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Agnès Buzyn dévoile son "pacte pour une refondation des urgences" pour "régler la crise"

Publié le 09/09/2019
infirmière course urgences

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urgences mesures crise

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Les annonces de la ministre des Solidarités et de la Santé suffiront-elles à calmer la colère et à résoudre le problème épineux des urgences ? Après six mois de crise, Agnès Buzyn a dévoilé ce lundi 9 septembre son "Pacte pour une refondation des urgences", alors même que 249 services étaient en grève - tout en continuant d'assurer les soins - vendredi 6 septembre, selon le Collectif Inter-urgences. La ministre avait annoncé un "plan d'action" avec un "budget dédié" de façon à régler la crise "sur le long terme". Après une première salve de mesures  dévoilées la semaine dernière par Agnès Buzyn (mesures issues des premières recommandations de Pierre Carli, chef du Samu de Paris, et Thomas Mesnier, député LREM, dans le cadre de la mission qui leur a été confiée en juin), visant à améliorer la situation et déjà accueillies avec "inquiétude" par les professionnels de terrain, voici donc la seconde série d'annonces très attendues, soit 12 mesures pour en finir avec la crise. On fait le point sur ces mesures et sur les réactions  qu'elles suscitent.

L’Ordre des infirmiers se réjouit que les pouvoirs publics semblent enfin mieux considérer les savoir-faire et les connaissances cliniques de la première profession de santé en France.

Ses premières propositions n'avaient pas suffit à convaincre. Dans une Tribune publiée le 8 septembre, médecins hospitaliers et personnels soignants répondaient point par point aux mesures avancées par la ministre qui selon eux, révélaient "au mieux une méconnaissance du problème".  

Cette fois, la primeur de ces annonces était réservée aux représentants des personnels et dirigeants hospitaliers, ainsi que les syndicats de médecins libéraux et le collectif Inter-urgences, collectif de paramédicaux à l'origine, rappelons-le, de ce mouvement social inédit et devenu un interlocuteur de poids dans les débats, avant d'être dévoilée au grand public.

Il y aura un budget dédié pour régler la crise des urgences, avait assuré Agnès Buzyn, dimanche 8 septembre, dans l'émission "Questions politiques" (France Inter-Franceinfo-Le Monde), promettant de "mettre de l'argent dans des solutions qui vont régler le problème sur le long terme". La ministre des Solidarités et de la Santé, avec une heure de retard sur le programme annoncé, a donc décliné ses "12 mesures pour une refondation des urgences" ; 12 mesures qui, nous l'espérons, ne s'apparenteront pas au "12 travaux d'Hercule" ! Son pacte de refondation représente 754 millions d’euros de moyens supplémentaires engagés sur
la période 2019/2022 au bénéfice des services d’urgences, de leurs personnels, des établissements de santé et des acteurs de ville. Pour l’année 2020, cela représente des crédits supplémentaires de 150 millions d’euros.

Comme la ministre l'a rappelé, le nombre de passage aux urgences à doublé en 20 ans, soit 21 millions en 2017. Malgré leur engagement sans faille, les professionnels souffrent eux-mêmes de ne pouvoir garantir en permanence, sous cet afflux, la qualité d’accueil et de prise en charge à laquelle ils sont attachés. Pour permettre aux services d'urgences de se concentrer sur l'urgence vraie - c'est-à-dire sur les cas les plus lourds - nous reverrons les modes de financement pour mieux reconnaître la complexité et l'exigence de cet immense service rendu à la population, a souligné Agnès Buzyn.

Voici les principales mesures annoncées :

  • Parce qu'environ 3 % des patients accueillis aux urgences pourraient être pris en charge dans un cabinet médical, d’ici l’été 2020, le SAS - Service d'accès aux soins (SAS), répondra à toute heure et en tout lieu à la demande de soins (consultations sans rendez-vous, coopération renforcée entre les professionnels de santé) et permettra d’obtenir un conseil médical et paramédical et de prendre rendez-vous avec un médecin généraliste dans les 24 heures afin de disposer d'un conseil, d'une télé-consultation, voire d'une orientation vers la structure de soins la plus adaptée (hospitalière ou libérale).
  • Il est nécessaire de structurer les soins sans rendez-vous en ville à partir des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Pour ce faire, il y a nécessité de déployer progressivement 3 500 assistants médicaux. 50 maisons médicales de grade seront mises en place notamment adns les territoires où les urgences hospitalières sont saturées.
  • Il faut donner à la médecine de ville les mêmes outils de prise en charge que les urgences et que les patients bénéficient des mêmes prestations : par exemple permettre au SAMU de solliciter un transport sanitaire pour conduire un patient à un rendez-vous en libéral, pas d'avance de frais (tiers payant) et pouvoir faire des bilans biologiques dans un cabinet de médecine libérale.
  • Elargir les compétences des professionnels de santé non médecins : dispensation sans ordonnance par les pharmaciens de médicaments, adaptation de traitements par les infirmiers, autorisation de protocoles de coopération nationaux dans un cadre simplifié... autant de protocoles de coopération déjà validés ou en passe de l'être.
  • Renforcer et reconnaître les compétences des professionnels des urgences : dès le mois d’octobre, les infirmiers auront la possibilité de demander eux-mêmes des examens d’imagerie pour des patients atteints de traumatismes de membres, par un protocole de coopération, d'effectuer des sutures (80 € net sur protocole) ou de pratiquer des immobilisations (plâtres par exemple). Création des IPA "Urgences" avec salaire adapté (pour l'instant pas de grille annoncée y compris pour les IPA qui viennent d'obtenir leur master). Reconnaissance des compétences des paramédicaux - notamment les plus anciens - avec une concertation dans les deux mois sur la graduation des soins.
  • La tarification actuelle des services d'urgence va être revue (forfaitisée) pour mieux reconnaître les services rendus à la population sur chaque territoire. Cela figurera dans le PLFSS 2020.
  • La sécurité des services d'urgence sera renforcée par la possibilité donnée aux chefs d'établissement de porter plainte lors d'une agression d'un de ses personnels au nom de l'institution. Cette question nécessitera un plan spécifqiue.
  • Il est nécessaire également que les GHT organisent la réponse aux besoins de lits pour les hospitalisations non programmées, notamment depuis les services d’urgence. Dès 2020, chaque GHT mettra en place un dispositif de gestion des lits avec du personnel dédié.

