisation remarquable
Pour mener la campagne de vaccination, "l'appareil d'Etat s'est globalement remarquablement mobilisé" mais "les professionnels de santé puis les Français n'ont pas adhéré aux objectifs" de cette campagne, constate-t-il.
Le rapport dédouane le gouvernement sur le faible taux de vaccination. Il reconnaît que le bilan est insuffisant (5,7 millions de personnes vaccinées, soit environ 9% de la population) au regard des moyens engagés (entre 615 et 670 millions d'euros) et qu'il s'agit d'un "échec de santé publique". Mais, ajoute-t-il, la France n'a pas fait moins bien que des pays équivalents (Allemagne 10% de vaccinés, Royaume-Uni 7,4%, Belgique 6,6%, Espagne entre 3,8% et 5,3%, Italie 1,4%, Chine 6,4%).
Seuls trois grands pays font beaucoup mieux : la Suède avec 64,5% de vaccinés, le Canada entre un tiers et 45% et les Etats-Unis 23,4%. Trois petits pays ont obtenu de bons résultats mais ils étaient confrontés à des problèmes logistiques moindres en raisons de leur petite taille : les Pays-Bas avec 32%, la Hongrie entre 30% et 40% et la Norvège avec plus de 45%.
La commande massive de vaccins (94 millions de doses) effectuée au printemps "n'apparaît pas excessive" en raison des incertitudes sur le virus à ce moment-là. C'est l'analyse a posteriori, avec des données virologiques et épidémiologiques affinées, qui permet de conclure à un excès. Au final, le gouvernement a fait "une application raisonnable du principe de précaution".
Organisation trop rigide
L'organisation de la campagne sur le terrain a été "volontariste mais trop rigide", juge Jean-Pierre Door. Le dispositif choisi, avec des centres de vaccination collective, conçu pour une pandémie de grande ampleur, "s'est révélé inadapté pour contrer une pandémie de moindre sévérité".
Mais il estime que le choix de centres de vaccination collective a été dicté par des contraintes de santé publique et de logistique et que les problèmes de gestion opérationnelle ont été résolus au fur et à mesure. Il relève cependant que plus de 3,4 millions de doses de vaccins contre la grippe A(H1N1) ont été jetées ou mises au rebut.
Il demande que, à l'avenir, les médecins libéraux et les agences régionales de santé (ARS) occupent un rôle charnière dans l'organisation des campagnes de vaccination contre une pandémie.
Jean-Pierre Door recommande aussi que le plan de prévention et de lutte contre la pandémie grippale soit assoupli et précisé.
Il ne remet pas en cause le pilotage national de la gestion de crise, par la cellule interministérielle de crise (CIC), au niveau du ministère de l'intérieur, qui a été "un atout indéniable" pour la cohérence des décisions. Il suggère toutefois des améliorations.
(rapport consultable www.apmnews.com/documents/Rapport_grippe_130710.pdf)
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