Petite question par curiosité :
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ESI

Comment tuer un(e) futur(e) infirmier(e) ?

Publié le 14/12/2015
stop maltraitance

stop maltraitance

Si les stages en soins infirmiers sont communément considérés comme pratiques, formateurs et professionnalisants (dans le meilleur des mondes), la réalité est toute autre. Bien loin de cet idéal. Trop loin. A dire vrai, et en toute objectivité, il serait plus juste de parler de violence, d'humiliation et de maltraitance pour décrire ce que subissent dans les services la plupart des étudiants, nos futurs soignants...

Maltraitance, harcèlement, humiliation… D'après une enquête de la FNESI, 12 % des étudiants peuvent témoigner de cas de suicides dans leur IFSI, et 7 % ont pensé à mettre fin à leurs jours durant leur formation .

Un mauvais moment à passer, une étape obligée, une expérience effroyable... Telle est la façon dont sont souvent considérés les stages par les étudiants en soins infirmiers (ESI). Caprices de jeunes gens surprotégés par leurs formateurs en IFSI ? Pas certain, si on considère l'état dans lequel les ESI quittent les services. Abandon des études, échec, dépression, burn-out, perte de confiance en soi… l'apport des stages semble bien plus dévastateur que pratique. Et pour cause, toute tentative de défense est peine perdue. Un article publié il y a quelques jours sur infirmiers.com a relancé le débat éternel et la guerre fratricide entre formés et formateurs au travers de moult commentaires des uns et des autres. Et à l'arrivée, chacun restant sur ses positions...

Récemment, j'ai vu une collègue descendre un tout jeune étudiant infirmier alors qu'il s'agissait de son premier stage. Elle a peut-être tué une « vocation » encore dans l’œuf ( Carole, infirmière).

IDE contre ESI : récit d'un duel déséquilibré...

Infirmier et étudiant. Tous deux au contact des patients, chacun soucieux de soigner et d'exercer. Finalement, un rien les sépare. Si ce n'est... un morceau de papier et tout le pouvoir qui lui est concédé. Certains soignants, conscients de leur "pouvoir" sur un simple étudiant en quête d'un bon bilan de stage, en profitent pour [lui confier], sans la moindre aide, les tâches les plus difficiles à réaliser pendant qu'ils jouent sur leurs téléphones ou prennent leurs cafés. Si seulement les outrages ne se limitaient qu'à de dures besognes, mais malheureusement, les choses vont bien plus loin. Jeune étudiante, j'ai dénoncé la maltraitance dont j'ai été victime dans l'un de mes stages. J'en ai été virée. J'ai reçu des menaces et ils ne voulaient pas me délivrer de note afin que j'échoue, Dans un service de cardiologie les infirmières ont été ignobles avec moi ! Pendant une pause, elles avaient prémédité l'invalidation de mon stage. J'étais leur souffre douleur. De multiples questions se posent donc, notamment sur les réseaux sociaux où les témoignages d'étudiants abusés affluent : Comment certaines infirmières en sont arrivés là. Ont-elles conscience qu'elles sont devenues comme ça ? A l'heure où de multiples réflexions [sont menées] sur la maltraitance du patient, qu'en est il de celle infligée [aux ESI]... ? Comment peut-on prétendre faire de l'humain et ne pas l'être [pour son] étudiant ? Pour les infirmiers diplômés, outre une profonde aversion pour le nouveau programme, une appréhension de se retrouver avec un étudiant inefficace ou une irrésistible tentation de reproduire ce qu'ils ont subi, la raison de cet acharnement moral est simple : Tout est une question de point de vue. Il faut (...) voir le problème comme la rencontre de deux mondes trop distants que sont l'IFSI et l'hôpital. Les enseignants sont trop loin du métier d'infirmier pour préparer les ESI au monde hospitalier et le rêve devient une douche froide lors des stages. Il faut que les étudiants comprennent que cette facette de leur stage a aussi pour finalité de les préparer au métier d'infirmier. Parce que les professionnels peuvent parfois être bien plus durs entre eux. Mais ça, mesdames et messieurs les étudiants, vous aurez bien le temps de vous en rendre compte... Toutefois, cette pseudo initiation est-elle bien nécessaire ? Car en attendant une hypothétique prise de conscience du monde amer qu'est le milieu hospitalier, beaucoup achèvent leurs stages écœurés du métier.

