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COURS IFSI

Hémochromatose : la maladie génétique la plus fréquente en France

Publié le 11/06/2020
Don de sang hémochromatose

Don de sang hémochromatose

Hémochromatose génétique dépistage

Hémochromatose génétique dépistage

A l'occasion de la Semaine nationale de sensibilisation à l'hémochromatose génétique qui a lieu chaque année au mois de juin (du 8 au 14 juin en cette année 2020) un cours sur cette maladie qui évolue insidieusement et qui touche 1 Français sur 300 s'impose. D'où la nécessité d'en connaître les signes annonciateurs pour diagnostiquer au plus tôt et traiter avant que des complications plus graves ne surviennent.

« Trop de fer, c'est l'enfer » avec l'ambassadeur humoriste Gustave Parking

C'est une anomalie génétique responsable d'une absorption excessive du fer alimentaire au niveau du duodénum qui cause l'apparition de l'hémochromatose héréditaire (HH). Non traitée, la maladie évolue en silence, risquant de provoquer des atteintes graves (cirrhose, cancer du foie, insuffisance cardiaque...), susceptibles d'entraîner une mort prématurée chez la personne atteinte. L'hémochromatose est la première maladie génétique en France. Elle atteint 1 Français sur 300, soit 200 000 patients. Elle concerne également 2,2 millions personnes en Europe et 2 millions aux USA. L’anomalie génétique responsable est la mutation du gène HFE en C282Y présent sur les deux chromosomes 6 (85% des HH). Les hommes sont plus souvent atteints par cette maladie que les femmes (3 pour 1). Les premiers signes de la maladie apparaissent le plus souvent après 40 ans, mais certaines formes d’hémochromatose juvénile peuvent débuter entre 5 et 30 ans.

L’HH est la maladie génétique la plus fréquente en France.

Hémochromatose génétique HFE1 3/1000
Hypercholestérolémie familiale 1/1000
Mucoviscidose 1/3500
Hypothyroïdie congénitale 1/4000
Myopathie de Duchene 1/10000
Phénylcétonurie 1/15000

Quid de la surcharge en fer

Les saignées - ou phlébotomies - régulières, seul traitement de l'hémochromatose (P. Lapoirie)

Les mutations génétiques entraînent la disparition de l’hepcidine (hormone du fer) qui règle l’absorption du fer au niveau du tube digestif. Pour mémoire, un sujet normal possède une réserve de 5 g de fer, répartis entre l’hémoglobine des globules rouges, la myoglobine des muscles, la ferritine et l’hémosidérine contenue dans le foie, la moelle osseuse. 20 mg de fer sont apportés par l’alimentation quotidienne, mais seuls 1 à 2 mg sont absorbés, le reste est rejeté dans le tube digestif, la sueur, l’urine. L’hyper-absorption intestinale du fer entraîne l’accumulation en trop grandes quantités de ce métal essentiel pour l'organisme et en particulier dans le foie, les glandes hormonales, le cœur ou les articulations. Chez les patients atteints d’HH, 5 à 8 mg  de fer sont absorbés tous les jours. La transferrine transporte donc une plus grande quantité de fer (80 à 100%), on dit qu’elle est saturée à 80-100%. De ce fait, le taux de ferritine (qui représente le stock de fer) augmente au fur et à mesure et passe de 300 ng/ml à 1 000 ng/ml, puis 3 000, 5 000… avec l’âge, ce qui correspond à une surcharge en fer de 10 à 40 g. Contrairement aux autres métalloïdes, le fer qui a pénétré dans l’organisme ne ressort jamais, d'où son accumulation responsable de la maladie. Il n’y a pas de régulation du métabolisme du fer d’où la maladie.

L'hémochromatose fait partie des affections de longue durée (ALD)  
www.has-sante.fr

Pour la petite histoire…

L’hémochromatose nous vient des Celtes : il y a environ 4 000 ans, quelque part en Europe du Nord, un enfant celte fut, par pur hasard, victime d’une mutation génétique lors de sa conception. Aujourd’hui, la descendance de cet enfant porte sa marque de fabrique sur ses gènes. Inconnue dans la population noire et maghrébine, peu répandue en Espagne et en Italie, l’hémochromatose est très fréquente en terre celte, c’est-à-dire en Irlande et sur notre territoire en Bretagne.

Un diagnostic précoce est indispensable

Il est important de faire un diagnostic précoce à l’âge de 20-35 ans et non à 50-70 ans comme cela se voit, lorsque le fer aura détruit les organes. Trois tests biologiques s'avèrent indispensables pour asseoir le diagnostic :

  • la saturation de la transferrine (à jeun), à 60, 80 et même 100% de fer est le super signe diagnostic ;
  • la ferritinémie (stock de fer) : elle est en général très élevée (sauf chez la jeune femme réglée ou chez certains donneurs de sang réguliers). Il faut éliminer un état inflammatoire, des cancers, les cirrhoses, le syndrome polymétabolique… ;
  • le gène HFE si ces deux premiers tests sont anormaux, permet d'affirmer avec certitude le diagnostic (mutations C282Y, H63D).

Une IRM peut permettre de mieux apprécier la surcharge en fer du foie.

