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Cours-Cardiologie- l’insuffisance cardiaque

Publié le 24/09/2018
Cours-Cardiologie- l’insuffisance cardiaque

Cours-Cardiologie- l’insuffisance cardiaque

Du 22 au 30 septembre se déroule la semaine du cœur, un événement organisé par la Fédération Française de Cardiologie. L’occasion de faire le point sur une pathologie chronique avec des conséquences humaines non négligeables et pourtant méconnue : l’insuffisance cardiaque. En effet, plus d’un million de personnes seraient atteintes de cette maladie, un chiffre sous-estimé selon les spécialistes.

L’insuffisance cardiaque se définit par un état physiopathologique au cours duquel le cœur a des difficultés à assurer un débit sanguin suffisant pour répondre aux besoins métaboliques des différents organes vitaux de notre organisme.

Plus d’un million de personnes sont concernées par l’insuffisance cardiaque en France . Le Groupe Insuffisance Cardiaque & Cardiomyopathies (GICC) de la Société Française Cardiologie (SFC), souhaite interpeler les patients, le grand public et les politiques sur cette priorité de santé publique. En effet, cette maladie chronique, évolutive et émaillée de complications aiguës entraine chaque année près de 200 000 hospitalisations et cause le décès de 70 000 personnes. La méconnaissance de ses symptômes et la sous-utilisation du terme insuffisance cardiaque dans le grand public sont en partie responsables d’un diagnostic et d’une prise en charge souvent trop tardifs. Informer permettrait certainement d’éviter de nombreuses hospitalisations ou de décès et d’améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d’insuffisance cardiaque.

Qu'est-ce que l'insuffisance cardiaque ?

L'insuffisance cardiaque est un état pathologique indiquant que la pompe cardiaque n'est plus capable d'assurer un débit sanguin suffisant pour satisfaire les besoins de l'organisme.

Pour assurer l'expulsion du sang dans l'ensemble du corps, le cœur est habitué à compenser dans certaines situations : par exemple, en cas d'effort, il augmente sa fréquence et son débit. En cas de maladie des valves, des artères ou du muscle lui-même, le cœur va fournir plus d'efforts pour remplir sa mission ce qui peut entraîner, à la longue, des modifications physiologiques, par exemple son hypertrophie ou un épaississement des parois des ventricules. A leur tour, celles-ci diminuent ses capacités à compenser.

A ce stade, le cœur n'est plus capable d'assurer un débit de sang suffisant pour couvrir les besoins du corps en oxygène, d'abord en cas d'effort puis même au repos.

Contrairement aux idées reçues, cette pathologie n'est pas limitée au cœur. Elle n’est pas non plus une maladie de vieillard même si elle survient, dans la majorité des cas, chez des sujets âgés ou très âgés. Elle peut aussi être une maladie de l'enfant et de la femme enceinte, une urgence vitale (œdème aigu pulmonaire, mort subite), une maladie infectieuse et susceptible de guérison (myocardite), une maladie génétique et familiale, une maladie de l'alimentation (alcool, déficit vitaminique...).

L’insuffisance cardiaque diastolique

C'est l’Insuffisance cardiaque de remplissage . Elle est, le plus souvent, la conséquence d'un muscle cardiaque épaissi, rigidifié. Le volume de sang envoyé dans l'organisme se réduit avec par voie de conséquence le niveau d'oxygène et des autres substances vitales qu'il transporte.

La première cause de cette pathologie est l'hypertension artérielle , maladie souvent sans symptôme apparent (on la surnomme le tueur silencieux). Mal ou non traitée, elle aboutit à la longue à un épaississement du muscle cardiaque, qui s'est heurté pendant des années à un forte pression des artères et a dû pousser plus fort pour maintenir un débit constant.

Toutefois, un rétrécissement de la valve aortique, entre le ventricule gauche et l’aorte, est une autre cause de l’insuffisance cardiaque diastolique. Avec l'âge, cette valve peut se calcifier et devenir un obstacle au libre passage du sang, obligeant le cœur à lutter pour forcer le passage, conduisant à l'épaississement du muscle cardiaque et la réduction de sa puissance.