Pour la ministre, en appui avec les deux rapporteurs de la mission, les fondamentaux sont donc là. Sans délai, la situation des urgences exigeait d’apporter aux professionnels des urgences une reconnaissance salariale supplémentaire de leur engagement quotidien dans ce contexte difficile. La ministre avait déjà assuré en juin dernier à l’ensemble des parties prenantes de son engagement à la fois à trouver des solutions rapides et concrètes pour soutenir les professionnels des services d’urgences, et définir avec eux un nouveau modèle d’organisation des services d’urgences, parce que chacun détient sa part de solution. Et de conclure, parce qu’il importe avant tout d’apporter aux Français la traduction concrète et rapide de ces avancées, je demande à chaque agence régionale de santé, en partant des propositions des professionnels et en associant les élus locaux et les usagers, de veiller à ce que soit apportée dans les faits, la réponse adaptée aux enjeux spécifiques de chaque territoire et de chaque établissement.

80% de ces moyens supplémentaires (plus de 630 M€) financeront des renforts, en ville comme à l’hôpital, de médecins et de soignants, dont la création du service d’accès aux soins représente la moitié. 

Agnès Buzyn l'a souligné, des travaux complémentaires vont être engagés dans les prochains jours et jusqu’au mois de novembre 2019, avec toutes les parties prenantes, pour affiner les mesures et notamment préciser : l’organisation du service d’accès aux soins (SAS), la gradation des structures d’urgence et  la réforme des transports soignants urgents. Afin de mener ces dossiers, la mission du député Thomas Mesnier et du professeur Pierre Carli évoluera pour permettre la participation de l’ensemble des professionnels et notamment, des libéraux.

Les premières réactions

L'Ordre national des infirmiers  

Par communiqué de presse l'Ordre national des infirmiers (ONI), par la voix de son Président Patrick Chamboredon, fait savoir son point de vue et se réjouit de la place et du rôle accordés à la profession infirmière pour palier la crise aux urgences. Les 12 mesures annoncées dans ce nouveau Plan de refondation des urgences présenté aujourd’hui traduisent bien le fait que la problématique des urgences est plurielle et nécessite des solutions qui portent à la fois sur les moyens alloués, mais aussi sur l’organisation des soins, avec de nouvelles répartitions des missions entre professionnels de santé. La 4e mesure de ce Plan consiste à "Offrir aux professionnels non médecins des compétences élargies pour prendre directement en charge les patients". Madame la Ministre confirme ainsi sa volonté de donner la possibilité aux infirmiers de réaliser de nouveaux actes de soins ou de prescription pour lesquels ils sont parfaitement formés mais qu’ils n’avaient pas le droit de réaliser jusqu’à maintenant. Afin d’encourager la mise en place de nouveaux modes d’organisation, le financement d’expérimentations sera facilité : là aussi les infirmiers ont un rôle à jouer ! La création de la mention "urgences" au nouveau métier d’infirmier de pratique avancée permettra dès 2022 aux professionnels nouvellement formés d’assurer un rôle essentiel, dont les contours précis restent à définir, au sein des services d’urgences hospitalières. Madame la Ministre de la Santé et des Solidarités appelle aussi de ses vœux le développement des Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS) , structures qui reposent l’interdisciplinarité au sein desquelles les infirmiers ont un rôle majeur à jouer, notamment dès la création. Le fait de s’appuyer sur les compétences des infirmiers pour apporter des solutions à un enjeu de santé publique est suffisamment rare pour être souligné. Dans plusieurs pays étrangers, notamment outre-manche, des responsabilités élargies ont été confiées aux infirmiers, ou à certains d’entre-eux suite à une formation complémentaire, et ce, depuis plusieurs décennies. La France accuse un retard significatif en la matière. L’Ordre des infirmiers se réjouit que les pouvoirs publics semblent enfin mieux considérer les savoir-faire et les connaissances cliniques de la première profession de santé en France. Continuons sur cette voie !