Quand tu vois le nombre de « connes » dans les services qui se prennent pour des médecins et cassent les pieds aux étudiants, tu m'étonnes que les [plus] fragiles vacillent !!! (Nicolas, infirmier)

Désabusés au point d'abandonner

Le prix est donc fort élevé pour espérer toucher du doigt le rêve de soigner. Beaucoup y perdent leur espoir, leur motivation et pire encore... leur identité. Je n'ai pas réussi à refaire ma troisième année qui a été invalidée à cause d'un stage... Un seul. [Il] a remis en question tout mon avenir et la passion que je porte pour cette profession. Humiliée et rabaissée... Je n'ai pas pu relever la tête... J'ai abandonné en fin de 2ème année. La pratique de certains "professionnels de santé" m'a dégoûtée. J'ai perdu le goût et l'envie [d'exercer] ce métier. Trois ans d'études, six mois d'exercice en tant que diplômée...  Je suis partie à l'étranger et je ne veux plus jamais exercer ! Merci soignants aigris !Idem pour moi... Après seulement un mois et demi d'exercice, elles ont réussi à me rendre dépressive !

Fort heureusement, l'ensemble de la communauté infirmière ne participe pas à l'humiliation des étudiants. Certains professionnels s'insurgent face à une telle violence. On est d'accord sur le fait que les formateurs en IFSI vivent sur une autre planète et ne connaissent plus la réalité du terrain. Mais, il y a une différence entre réalité des conditions d'exercice et harcèlement moral[Lorsqu'un étudiant passe] des nuits blanches, vient [en stage] avec des doutes et des peurs et [repart au bord des larmes], c'est qu'il y a un problème Et pas des moindres puisque 41 % des étudiants en soins infirmiers ont déjà songé à arrêter leur formation et 7 % ont même envisagé de mettre fin à leurs jours, selon une récente enquête de la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (FNESI) . Certes, beaucoup d'étudiants ont des lacunes énormes. Cependant, ce n'est pas en les rabaissant qu'on les pousse vers l'excellence. Je pense qu'il faut encourager les étudiants et leur montrer qu'ils sont capables. Essayer de leur transmettre le maximum de notre savoir et, surtout, conserver une attitude bienveillante...

A toutes les infirmières, ne faites pas subir aux étudiants ce que vous avez subi. Soyez (...) plus intelligentes et dites vous que [ce sont] ces futurs professionnels qui vous soigneront dans quelques années (Séverine1, infirmière).

Retiens de ce stage quel(le) professionnel(le) tu ne veux pas être...

Pour ceux et celles qui parviennent finalement à finir cette formation la tête haute, l'objectif doit être sans appel : éviter à son tour de devenir un professionnel peu scrupuleux en reproduisant ce cycle infernal. Avec ce que vous avez vécu ou vivez, vous ferez de bons référents. Justement parce que vous savez ce qu'il ne faut pas êtreLa première chose que je dis à un étudiant c'est "soigne comme tu aimerais qu'on te soigne" et "n'oublie jamais que tu as été étudiant toi aussi" . En effet, si certains infirmiers ont vite oublié comment ils le sont devenus et d'où ils viennent, l'important est de faire la différence. J'ai eu aussi un stage qui a été horrible. J'y allais la boule au ventre, j'en repartais en larmes. Un jour, ma référente m'a simplement dit : "retiens de ce stage quelle professionnelle tu ne veux pas être"... Il y a quatre ans, j'ai obtenu mon diplôme d’État et les larmes sont bien loin maintenant. Car en définitive, la plus belle correction qu'un étudiant puisse infliger à ceux et celles qui l'ont maltraité, c'est l'obtention de son diplôme et d'une vie professionnelle couronnée de succès.

Ne vous laissez pas dévaloriser par des idiotes complexées qui se prennent pour des « cow-boys ». Il s'agit de vos projets, de votre avenir, pas du leur… (Rahima, infirmière)

Note

  1. Le prénom a été modifié

Gwen HIGHT  Journaliste Infirmiers.comgwenaelle.hight@infirmiers.com@gwenhight


Source : infirmiers.com