L’insuffisance cardiaque systolique

Dans la majorité des cas, l’insuffisance cardiaque systolique est ischémique (liée à une atteinte coronaire). Lorsque ce n'est pas le cas, il s’agit d’un affaiblissement primitif du muscle cardiaque pour lequel on ne trouve pas d’explication dans 90% des cas, on parlera alors d’une cardiomyopathie dilatée idiopathique.

Quelles en sont les causes ?

Au niveau biologique, la maladie peut-être le résultat de lésions cardiaques comme les cardiomyopathies, ou les pathologies pulmonaires, qui peuvent gêner la circulation du sang ce qui se répercute sur l'efficience du cœur droit. Les maladies des valves sont également sur la liste des facteurs de risques car elles assurent l'étanchéité et le passage du sang dans le cœur, que ce soit entre les oreillettes et les ventricules, ou entre ceux-ci et les artères (aorte et artère pulmonaire). Ces clapets peuvent présenter un rétrécissement, ce qui freine le passage du sang ou, au contraire, ils ne sont plus suffisamment étanches au bon moment, entraînant un reflux du sang en sens inverse. Le muscle cardiaque est donc obligé d’augmenter les volumes qu'il doit éjecter pour assurer sa mission.

Certaines cardiomyopathies peuvent être d'origine génétique, suite à la mutation d'un gène spécifique, telle la cardiomyopathie hypertrophique familiale. Selon son type, l'apparition de la maladie peut être plus ou moins tardive, de la petite enfance à l'âge adulte, même si le gène mutant est présent dès la naissance.

 © La fédération française de cardiologie

Chez les patients plus jeunes les dysfonctions cardiaques à des myocardites d’origine infectieuse, à des atteintes toxiques, en particulier par une consommation excessive d’alcool ou à des cardiomyopathies infiltratives. En outre, elles peuvent aussi être dues à des cardiomyopathies génétiques, suite à la mutation d'un gène spécifique, telle la cardiomyopathie hypertrophique familiale. Selon son type, l'apparition de la maladie peut être plus ou moins tardive, de la petite enfance à l'âge adulte, même si la variante génétique anormale est présente dès la naissance. D’ailleurs, il peut être utile d'identifier où se trouve la mutation en question afin de mieux guider la prise en charge du patient, et de compléter ce test par une enquête.

Dans tous les cas, les facteurs comportementaux tels que le tabagisme, le manque d’activité physique, l’excès de poids et la consommation excessive d’alcool font le terrain de l’insuffisance cardiaque.

"EPOF" : les symptômes à connaître

Quatre symptômes constituent les signes d'alerte d'une insuffisance cardiaque (il est possible de présenter un ou plusieurs de ces signes de façon concomitante) :

  • L’essoufflement à l'effort et/ou en position allongée (E),
  • La prise de poids importante en quelques jours (P),
  • L’œdème, des membres inférieurs avec les jambes et les pieds gonflés (O),
  • Une fatigue importante, y compris pour un petit effort, qui entraine une baisse de l’activité avec aggravation de la perte musculaire (F)

En effet, l’insuffisance cardiaque se définit par un état physiopathologique au cours duquel le cœur a des difficultés à assurer un débit sanguin suffisant pour répondre aux besoins métaboliques des différents organes vitaux de notre organisme. Or, lorsque le cœur dysfonctionne, la pression du sang augmente en amont du cœur, c’est-à-dire au niveau des poumons expliquant l’essoufflement, puis au niveau du foie et du système veineux expliquant les œdèmes et la prise de poids. En aval du cœur, la diminution du débit sanguin atteint le rein qui va éliminer moins de sel et d’eau, aggravant les œdèmes et atteint les muscles expliquant la fatigue ressentie à l’effort.

Ces symptômes pris isolément sont peu spécifiques mais leur association et leur survenue récente sont particulièrement évocateurs de la pathologie. Pourtant, d’après l’étude réalisée par le GICC, deux tiers des personnes ayant les 4 signes d’insuffisance cardiaque n’ont pas consulté de cardiologue dans les 12 mois précédents, preuve que ces symptômes ne pas reconnus par les patients comme signes de maladie cardiaque.