Malheureusement le diagnostic d’HH est souvent fait à 50-70 ans, c’est-à-dire à la phase de complications souvent irréversibles. Soulignons que l’hémochromatose HFE1 a une gravité variable, ce qui explique ses complications. Certains malades en développent peu alors que d’autres associent plusieurs complications graves :

  • la fatigue permanente et intense ;
  • les lésions ostéo-articulaires graves chez 2/3 des patients ;
  • l’atteinte hépatique, fréquente chez 95% des malades ;
  • le diabète sucré chez 40 à 60% des HH ;
  • l’atteinte cardiaque chez 15% des malades ;
  • la mélanodermie présente chez 90% des malades, c'est une hyperpigmentation gris verdâtre due à la stimulation de la mélanogenèse dans la couche basale de l’épiderme par l’hémosidérine.

L’hémochromatose est une maladie génétique particulièrement fréquente en Bretagne et encore plus dans le Finistère. Si un Français sur 400 à 500 est porteur du gène de la maladie, c’est le cas d’un Breton sur 200 à 250 et d’un Finistérien sur 110.

Transmission familiale : quid du dépistage

La découverte d’un cas d’HH (probant) doit déclencher une enquête familiale chez ses frères, sœurs, enfants majeurs, parents. L’enjeu est motivant : ce sont souvent des sujets jeunes qui n’ont aucune manifestation clinique. La Haute Autorité de Santé conseille vivement le dépistage familial (remboursé dans certaines conditions) 

Le seul traitement : les saignées

Le traitement de l'hémochromatose est fondé sur les saignées (phlébotomies). Appliqué depuis 1947, il est simple, efficace, bien toléré, peu coûteux. Il comporte deux phases :

  • un traitement d’attaque pour éliminer la surcharge en fer qui consiste en général à pratiquer des saignées hebdomadaires de 400 à 500 ml en moyenne, durant 1 à 2 ans en fonction de la surcharge en fer. Chaque saignée permet de soustraire environ 200 à 250 mg de fer. La tolérance clinique est excellente. L’efficacité du traitement déplétif sera évaluée par la surveillance de la ferritinémie et la tolérance biologique par le taux d’hémoglobine qui doit rester supérieur à 11 g/dl. L’objectif est d’obtenir une ferritinémie ≤ 50 ng/ml.
  • un traitement d’entretien pour éviter la ré-accumulation du fer qui sera poursuivi « à vie » pour maintenir la ferritinémie ≤ 50 ng/ml. L’efficacité est d’autant plus spectaculaire que le traitement est précoce (30-35 ans). L’asthénie, la mélanodermie, les troubles cardiaques s’atténuent et peuvent disparaître. En revanche, les douleurs articulaires et le diabète disparaissent plus difficilement lorsqu’ils sont installés. Les saignées peuvent être pratiquées au domicile du patient par un infirmier libéral .

La découverte il y a quelques années de l’hepcidine, peptide impliqué dans la régulation de l’absorption digestive du fer pourrait être une voie prometteuse de traitement.

En terme d'hygiène de vie, aucun régime alimentaire n'est préconisé. Il faut simplement éviter de prendre du fer ou de la vitamine C sous forme pharmaceutique, et boire du thé est recommandé.

Habituellement, nous organisons des permanences d’informations dans les hôpitaux bretons lors de la semaine mondiale de l’hémochromatose. Mais la crise du coronavirus nous l’interdit cette année, alors que nous nous inquiétons pour les patients nouvellement diagnostiqués qui ont laissé tomber leur traitement ou qui sont en attente d’un test génétique, indique Édouard Bensoussan de l’association Hémochromatose Ouest Bretagne Pays de Loire, qui compte 300 adhérents en Bretagne.

L'hémochromatose génétique n'est plus une contre-indication au don de sang

Les saignées des personnes atteintes d'hémochromatose peuvent être transformées en un don de sang : il s'agit de dons-saignées. En effet, depuis le 18 avril 2009, l'hémochromatose n'est plus une contre-indication aux dons de sang pour les personnes qui remplissent les critères de sélection des donneurs de sang. Afin d'effectuer des dons-saignées, il faut que la personne atteinte soit suivie dans un centre de santé de l'Établissement Français du Sang, ne présente pas de contre indication au don du sang, reçoive une information sur les modalités des dons-saignées et signe un consentement.

On cherche à comprendre pourquoi, dans une même famille, la maladie peut s’exprimer de façon très différente », précise Gérald Le Gac, généticien dans l’unité Inserm 1078 créée par le Professeur Claude Férec.

Regarder la vidéo « L'hémochromatose génétique HFE1 »

Bernadette FABREGAS
Rédactrice en chef Infirmiers.com
bernadette.fabregas@infirmiers.com
@FabregasBern

En appui avec l'Association Hémochromatose France 13 rue Maurice Monti, Parc de Magaille, 30 000 Nîmes Facebook  Twitter  Youtube

Pour aller plus loin

- Site Haemochromatosis International

- Recommandation de bonne pratique : « Prise en charge de l'hémochromatose liée au gène HFE (hémochromatose de type 1) », Haute Autorité de Sant

- Site de la Société française de Gastro Entérologie

- Hémochromatose : comment gérer les déchets des saignées

- Association Hémochromatose France


Source : infirmiers.com