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Au cœur de la crise sanitaire, photographiée par des soignants

Publié le 18/09/2020
Au cœur de la crise sanitaire, photographiée par des soignants

Au cœur de la crise sanitaire, photographiée par des soignants

On ne pourra pas toutes les citer, et on en a sans nul doute oubliées dans ce tour d’horizon. Les photographies qui témoignent du plus fort de l’épidémie de Covid-19 ont été mises en valeur par plusieurs établissements hospitaliers ou éditeurs ces derniers mois. A l’initiative de soignants également photographes, ces clichés racontent comment chacun a pris part à l’effort au cœur de cette crise sanitaire sans précédent, du service de ménage au service de réanimation. Voici quelques exemples de séries photographiques devenues essentielles.

Docteur Khaled HABCHI, médecin urgentiste ET photographe (photo) Tous droits réservés Khaled Habchi @karlavicenne

Khaled Habchi, 38 ans, médecin-urgentiste à l'hôpital de Metz-Mercy (en Moselle), mais également photographe professionnel, a pris autour de 7 000 clichés pendant les trois mois les plus intenses de l’épidémie de Coronavirus. Ses photos, réunies dans l’ouvrage Dans l’œil du soignant, montrent de l’intérieur l’immense investissement des professionnels de santé au plus fort de la crise. J’ai toujours un appareil à l’hôpital et il m’a paru évident qu’on vivait quelque chose d’historique, raconte Khaled Habchi. Au fur et à mesure de l’évolution de la crise, j’ai voulu garder une trace de ce qu’on était en train de vivre, alors j’ai shooté : ses photos, particulièrement puissantes, montrent les transferts entre hôpitaux, le travail de ses collègues mais aussi des moments d’attente, d’accalmie, entre deux afflux de patients. C’est compliqué de prendre des photos tout en travaillant. En tant que médecin j’ai effectué un transfert de patients entre Nancy et Bordeaux. Après, j’ai aussi accompagné un transfert, cette fois comme observateur, pour pouvoir figer ces instants.

Soins d'urgence sur le quai avant embarquement à bord d'un TGV - Tous droits réservés - Khaled Habchi @karlavicenne

Ses collègues sont habitués, depuis deux ou trois ans qu’il prend régulièrement des photos, à l’objectif. Ils ne se rendent même plus compte, ça ne les gêne pas du tout, se réjouit Khaled Habchi. Une aubaine pour le photographe, qui parvient ainsi à capter des moments d’une grande intensité. Au départ, c’était vraiment pour nous, pour l’hôpital, pour garder une trace des prises en charge, sans projet de publication. On sentait seulement qu’il se jouait quelque chose. 7 000 photos plus tard, Khaled Habchi avait tellement de matière que sur les conseils de ses collègues, de son chef de service, il décide d’en faire quelque chose. On s’est tourné vers la Banque Populaire qui fait des mécénats. Le livre Dans l’œil du soignant sera alors édité et distribué dans un premier temps dans les hôpitaux. Nous allions, en tant que médecins, soignants, dans des endroits auxquels le grand public et les journalistes n’avaient pas accès. Ça aurait été égoïste de garder ce travail pour nous. Il fallait montrer ce moment qui avait mobilisé différentes forces, armée, SNCF…

Transfert de patients vers l'Allemagne grâce aux hélicoptères de l'armée (de face Docteur Braun) Tous droits réservés - Khaled Habchi @karlavicenne

On sent beaucoup d’émotion a postériori. Sur le coup, on ne se rendait pas compte de ce qui se passait. On voyait seulement se déployer cette débauche de moyens et cet engagement extraordinaire - Khaled Habchi

Avant le coma artificiel - Tous droits réservés - Khaled Habchi @karlavicenne

Khaled Habchi retravaille 700 clichés pour en garder finalement une soixantaine. Ses collègues, mais aussi des non-soignants l’ont aidé à opérer cette sélection. J’avais tellement vu les photos, que j’avais besoin d’un regard extérieur, explique-t-il. Deux critères ont déterminé son choix : des critères esthétiques bien sûr, sourit le photographe, et puis l’impact de la photo en elle-même. Sans surprise, le retour des soignants sur son livre est très positif. On sent beaucoup d’émotion a postériori. Sur le coup, on ne se rendait pas compte de ce qui se passait. On voyait seulement se déployer cette débauche de moyens et cet engagement extraordinaire. Certains n’ont pas participé aux transferts et le fait de voir ce travail, d’être impliqués même indirectement à travers ces clichés, les a touchés. Ces photos permettent de conserver une trace, un témoignage de ce moment si particulier.

