Kaëlig Delaunay est étudiant en 3e année à l'IFSI Guillaume Régnier de Rennes. Il a réalisé son 3e stage de 2e année dans un hôpital général vietnamien. Il décrit un parcours préparatoire plutôt fastidieux :« Je me suis d’abord adressé à l'association Missions Stages. Une fois le projet construit en cohérence avec mon projet professionnel, la direction de l'IFSI a décidé de m’accorder le stage. C'est cet accord qui assure le cadre administratif et l'équivalence franco-vietnamienne. Il y avait donc tout un volet culturel, professionnel et financier à compléter pour obtenir l’aval de la direction. C’est seulement une fois ce feu vert obtenu, qu’il est possible d’entamer les vraies démarches avec l'association, d’obtenir la convention de stage et l'affectation dans les services. Nous nous y sommes pris une année en avance et sommes partis à quatre étudiants de ma promotion. Pour des raisons évidentes de sécurité, l’IFSI ne laisse pas un étudiant partir seul dans un pays étranger.»
Je regrette que nous soyons restreints par notre direction et que n’ayons pas du tout accès au programme Erasmus+ de l'université
L’incontournable volet financier
Les quatre étudiants ont pris en charge eux-mêmes leur voyage en fondant une association. Pendant une année, ils ont mis en place des actions et des projets dans l’objectif de récolter des fonds. « Je vous avoue qu’en tant qu'étudiant infirmier, cette association nous a été indispensable pour alléger le coût du voyage et ne pas rater cette opportunité. Je regrette que nous soyons restreints par notre direction et que n’ayons pas du tout accès au programme Erasmus+ de l'université, déplore Kaëlig Delaunay. Tout cela est très IFSI-dépendant. Certaines universités intègrent le dispositif, d'autre non. Lorsque l’on dépend de grosses universités comme Lyon, Marseille, c'est sans doute plus simple que lorsque l’on fait partie d’un IFSI breton de 80 étudiants. Mais je ne vois, pour le moment, aucune politique nationale d’envergure sur le sujet ».
La charte Erasmus+ pour l'enseignement supérieur (ECHE) permet aux établissements de formation de l'enseignement supérieur de proposer le programme à leurs étudiants. Elle est valable pour une période renouvelable de 6 ans et s’échelonne de 2021à 2027. Une fois la charte signée, les établissements de formation peuvent démarcher d'autres établissements telles que des universités étrangères, et établir des conventions de partenariats en vue de mettre en place le dispositif d’échange d'étudiants.
La charte va naturellement impliquer que les établissements de formation mettent à disposition des moyens humains dans le but d’accompagner les étudiants dans leurs projets de voyage.
Accès aux services universitaires
A l’heure actuelle, sur les 337 IFSI français, il n’y en a que 128 qui sont signataires de la charte Erasmus+.
A côté de cela, l’ensemble les universités françaises sont signataires et, de ce fait, les IFSI en étant rattachés à une université, pourraient potentiellement tous proposer le dispositif à leurs étudiants. « Ceci met en exergue une problématique plus profonde, pointe Valentin Vallée, étudiant en 3e année à l'IFSI Foch de Suresnes et vice-président en charge des affaires internationales et de la transition écologique à la FNESI. Il s’agit du difficile accès, pour les étudiants en IFSI, aux services universitaires. La mobilité internationale en fait partie. La solution serait que cette intégration universitaire soit pleine et entière afin que les étudiants infirmiers aient accès aux mêmes services que les étudiants des universités. »
Il arrive que les universités, qui en ont pourtant le devoir, ne gèrent pas les dossiers de mobilité internationale des étudiants en sciences infirmières. Et en plus, si les IFSI ne sont pas signataires de la charte, les ressources humaines, ne seront pas déployées pour aider les étudiants à partir à l’étranger… et ces derniers n’auront tout simplement pas accès au programme Erasmus+.
Ceci explique peut-être pourquoi aujourd’hui, les étudiants en santé qui représentent plus de 12 % des étudiants français, sont seulement 2 % à partir avec Erasmus+.
L’importance du contrat pédagogique
Pour les étudiants chanceux qui bénéficient de cette mobilité il faut, pour renforcer le bon déroulé du voyage, un contrat pédagogique doit être passé en amont par les 3 parties, c’est-à-dire par l'université d'accueil (ou l’établissement de santé d’accueil), l’établissement de formation actuel de l'étudiant et l'étudiant lui-même. Ceci afin que ce dernier soit certain avant son départ, des unités d'enseignements (UE) qui seront validées lors du séjour à l’étranger. « Ce contrat pédagogique est obligatoire et la FNESI le pousse fortement. En effet, certains étudiants se sont vu refuser la validation de certaines UE et leurs ECTS associés à leur retour. La formation n’étant pas jugée équivalente par le IFSI en question, ces étudiants ont été obligés de revalider les UE voire de redoubler à cause de ce manque de visibilité et de transparence avant le départ », rapporte Valentin Vallée.
Mobilité académique et mobilité en stage
Le programme Erasmus+ offre la possibilité, dans le cadre de la mobilité dite « académique », de se former à l’étranger pendant 2 à 6 mois et d’y poursuivre sa licence, son master ou son doctorat. Moins connue, la mobilité en stage est pourtant beaucoup plus employée par les étudiants en sciences infirmières. Elle est actuellement privilégiée en raison de sa plus grande facilité de mise en œuvre. Bien que les champs de compétence puissent être légèrement différents d'un pays à l’autre, les soins seront plus ou moins équivalents. En revanche, la formation académique peut, elle, être complètement différente, sans forcément qu’il y ait d’équivalences. D'où l'importance du contrat pédagogique pour que cette expérience se passe dans les meilleures conditions et permette, en plus d'ouvrir son esprit, de découvrir une nouvelle culture, une nouvelle langue et de nouvelles pratiques professionnelles.
Depuis longtemps maintenant, et c'est même bien installé, ont émergé des mesures palliatives pour ces étudiants n’ayant pas accès à Erasmus+. Certains établissements de formation établissent ainsi des conventionnements avec des universités ou des établissements de santé internationaux par leurs propres moyens, en dehors du programme. Il arrive aussi qu'un groupe d'étudiants monte le projet de A à Z et établisse une convention entre l’établissement de formation et l'université d'accueil, pour un stage humanitaire ou un stage en établissement de santé. Néanmoins, cette option n'offre pas toujours une reconnaissance du stage et une validation d'ECTS à cause du manque de contrats pédagogiques. Elle présente également le désavantage d'être très chronophage dans une formation déjà dense.
- Le dispositif Erasmus+ concerne 33 pays européens et d’autres pays associés. Des bourses sont proposées en fonction du pays choisi.
- Consulter la liste des pays participants : https://info.erasmusplus.fr/erasmus/104-quels-sont-les-pays-participants.html
- Le Crous propose certaines aides financières.
- Certaines régions ou certains départements aident au financement des voyages Erasmus+.
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