La Fédération nationale des infirmiers

Par communiqué de presse du 9 septembre 2019, le syndical d'IDEL réagit : L’adaptation de traitements par les infirmiers libéraux contenue dans la mesure 4, et portée par la FNI de longue date, est actée dans le pacte de refondation présenté ce jour. Cette mesure vise à permettre une prise en charge directe par des professionnels de santé libéraux non médecins dotés de compétences nouvelles dans un cadre élargi. Elle permettra la prise en charge directe par les infirmiers de patients atteints de pathologies simples. Pour la FNI, cette mesure, couplée aux autres, constitue une mesure structurelle qui peut agir en amont et en aval des services d’urgences pour pallier l’engorgement de ces services. Elle est de nature à peser sur le « consumérisme hospitalier » des patients et participera, de notre point de vue, en partie, à la résolution de la crise que traversent ces services. La FNI rappelle que les compétences des 118 000 infirmières et infirmiers libéraux qui soignent chaque jour, à leur domicile, des millions d’assurés sont aujourd’hui insuffisamment exploitées. En conséquence, la FNI considère que ces dispositions doivent être étendues à tous les infirmiers exerçant en coordination clinique de proximité avec les médecins généralistes dans les équipes de soins primaires. Elles ne doivent surtout pas se limiter aux professionnels intégrés dans des maisons de santé pluri professionnelles de type SISA. C’est à cette seule condition que les mesures annoncées pèseront efficacement sur l’organisation du système de santé et produiront les effets escomptés.

La Coordination nationale infirmière

Par communiqué en date du 10 septembre, la CNI déploie, elle aussi, ses arguments et son avis sur ces 12 mesures annoncées. Nous soutenons le collectif inter-urgences national et appellons les soignants à se mobiliser face à l’absence de réponses adaptées du gouvernement devant une crise majeure qui touche, au-delà des services d’urgences, tout le système de santé en France. Les annonces de Mme Buzyn ne verront leurs effets bénéfiques que dans 5 à 10 ans et ne répondent pas à l’urgence de la situation d’aujourd’hui. Les renforts en effectif promis ne seront en fait destinés qu’à mettre en oeuvre un logiciel de gestion de lits. Les protocoles nationaux de coopération ne feront qu’ajouter une charge de travail à celle que les professionnels de santé dénoncent. Elargir le champ de compétence infirmier, oui, mais revoyons le décret de compétence au lieu de saupoudrer des protocoles dès que les tensions deviennent trop grandes ! Et qu’en est-il des aides-soignants et des ASH ? Il n’en est nul question dans ces propositions. Augmenter la charge infirmière déjà trop lourde aura obligatoirement un impact sur ces agents eux aussi en souffrance. Le Syndicat CNI exige des moyens immédiats pour redonner de l’attractivité à nos métiers et notamment : l’arrêt des fermetures de lits et la réouverture de lits d’aval, l’attribution de fonds permettant aux établissements de soins la mise en place d’effectifs proportionnels aux charges de travail, des augmentations de salaires pour tous les professionnels de santé au regard de leurs compétences et responsabilités, le dégel de la valeur du point indice. Le gouvernement doit assumer ses responsabilités et revoir sa copie sans délai pour garantir la sécurité de ses agents et de tous les français avant que les drames ne se multiplient !

La Fédération hospitalière de France

La crise des urgences est le miroir grossissant des difficultés que devait résoudre le plan de transformation du système de santé. Les mesures proposées par la Ministre constituent enfin une première avancée mais il va lui falloir du courage politique pour une mise en œuvre efficace, notamment concernant "le service d'accès aux soins" dont les modalités concrètes restent à définir explique Frédéric Valletoux, Président de la FHF.

La Société Française de Médecine d’Urgence (SFMU)

Par communiqué de presse, la SFMU est satisfaite des solutions proposées en amont et en aval des Urgences notamment en ce qui concerne l’optimisation de l’admission en aval des urgences, l’admission directe dans les services des personnes âgées. Une autre mesure phare concerne le développement des infirmiers en pratiques avancées (IPA) en médecine d’urgence. La SFMU se positionne en faveur des protocoles de coopérations (prescription d'imagerie, sutures de plaies entre autres) et de la création de postes d’infirmiers en pratiques avancées (IPA) en médecine d’urgence. Les mesures annoncées aujourd’hui sont des mesures ambitieuses qui vont dans le bon sens et sont la preuve d’une volonté de faire une réforme en profondeur. Cependant les propositions restent à approfondir, explique Agnès Ricard-Hibon, Présidente de la SFMU.

Pour désaturer les urgences, Valérie Pécresse veut, de son côté, expérimenter un "Samu infirmier" en Île-de-France. L’expérimentation permettrait à des infirmières de se déplacer à domicile avec des prérogatives élargies... Il faudrait qu'elle se renseigne sur l'existant !

Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern


Source : infirmiers.com