De ce moment inédit, de la crise du covid Khaled Habchi garde surtout de l’admiration face à cette implication totale, de tous. Evoquant des clichés publiés par la presse au moment de l’épidémie, qui montraient beaucoup de soignants désœuvrés, avec des marques de masque, épuisés ou en pleurs, le médecin affirme ne pas du tout retenir cette image, mais bien celle d’une implication sans limite. Ce que je garde avant tout, c’est la motivation, l’engagement et la fierté des soignants. Ils étaient heureux de retourner au travail...  C’est ce que j’ai voulu montrer à travers mes images. La photo de couverture de l’ouvrage illustre bien le regard du médecin : on y voit le regard d’une infirmière des urgences qui sourit sous son masque. Je ne voulais pas montrer un cliché triste. Il y a eu des moments difficiles bien sûr, mais pas d’accablement ni de désespoir. Pour l’heure, le livre reste (hélas pour le grand public) uniquement dédié aux soignants, mais les photographies de Khaled Habchi feront l’objet d’une exposition le mois de mars prochain.

Certains (soignants) n’ont pas participé aux transferts et le fait de voir ce travail, d’être impliqués même indirectement à travers ces clichés, les a touchés. Ces photos permettent de conserver une trace, un témoignage de ce moment si particulier - Khaled Habchi

Portraits de soignants engagés dans la crise

Une infirmière auprès d’un malade du Covid qui vient de sortir de son coma artificiel. Crédit photo: Vanessa Braunstedter.

Infirmière et photographe, Vanessa Braunstedter a également sorti son appareil photo pendant l’épidémie pour immortaliser les expressions de ses collègues d’un centre de dialyse mulhousien (dans le Haut-Rhin).

J’ai sorti mon appareil un soir à la fin d’une de mes journées en dialyse où j’exerce encore une seule journée par semaine à Mulhouse étant donné ma reconversion en tant que photographe, explique la jeune femme. Le projet a donc commencé avec mes collègues. J’ai voulu ensuite poursuivre à l’hôpital de Mulhouse, là où la crise du Covid a commencé en France. Je me suis rendue dans divers services, à la rencontre des soignants. Je voulais mettre en lumière le métier que je suis en train d’abandonner. Celui pour lequel j’étais passionnée au début il y a 16 ans. Je voulais rendre hommage à ceux qui ont la force de tenir encore malgré nos conditions de travail difficiles. Maintenant je prends à nouveau soin des gens mais derrière l’objectif. A l’hôpital, ce n’est plus vraiment le cas..., regrette-t-elle.

Une infirmière auprès d’un malade du Covid qui vient de sortir de son coma artificiel. Crédit photo: Vanessa Braunstedter.

J’ai shooté les urgences, la réanimation, la stérilisation, la gériatrie et même la cuisine et la lingerie. C’est ce que raconte à son tour Johan Whychowalek, aide-soignant à l’hôpital d’Helfaut (dans le Pas-de-Calais). Pendant la crise du Covid-19, ce professionnel de la santé et passionné de photographie s’emploie à prendre les différents services de l’hôpital pour rendre hommage à ses collègues soignants.

Toutes ces images, qui témoignent d’un moment très particulier dans notre histoire, permettent aujourd’hui au grand public comme aux soignants de garder le souvenir de cette épidémie, de l’intérieur.

Susie BOURQUINJournaliste susie.bourquin@infirmiers.com @SusieBourquin


Source : infirmiers.com