Non diagnostiqué à temps, cette maladie peut provoquer de graves complications. La plus fréquente reste l'hospitalisation pour une poussée d'insuffisance cardiaque encore appelée décompensation cardiaque. Elle se manifeste souvent par un œdème pulmonaire. La mort subite par fibrillation ventriculaire peut également être causé par une insuffisance cardiaque.

Il faudrait des moyens supplémentaires pour dépister davantage, développer plus de structures multidisciplinaires spécialisées et faire prendre conscience de l’importance de l’éducation thérapeutique dès le début de la maladie.

Une prise en charge multidisciplinaire

Une fois porté le diagnostic d’insuffisance cardiaque, il faut en préciser l'origine et rechercher, en particulier, une cause curable. Celle-ci peut être, par exemple, une maladie valvulaire corrigeable par chirurgie, ou encore une maladie coronaire améliorable par angioplastie ou pontage coronaire. D'autres facteurs peuvent être impliqués dans la pathologie constatée et qui peuvent nécessiter un traitement particulier : grippe, infection broncho-pulmonaire, troubles du rythme, embolie pulmonaire ou anémie. Quoiqu’il en soit un régime hyposodé sera de mise.

De manière générale, l’insuffisance cardiaque est une maladie chronique. La prise en charge est donc multidisciplinaire et garde pour objectif de ralentir sa progression, d’améliorer la qualité de vie des patients et de réduire au maximum les risques de complications. Celle-ci inclut plusieurs modalités de soins tels que les médicaments, les pacemakers, les mesures diététiques, ou l’éducation thérapeutique.

En ce qui concerne les traitements médicamenteux, selon le diagnostic, différentes familles de traitements peuvent en effet être associées et modifiées avec le temps et l'évolution de la maladie. Les diurétiques sont employés car ils augmentent l'élimination de l'eau et du sel par les reins, réduisent la congestion quand le cœur, les poumons ou les autres organes, comme le foie, sont engorgés. Les inhibiteurs de l'enzyme de conversion, assouplissent les vaisseaux et améliorent ainsi la circulation du sang tout en limitant la dilatation du ventricule gauche après un infarctus. Ils sont utiles à tous les stades de la maladie et ne peuvent être pris que sous surveillance médicale. En parallèle, les bêta-bloquants diminuent les besoins du cœur en oxygène en le ralentissant, facilitant son travail. En outre, la digoxine, une substance largement utilisée pour ralentir la fréquence cardiaque et améliorer le remplissage du cœur dans les cas d'arythmie complète rapide, peut être prescrite en complément des autres médicaments, notamment des diurétiques.

Au niveau de l’hygiène de vie, la première recommandation est une alimentation peu salée de l’ordre de 4 à 6 grammes de sel par jour. Pour cela, il faut éviter de resaler les plats, avoir recours aux sels de remplacement, et limiter les principaux aliments qui en sont riches comme la charcuterie, les fromages, les viennoiseries, pâtisseries et les plats cuisinés industriels. Toutefois, un régime hyposodé trop strict peut entraîner un risque de dénutrition chez les sujets âgés ! L’alcool et le tabac ayant un effet direct sur la pression artérielle, la deuxième recommandation est double : arrêt du tabac et une consommation d’alcool limitée. Se peser quotidiennement est une autre préconisation capitale, car il est nécessaire de consulter rapidement son médecin en cas de prise de poids rapide (sur 2 ou 3 jours), cela pouvant être un signal d’alerte d’une décompensation.

Si l’exercice physique est bénéfique pour la majorité des personnes atteintes d’insuffisance cardiaque, il est impératif d’arrêter immédiatement toute activité si l’un des symptômes suivants apparait : essoufflement, vertiges, douleurs dans la poitrine, nausées ou sueurs froides. En effet, en cas de poussée, le repos reste de vigueur.

A côté des médicaments et des mesures d’hygiène, des réponses techniques existent. Par exemple, la resynchronisation cardiaque au moyen d'un stimulateur bi-ventriculaire implantable peut être bénéfique chez les malades avec des troubles conductifs intraventriculaires gauches.

