Petite question par curiosité :
êtes-vous infirmier ?

Merci d'avoir répondu !

AU COEUR DU METIER

Bouger pour prévenir le burnout !

Publié le 22/05/2015
sport gymnastique bouger

sport gymnastique bouger

Les Activités Physiques Adaptées (APA) sont un moyen efficace de prévenir et/ou de lutter contre le Syndrome d'Epuisement Professionnel du Soignant (SEPS). Elles s’inscrivent néanmoins dans un ensemble de prises en charge qui doivent s’accorder autour d’un objectif commun : l’amélioration de la santé et de la qualité de vie des soignants.

Quelques rappels préalables

Parmi les différentes méthodes pouvant aider la personne à diminuer son niveau de SEPS ou empêcher le syndrome de s’installer, l’Activité Physique Adaptée (APA) a fait ses preuves.

Le Syndrome d’Epuisement Professionnel du Soignant (SEPS) (ou Burnout syndrome en anglais) est une réponse à un stress émotionnel et physique chronique au travail. C’est un syndrome à trois dimensions composé d’un épuisement émotionnel et physique, d’une déshumanisation de la relation avec le patient et d’une baisse du sentiment d’accomplissement de soi au travail. L’épuisement professionnel est un syndrome commun à toutes les professions, puisqu’il est le résultat d’un stress chronique ressenti au travail, que l’on peut retrouver dans n’importe quel type de métier. Néanmoins, la déshumanisation de la relation avec autrui a un impact bien plus important dans les professions d’aide et de soutien puisque cette relation est au centre de l’activité des professionnels qui y sont engagés. Ainsi, toutes les personnes partie prenante dans une profession impliquant une relation d’aide ou de soutien envers autrui (médecins, professionnels paramédicaux, assistantes sociales...) sont susceptibles d’être touchées par ce syndrome.

Une symptomatologie plurielle

Les manifestations du SEPS sont diverses et variées. En effet, certains auteurs (Schaufeli et Enzmann, 1998) ont identifiés 132 symptômes possibles, que Colange, Tavani et Soula (2013) ont répartis en 5 catégories de manifestations :

  • émotionnelles (vide émotionnel, sensation de perte de contrôle…) ;
  • physiques (troubles du sommeil, maux de tête, nausées…) ;
  • motivationnelles (perte d’estime de soi, procrastination…) ;
  • interpersonnelles/comportementales (agressivité, impulsivité…) ;
  • cognitives (baisse de productivité, de concentration...).

Une particularité du SEPS qui en fait un syndrome unique en son genre est qu’il est « contagieux ». En effet, l’ambiance qui règne au travail, le phénomène de « grogne » qui peut s’installer au sein d’une équipe, sont susceptibles de conduire un groupe de soignants à progressivement développer un SEPS. Ainsi, une personne atteinte par ce syndrome peut potentiellement le transmettre à l’équipe dont elle fait partie.

Des conséquences délétères pour tous 

Plusieurs études se sont intéressées à la prévalence du SEPS dans la population soignante. Par exemple, l’enquête Européenne SESMAT a évalué 3196 médecins hospitaliers européens sur leur niveau de SEPS. Il est ressorti qu’en moyenne, 23,1% de ces praticiens présentaient un niveau d’atteinte élevé, et que les plus hauts chiffres se trouvaient chez les urgentistes (33%) et les psychiatres (30,9%).

Outre les conséquences sur l’individu, le SEPS a des répercutions socio-économiques et financières. En effet, le Bureau international du travail (BIT) estime que les dépenses entraînées par ce syndrome seraient de plus de 200 milliards de dollars aux Etats-Unis. Ces chiffres montrent bien l’importance du phénomène, et amènent à se poser des questions concernant les moyens de le prévenir et / ou de le guérir.

Les soignants, on le sait, sont très exposés au burnout… et les ressources mises à leur disposition pour le prévenir sont faibles…

L'Activité Physique Adaptée pour prévenir le SEPS

L’amélioration des conditions de travail semble primordiale, puisque c’est à travers l’expérience vécue sur son lieu de travail par le professionnel que va se développer le SEPS. Néanmoins, la modification de ces conditions n’étant pas forcément du ressort de la personne concernée et faisant en général appel à ses supérieurs ou ses collègues, une autre approche s’avère porter ses fruits : celle centrée sur l’individu. Parmi les différentes méthodes pouvant aider la personne à diminuer son niveau de SEPS ou empêcher le syndrome de s’installer, nous allons ici parler de l’Activité Physique Adaptée (APA). Les dernières études s’accordent à dire que toute pratique régulière d’une activité physique va engendrer des effets positifs sur ce syndrome et ses conséquences. Il n’existe donc pas d’activité physique à bannir, à partir du moment où celle-ci est structurée (échauffement, corps de séance et retour au calme) afin d’éviter les blessures, sécurisée (encadrée par un professionnel qualifié) et adaptée aux capacités et à l’état physiologique et psychologique de chaque personne.

Des Français en manque d'activité physique... -

Alors que les bienfaits de la pratique d’une activité physique régulière sur la santé sont unanimement reconnus et scientifiquement démontrés (Inserm, 2008), l’enquête de 2013 des assureurs prévention confirme une insuffisance d’activité des Français. En effet,  80% des adultes de 18 à 64 ans n’atteignent pas l’objectif des 10 000 pas/jour fixé par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), et seulement 51% d’entre eux pratiquent régulièrement une activité physique ou sportive (World Health Organization, 2010). Dans une perspective de santé publique, l’OMS recommande à tous les adultes de pratiquer de façon régulière, une activité physique d’intensité modérée (au moins 150 minutes par semaine) ou intense (75 minutes par semaine), pouvant être fractionnée à différents moments de la journée par périodes d’au moins 10 minutes. Il est néanmoins important de garder à l’esprit que les effets deviennent plus intéressants avec la durée de la pratique (intérêt de l’endurance). Outre ces recommandations générales applicables à tout un chacun, les personnes atteintes de SEPS développent des caractéristiques et des besoins spécifiques qui doivent être pris en compte afin de lutter plus efficacement contre ce syndrome. L’APA s’inscrit alors comme le moyen de répondre à cet objectif.

