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PSYCHIATRIE

Accompagner le changement en psychiatrie par l'art

Publié le 04/06/2015
les déménageurs chaloupés

les déménageurs chaloupés

Les images montrent des danseurs bariolés portant un casque de chantier, des installations de boîtes de médicaments figurant des bâtiments anciens et nouveaux. Que se passe-t-il à l’Etablissement Public de Santé Mentale (EPSM) de l'agglomération lilloise ? En 2013, un transfert est programmé. 100 patients et 100 soignants ont alors quitté l’établissement de santé historique de Lommelet pour les édifices flambant neuf des nouvelles cliniques. Pour les accompagner dans ce grand bouleversement, l'EPSM a convoqué des guides d'un style peu particulier : un collectif d’artistes « Les déménageurs chaloupés ».

Crédit photo : EPSM de l'agglomération lilloise -  À l'EPSM de l'agglomération lilloise, le déménagement a fait l'objet d'un projet artistique mis en place par un collectif d'artistes : les « déménageurs chaloupés ».

Le projet s’est concentré sur les installations exposées lors de l’inauguration et sur les repères, les mini-créations conçues par les artistes, les patients et les services durant les six semaines de résidence précédant l'achèvement des travaux1. Ces créations, baptisées « cafés mobiles » montraient l’avancée d’un chantier présenté sous un jour nouveau, totalement imprévisible, très esthétique et participatif.

Les patients, les riverains et lillois ont adhéré. Les « petits cafés mobiles », les visites-déambulations ont été l’occasion de rencontres émouvantes et de questionnements sur l’effet « miroir » procuré par la forme artistique. Point d’orgue, les « traces » où se répondaient visites artistiques et visites par les soignants qui ont attiré plus de 500 personnes, toutes populations confondues, le 22 novembre 2013, jour de l’inauguration.

Les bienfaits de l’art

L’art et ses vertus déstigmatisantes ont aidé à voir autrement la maladie mentale et la psychiatrie. Quant aux artistes, ils ont été sensibilisés à la souffrance psychique, et ont su aider les publics à surmonter les barrières des préjugés. Cette expérience continue à nourrir leur travail et se retrouve dans leur parcours artistique actuel. De leur côté, les patients ont aimé cette porte ouverte sur la ville et pu apprécier l’intérêt cordial et bienveillant qu’ils suscitaient auprès du voisinage.

Ce que j’ai préféré dans le projet est le regard artistique sur les symboles de la psychiatrie, l'approche dans les services, et l'évolution de pensée des soignants pour que les artistes rentrent dans les unités. Ce projet m’a fait découvrir (…) la complexité de notre fonctionnement (sigles, lourdeur administrative) qui semblait compliquée pour les intervenants d'où notre langage peut être trop professionnel et peu adapté aux patients. C’est donc très positif. témoigne Régis Legrand, Cadre de santé, UPG 59g23.

Ce projet fait partie des nombreux projets que nous menons depuis des années. Il a permis de conforter notre idée de continuer à travailler la déstigmatisation de la psychiatrie. En ce sens, ce bel hôpital qui ne se cache plus derrière ses murs et la communication qui a été faite (...) ont permis d'éclairer un peu plus le travail réalisé aujourd'hui en psychiatrie. Les personnes étrangères à la psychiatrie, qui ont participé, par exemple, à l'inauguration, ont été impressionnées par le « coup de pied » donné dans les idées reçues quelles avaient de la prise en charge de la psychiatrie mais également par la modernité de cette inauguration proposée par les « déménageurs chaloupés » se réjouit Didier Mahé, responsable de la filière socio-éducative et membre de la commission culture.

Le collectif des « déménageurs chaloupés » était composé de Bérénice Legrand, Sandrine Becquet, Antoine d’Heygere, Delbi, et les Saprophytes. Ces artistes de notoriété régionale ont travaillé sur un projet commun alors qu’ils ne se connaissaient pas entre eux, ne savaient rien du fonctionnement d’un hôpital psychiatrique et encore moins du fonctionnement des services et les problématiques très concrètes liées à l’accès d’un chantier. Pourtant, ils ont réussi le défi d’intervenir avec légèreté et bonheur dans un univers douloureux, d’être des vecteurs de rassemblement et d’humanité. Et ce n’est pas le moindre de leur succès.

Un rapprochement pérenne

Le monde de la santé et du spectacle, finalement pas si éloignés dans leur désir d’attention à l’autre, ont décidé de poursuivre leur rapprochement en une phase II. Seconde preuve de la réussite de l’entreprise, la collaboration artistique continue avec Anoine d’Heyger, vidéaste, qui tourne actuellement « A l’Ouest ». Il s’agit d’un documentaire sur la vie de la cité, auquel participent les riverains et les habitants. Le thème central est la frontière : Intérieur & extérieur, Moi & les autres, habitants & riverains de l'EPSM, patients & soignants... Un film à la fois très documentaire (le mot, enquête et interviews) et très poétique (le geste, la danse et l'esthétique)2.

Une belle « Fenêtre sur l'art »

Cette intervention artistique a été sélectionnée dans le cadre de l'opération Fenêtre sur l’art. Une fois par mois, Réseau CHU ouvre une fenêtre sur une initiative artistique en territoire de santé. Chacune témoigne de l'impact positif des projets culturels dans les soins apportés aux personnes en souffrance/usagers/patients. Ces fenêtres éclairent la notion partagée et citoyenne du "prendre soin" menée par les établissements de santé.

Fenêtre sur l’Art est le fruit d'un partenariat culturel 2015-2016 conclu entre Réseau CHU et la Commission culture des CHU et CHS présidée par Yann Bubien, directeur général du CHU d’Angers. Pour retenir 12 projets parmi les 37 reçus de 21 établissements en réponse à l’appel à candidatures envoyé le 10 octobre 2014, un jury s’est réuni le 10 janvier 2015 et a établi une sélection rigoureuse en fonction des critères suivants :

  • le professionnalisme des intervenants artistiques et culturels ;
  • la notion partenariale des projets ;
  • la contextualisation des actions culturelles ;
  • la dimension innovante des projets.

Le jury présidé par Yann Bubien était composé de

et du groupe Communication de la Commission Culture :

Cet article a été publié le 28 mai 2015 par Réseau CHU que nous remercions de cet échange.

Notes

  1. Une semaine par mois durant six mois.
  2. Projection en avant-première dans le cadre du Festival Latitudes mentales de 19 mai au 29 juin 2015, au centre culturel du site de Saint-André-lez-Lille.

Maud PIONTEK  EPSM Agglomération Lilloisehttp://www.epsm-al.fr maud.piontek@epsm-al.fr


Source : infirmiers.com