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"Cette patiente qui ne m'aimait pas..."

Publié le 22/06/2018
La petite infirmière dans la prairie

La petite infirmière dans la prairie

Coeurs brisés

Coeurs brisés

Nous entrons chez les gens, nous franchissons les portes et parfois au détour d'un couloir, la magie n'opère pas. Il n'y a pas de lien possible, ce qui est déstabilisant car le lien fait partie de notre métier. La blogueuse La petite infirmière dans la prairie nous raconte cette expérience destabilisante qui a marqué son esprit.

"On ne peut pas plaire à tout le monde et je suis au moins sûre d'une chose : je ne lui plaisais pas du tout..."

Elle ne m'aimait pas. Je le voyais,je le sentais.Je le voyais au moment même où mon pied franchissait la porte de sa maison. Son regard se posait sur moi et je sentais bien qu'elle ne me portait pas dans son cœur. J'avais pourtant essayé maintes et maintes fois de la caresser dans le sens du poil, mais c'était peine perdue. Elle ne m'aimait pas, voilà tout. Lorsque je commençais le soin, elle me regardait de haut. Elle surveillait mes moindres faits et gestes. Lorsque j'entamais la conversation, elle se fermait comme une huître et me répondait sèchement coupant court à la discussion. Pourtant, je ne me démontais pas et tentais tous les stratagèmes : de la petit phrase pleine de guimauve en entrant, au sourire qui va bien, en passant par le ton détaché mais rien n'y faisait. On ne peut pas plaire à tout le monde et je suis au moins sûre d'une chose : je ne lui plaisais pas du tout.

Elle avait ses préférées et je n'en faisais pas partie !

Au début, bien sûr, ma fierté en avait pris un coup et puis, ma fierté et moi étions passées à autre chose. Nous avions pris de la distance. Bon, j'avoue, j'y allais un peu à reculons mais j'y allais quand même juste parce qu'après tout, si ma tête ne lui revenait pas, c'était son problème.Maintenant que les années ont passé, je pense parfois à cette dame et un sourire se pointe en me remémorant sa tête lorsque j'arrivais chez elle. Je me souviens d'un jour de forte chaleur où elle avait laissé la porte ouverte : j'ai frappé et je suis entrée. Croyant voir arriver une de mes collègues, elle a lancé un grand bonjour de l'autre bout de la maison. Un bonjour joyeux et chaleureux qui m'a quand même quelque peu déstabilisée : je ne lui connaissais pas une voix si chantante et si charmante.

Pendant une seconde, j'y ai cru mais lorsque son visage s'est tourné vers moi, j'ai bien vu que la naissance d'une longue histoire d'amitié n'était pas pour tout de suite. Ses lèvres se sont pincées et elle m'a lancé un ah, c'est vous, je croyais que c'était votre collègue ! qui m'a fait l'effet d'un uppercut en pleine poire. Reprends-toi, reprends-toi ! Ne te laisse pas décontenancer !, que je me suis dit. J'ai donc continué comme si de rien été, comme si je n'avais rien entendu. J'ai fait mon travail et je suis partie. J'ai décidé ce jour-là de ne pas en faire cas, de ne pas me laisser envahir par des questions qui resteraient sans réponse (Pourquoi se comporte-t-elle comme cela ? Qu'est ce que je lui ai fait ?) parce qu'après tout, il n'y avait sans doute aucune raison. Je ne lui avais pas plu voilà tout, et elle ne cherchait pas plus loin. Elle ne cherchait ni à me connaître davantage ni à laisser sa première impression de côté. J'ai décidé ce jour-là de ne pas me laisser influencer et de rester moi-même. J'ai continué à aller chez elle lorsque c'était mon jour de travail juste pour lui montrer et pour me prouver à moi-même que je n'avais rien à me reprocher.

Pendant une seconde, j'y ai cru mais lorsque son visage s'est tourné vers moi, j'ai bien vu que la naissance d'une longue histoire d'amitié n'était pas pour tout de suite.

Nous entrons chez les gens, nous franchissons les portes et parfois au détour d'un couloir, la magie n'opère pas. Il n'y a pas de lien possible, ce qui est déstabilisant car le lien fait partie de notre métier. Continuer, se remettre en question parfois lorsque cela est nécessaire mais pas systématiquement parce que la première impression n'est pas toujours la meilleure et que, pour celui qui ouvre sa porte comme pour nous, il faut faire l'effort de voir plus loin que la première couche. Certains le font et d'autres non...

Cet article a été publié sur le blog de La Petite infirmière dans la prairie le 19 juin 2018.


Source : infirmiers.com