Un enseignement encadré

Le concept APA a été défini à la fin des années 70 comme un champ de connaissances pluridisciplinaires associant les validations scientifiques des effets produits par le mouvement aux méthodes d'enseignement, de réentraînement, d'éducation ou de réadaptation du professionnel en APA auprès des personnes ayant des besoins spécifiques.  L'APA ne se résume donc pas à la simple adaptation d’une activité physique en termes de règlement ou d’accessibilité, elle est un réel outil de travail qui permet la prise en charge adaptée aux besoins biologiques, psychologiques et sociaux des personnes. L'APA est encadrée par des professionnels que l'on nomme Enseignants en APA (EAPA), dont le rôle est de concevoir, conduire et évaluer des programmes d’enseignement et de ré-entraînement qui valorisent les demandes personnelles et les capacités d’actions et adaptatives des personnes prises en charges (Barbin, 2013). Ces professionnels sont formés à l'Université en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives (STAPS), mention Activités Physiques Adaptées - Santé (APA-S). Ainsi, deux objectifs majeurs guident la pratique d'APA chez les personnes atteintes de SEPS.

Le détachement physique et mental du lieu de travail

La pratique va permettre aux individus de mettre une distance avec leur vie professionnelle et de renouer contact avec les autres. Pour cela, l’activité doit être réalisée dans un cadre extérieur au lieu de travail. Néanmoins, le sport en entreprise n’est pas à bannir même s’il ne permet pas ce détachement physique. De plus, les AP collectives sont conseillées afin de rétablir du lien social en dehors de l’espace professionnel. Par exemple, les sports collectifs (football, basketball, handball, volley-ball...), l’aquagym, la danse, les activités de relaxation de groupe (Taï-Chi Chuan, Yoga...) la marche collective ou encore le fitness sont des activités répondant à cet objectif. L’intérêt est également de retrouver du plaisir dans l’activité. Ainsi, le choix de la pratique revient à la personne et dépend de ses préférences. En outre, être accompagné par des proches peut être un bon moyen de se motiver et de renforcer le côté plaisir de l’activité.

La réduction de la réactivité physiologique et psychologique de la personne aux éléments stressant de son travail

Une étude récente à démontré que l’activité physique permettait de réduire la réponse des personnes face au stress au travail à travers l’amélioration de leur condition physique. Cela permet ainsi de lutter plus efficacement contre l’intrusion d’un stresseur psychosocial (Crews et Landers, 1987). La pratique d’APA vise donc l’amélioration de la condition physique des personnes prises en charge. L’endurance cardiovasculaire, la souplesse ou encore la force musculaire, qui en sont des composantes essentielles, doivent ainsi être augmentées à travers l’intervention. Il en vient au professionnel en APA de répondre à cet objectif à travers les activités qu’il met en place. L’amélioration du sentiment de maîtrise et d'efficacité de la personne permet également de diminuer les réactions face aux éléments stressants du travail. Pour cela, il est nécessaire de s’appuyer sur des exercices de mise en réussite, afin que les pratiquants se rendent compte de ce qu’ils sont capables de faire. Il est ainsi essentiel de favoriser les situations de coopération, d’entraide, dans l’optique d’atteindre un but commun. De ce fait, les activités d’opposition ne correspondent pas à cet objectif et sont donc à éviter.
Si les APA sont un moyen efficace de prévenir et/ou de lutter contre le SEPS, elles s’inscrivent dans un ensemble de prises en charge qui doivent s’accorder autour d’un objectif commun : l’amélioration de la santé et de la qualité de vie des soignants.

L'APA est encadrée par des professionnels que l'on nomme Enseignants en APA (EAPA), dont le rôle est de concevoir, conduire et évaluer des programmes d’enseignement et de ré-entraînement qui valorisent les demandes personnelles et les capacités d’actions et adaptatives des personnes prises en charges.

Références

  • Barbin, J-M (2013). L'enseignant en activité physique adaptée: compétences et activités en soins de suite et de réadaptation. Annals of physical and rehabilitation medicine, 56S, e2-e7
  • Collange J., Tavani J.-L., Soula M.-C. (2013). Regards croisés sur le burn-out : aspects médicaux et psychologiques. Archives des maladies professionnelles et de l’environnement, 74, 35-43.
  • Crews, D.-J., Landers, D.-M. (1987). A meta-analytic review of aerobic fitness and reactivity to psychosocial stressors. Medicine and Sciences in Sport and Exercise, 1987, 114-120.
  • Estryn-Béhar M., Muster D., Doppla M.A., Machet G., Guetarni K., et le COPIL (2009). Influence du travail d’équipe sur la satisfaction professionnelle des médecins. Résultats de l’enquête SESMAT. Le concours médical, 31.
  • INSERM (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale). (2008). Activité physique : contextes et effets sur la santé. Collection Expertise collective, Editions Inserm.
  • Organisation Mondiale de la Santé (OMS). (2010). Recommandations mondiales sur l’activité physique pour la santé, 2010.
  • Schaufeli WB, Enzmann D. (1998). The burnout companion to study and research : a critical analysis. London : Taylor & Francis.

Alizée LACROIX  Perrine MAGRINA  Antoine ROUX  Etudiants en Master 2 de l’UFR Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives (STAPS) de Montpellier, option Activités Physiques Pour la Santé.


Source : infirmiers.com