Petite question par curiosité :
êtes-vous infirmier ?

Merci d'avoir répondu !

RECHERCHE

Risques psychosociaux chez les jeunes infirmiers diplômés : comment agir ?

Publié le 16/10/2018

Antoine Jourdan est un jeune infirmier diplômé en 2017. Ancien vice-président de la Fnesi*, il a soutenu son mémoire finalisant son Diplôme universitaire de prévention des risques psychosociaux en pratique soignante (année 2017-2018) à l'université Paris Sud. Pour étayer ce travail, une enquête en ligne sur le bien-être des jeunes diplômés, réalisée notamment via les réseaux sociaux d'infirmiers.com avec quelque 855 répondants, lui a permis d’évaluer leurs perceptions sur leur santé physique, psychologique et leur vécu. Son questionnaire visant également à récolter des avis en terme d’actions à mettre en place dans les services de soins. Il a souhaité partager ce travail avec la communauté soignante d'infirmiers.com et nous l'en remercions.

Ce qui fait le terreau de l’épuisement professionnel c’est le conflit éthique, lorsque le soignant estime de pas respecter ses valeurs professionnelles

Voici comment il argumente son travail de recherche. Mon exercice professionnel est riche d’apprentissages. Je continue à identifier et à observer un important mal-être chez les soignants au sein des services où je suis infirmier intérimaire. Une expérience professionnelle au sein d’un Samu social m’a notamment conduit à vivre des situations qui ont altéré ma santé psychologique. Cette première année en tant que professionnel m’a fait prendre conscience que je ne respectais pas mes valeurs professionnelles et que le manque de moyens altère la qualité des soins que je prodigue aux patients.

Grâce à de précédentes enquêtes, nous pouvons affirmer que les études en soins infirmiers sont vectrices de risques psychosociaux. (cf. enquête Fnesi , sept. 2017). Nous pouvons donc supposer que les néo-diplômés arrivent dans la profession en état d'altération de leur bien-être. Parce que les risques psychosociaux sont présents dans tous les secteurs de soins et afin de faire du lien avec ma pratique de jeune diplômé infirmier, le choix de mon travail porte sur la santé des professionnels infirmiers de moins de trois ans d'exercice et sur les facteurs qui les exposent aux risques psychosociaux . Dans la mesure ou la prévention vise à agir sur un problème de santé publique avant son apparition , en quoi et comment est-il essentiel de mener des actions collectives et individuelles dès le début de l'exercice professionnel ? La question centrale de ce travail porte donc sur les leviers d’action que nous pouvons mener pour la prise en charge des risques psychosociaux visant les jeunes professionnels infirmiers.

Les jeunes professionnels IDE sont 16,2% à estimer avoir déjà fait un burn-out depuis le début de leur exercice et sont 4,6% à estimer l’être au moment de la réponse au questionnaire.

Les données obtenues grâce au questionnaire nous permettent de répondre à la question de recherche de ce travail et semblent en adéquation avec les éléments théoriques développés. Les jeunes diplômés sont touchés par les risques psychosociaux et leur santé semble altérée par leurs conditions de travail. En croisant les données relatives à la perception de leur santé, à leurs comportements et à leur vécu, nous pouvons comprendre que l’ensemble de ces facteurs interagissent les uns avec les autres. Il s’agirait alors d’un processus pluri-factoriel ayant comme conséquence l’apparition de symptômes physiques et psychiques qui altèrent progressivement la santé des soignants. On observe un part importante des jeunes IDE qui déclarent régulièrement des symptômes d’épuisement professionnel. Les éléments retrouvés autour de la précarité financière sont une première composante du phénomène qui peut toucher les jeunes infirmiers. La perception sur leur propre santé psychologique est altérée et les comportements qui en découlent sont plus souvent dirigés vers la prise de substances médicamenteuses que vers la consultation.

Cet élément est particulièrement intéressant dans la mesure où il s’agit de professionnels de santé ayant des connaissances sur les manifestations du mal-être et sur les prises en charge optimale. Ce constat est valable vis-à-vis du syndrome d'épuisement professionnel, les connaissances du burn-out et des risques psychosociaux inhérents à la profession ne semblent pas suffisantes.

Le soutien psychologique de la part des supérieurs hiérarchiques semble majoritairement peu présent...

Nous comprenons alors à quel point l’identification des risques psychosociaux est un enjeux pour favoriser le bien-être soignant et prévenir les syndromes d’épuisement professionnel. Les résultats du questionnaire nous permettent de constater que les jeunes soignants ne sont pas uniquement focalisés sur le constat mais sont réellement désireux d’actions pour favoriser leur bien-être et leur épanouissement professionnel. Ainsi cela nous amène à répondre à l’affirmative qu’il est essentiel de mener des actions de prévention des RPS dès le début de l'exercice professionnel. Les différentes actions proposées permettent d’établir des conclusions sur celles qui amèneraient le plus d’adhésion chez les néo IDE. Cela pourrait permettre, à terme, d’établir et de proposer un plan d’actions concrètes aux institutions à destination des soignants. Ce constat est valable vis-à-vis de l’information et de la formation en prévention des risques psychosociaux dont les jeunes IDE ne s’estiment pas assez informés.

Travailler dans le cadre d’une démarche professionnelle à la suite d’une expérience associative est riche en développement de compétences. Ce travail ainsi que le diplôme universitaire débouche sur des perspectives d’évolution professionnelle autour de la prévention des risques psychosociaux en pratiques soignantes.

*De 2016 à 2017, Antoine Jourdan a été vice-président en charge de l’innovation sociale à la Fédération Nationale des Étudiant.e.s en Soins Infirmiers (FNESI). Mes principales fonctions étaient de répondre aux besoins psychosociaux des étudiants par des projets innovants, nationaux et au sein des instituts de formation (IFSI). Ce poste impliquait la diffusion et l’accompagnement des associations d'étudiants dans la mise en oeuvre d’une semaine du bien-être au sein des IFSI avec l’intervention de sophrologues, hypnothérapeutes, profs de sports...

Rédaction Infirmiers.com


Source : infirmiers.com