Hiver 1917, la Grande Guerre n'en finit pas de finir… Les hommes partis au combat, les femmes se mobilisent et des milliers de bénévoles s'engagent aux côtés des infirmières diplômées. Il faut soigner et réconforter les soldats au corps mutilés revenus du front, assister de vieux médecins pour qui la scie est devenue l'ustensile principal, continuer à croire en des jours meilleurs et attendre… La pièce intitulée "...Comme en 14 !" qui se joue actuellement au Théâtre La Bruyère, à Paris, raconte la vie d'une infirmerie juste derrière les lignes de front. A la veille de Noël, quatre femmes et un jeune garçon réunis par les hasards de la guerre, l'espérance chevillée au corps, n'ont qu'un objectif : rester debout malgré le canon qui gronde.
Des femmes, des infirmières, des soignantes, de métier ou par devoir, quand ce n'est pas par obligation… Lors de cette Première Guerre Mondiale, les hommes, les frères, les maris, les fiancés sont partis au combat. Elles doivent donc se mobiliser et s'engager pour soigner ceux qui reviennent du front, malades, meurtris, défigurés, mutilés, mourants… L'infirmière, l'Ange Blanc
qui soigne et réconforte le soldat blessé est une véritable icône de la Première Guerre Mondiale.
En uniforme blanc croisé de rouge, cent mille femmes de tout âge, de tout rang social, de toutes croyances, se dressèrent au pied de cent mille lits ou couchettes, face aux faiseurs de cadavres, et déroulant leurs bandelettes. Emile Bergerat (1845-1923)
Dany Laurent, auteur de cette pièce de théâtre intitulée Comme en 14
rend un vibrant hommage à ces femmes engagées, exemplaires, qui retroussent leurs manches, venues en renfort, bénévoles, pour soigner les malades, accueillir les milliers de blessés. Ces Anges Blancs
ces matinales
qui ont donné de leur temps et toute leur énergie parce qu'il le fallait. C'est le moment de rester debout. A son poste. Sans se poser de question. A son poste
.
C'est la salle la plus dégoûtante, je sais. Que voulez-vous, les amputés c'est jamais très agréable. Estimez-vous heureuse. Parce ce que dans la salle deux, nous avons installé les amputés tuberculeux. Non seulement ils suintent mais ils crachent. C'est la guerre. Marguerite à Louise.
Cette pièce raconte le quotidien de ces femmes dans un hôpital de fortune d'une petite ville près du front alors que la guerre fait rage depuis 3 ans. L'histoire se déroule sur deux journées, la veille et le jour de Noël. Il y a Mademoiselle Marguerite, infirmière de son état, la cinquantaine, revenue de tout, gouailleuse pour mieux masquer sa lassitude à faire tourner la machine
jusqu'à l'épuisement auprès de ses 123 malades ! L'infirmière est épaulée par Susy, bénévole par ailleurs engagée dans les mouvements pacifistes, trentenaire moderne et dynamique, qui ne se résout à rien, et par Louise, jeune bourgeoise de 20 ans qui vient donner son temps et aider comme elle peut en attendant le retour de son fiancé. Il y a aussi Pierre, jeune garçon attardé, fils d'Adrienne, aristocrate de 50 ans, déjà veuve de guerre et dont l'autre fils, Henri, en soins dans cet hôpital, va être amputé dans la journée… Elle aurait dû s'arrêter [la guerre] avant qu'on coupe la jambe d'Henri. Mon mari tué et à présent mon fils amputé. J'étais fière d'offrir mon mari à la Patrie. C'est beau de crâner. Mais le soir le lit reste vide et froid. J'ai pris l'habitude de manger debout. C'est terrible la solitude
, explique Adrienne à Louise.
Je ne comprends pas pourquoi on prend un fusil et qu'on abat comme un chien celui qui est en face. Ça m'est égal qu'il parle une langue que je ne connais pas. Qu'il ait les cheveux blonds ou noirs ou frisés. Je suis pour la paix. La paix. Susy à Adrienne
Alors que le son du canon ne cesse de raisonner, que les blessés gémissent réclamant des soins ou de la morphine, ces quatre femmes de générations et de cultures différentes autour de ce jeune garçon d'autant plus perturbé par l'amputation de son frère, vont se contrarier - patriotisme contre pacifisme - s'épauler, se parler, s'écouter, se tenir chaud, rire, chanter, fumer, pleurer et fêter Noël, comme il se doit, cadeaux à l'appui, parce qu'ici plus encore qu'ailleurs, la flamme de la vie doit briller, vaillamment, pour garder l'espoir. Comme en 14… tous les jours recommencer, certes… mais pour mieux faire mentir l'expression (cf. encadré), sans la guerre ! Car pour tous, c'est la Der, c'est sûr, c'est la Der !
Vois-tu Adrienne, chaque matin que Dieu fait, je me demande lequel de ces pauvres gars va être retrouvé raide sur son lit. Je ne m'habitue pas à la mort. Elle me révolte. Alors est-ce qu'ils n'ont pas un peu raison ceux qui luttent pour que ça s'arrête ? Tu ne dis rien. Tu ne sais pas. Toi non plus. Marguerite à Adrienne
"Et c’est reparti comme en 14 !"
C’est en 1918, à la fin de la guerre, que l’expression c’est reparti comme en 14
entre dans le langage populaire. Elle est alors utilisée dès qu’une tension renaît avec l’Allemagne, ce qui fut le cas dans les années 20 avec l’occupation de la Ruhr puis, évidemment, en 1939, avec le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Cette expression ironique s’emploie alors pour désigner une situation d’enthousiasme, d’entrain alors que les circonstances ne s’y prêtent pas. Elle peut être également employée avec seulement l’idée que ça recommence
.
• Source - Défense.gouv.fr
• ...Comme en 14 !, depuis le 22 janvier 2019, une pièce de Dany Laurent, mise en scène par Yves Pignot, avec Marie Vincent et Virginie Lemoine, Ariane Brousse, Katia Miran et Axel Huet. Théâtre la Bruyère, du mardi au samedi, à 21h ; le samedi en matinée à 15h30
• Livret de la pièce disponible, Editions Les cygnes, théâtre contemporain, 12 €.
Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern
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