La transplantation cardiaque peut, chez des patients bien sélectionnés dont la pathologie résiste au traitement médical, transformer la qualité de vie et augmenter la survie, mais souvent au prix d'effets secondaires qu'il ne faut pas négliger.

Devant la pénurie des greffons, les procédés d'assistance circulatoire mécanique se sont développés (par exemple le procédé Novacor, un ventricule gauche d'assistance mécanique conçu pour proposer une assistance circulatoire de longue durée tout en permettant au patient un retour à une vie quasi normale). Cependant, à l’heure actuelle, la greffe cardiaque et les systèmes d’assistance cardiaque représente une très faible minorité des cas (moins de 1%).

Prévention secondaire et éducation thérapeutique

Il existe 3 grandes catégories de patients atteints d’insuffisance cardiaque :

  • Les personnes âgées de plus de 70 ans, à haut risque cardiovasculaire, diabétiques , hypertendus (20% des hypertendus et diabétiques vont devenir insuffisants cardiaques) ;
  • Les personnes âgées de 50 et 70 ans qui ont eu un infarctus du myocarde (après un infarctus, 1 patient sur 3 va faire une insuffisance cardiaque) ;
  • Les plus jeunes atteints de de cardiopathie génétique ou virale ou par intoxication (alcool ou médicaments).

Cette maladie garde un fort impact sur la vie quotidienne des patients. Plus précisément, plus de la moitié des adultes atteints d’insuffisance cardiaque, se déclarent en mauvaise ou très mauvaise santé, à comparer à 9 % pour les personnes non touchées. La moitié d’entre eux s’estime fortement limitée dans leurs activités quotidiennes. Les actifs de la tranche 25-59 ans représentant 39 % des personnes atteintes, or, les conséquences sur leur vie professionnelle (nombreux arrêts de travail, mise en incapacité de travail…) est loin d’être négligeable. Valérie Jourdain Müller, vice-présidente de l’association SIC (pour Soutien à l’Insuffisance Cardiaque) raconte son expérience en tant que patiente : à partir du moment où l’on s’approprie sa maladie, la vie continue, mais on l’organise différemment avec son entourage. Ce qui est compliqué, c’est de tenir tous les jours : surveiller son alimentation, contrôler son poids, prendre régulièrement ses médicaments et avoir une activité physique régulière. Le rôle de l’association est de vous accompagner sur la durée.

Une éducation attentive est donc nécessaire pour que les patients comprennent mieux leur maladie. Ils pourront ainsi reconnaître les différents symptômes annonciateurs d'une poussée évolutive (prise de poids, essoufflement plus important, fatigue anormale, palpitations…). De même, l'observance du traitement, une bonne hygiène de vie ainsi que le respect du régime (afin d'éviter tout écart, notamment en sel) demeurent indispensables.

Il existe des centres de réadaptation pour ré-entrainer à l’effort et éduquer les patients. Ceux-ci sont particulièrement utiles car permettent une prise en charge globale notamment grâce aux équipes multidisciplinaires constituées de cardiologues, d’infirmières, de kinésithérapeutes, d’éducateurs en Activité Physique Adaptée (APA) et de diététiciens. Tous ces professionnels sont spécifiquement formés à l’éducation thérapeutique et au réentrainement physique pour faire face à cette pathologie. Néanmoins, seulement 15% des insuffisants cardiaques ont accès à ces centres qui restent en nombre encore insuffisants en France.

à partir du moment où l’on s’approprie sa maladie, la vie continue, mais on l’organise différemment avec son entourage. Ce qui est compliqué, c’est de tenir tous les jours : surveiller son alimentation, contrôler son poids, prendre régulièrement ses médicaments.

Une priorité de santé publique

Or, la prévalence de cette maladie continue d’augmenter en raison du vieillissement de la population et de l’amélioration de la prise en charge des différentes pathologies cardiaques qui tuent beaucoup moins mais dont un certain nombre va évoluer vers l’insuffisance cardiaque. Selon la la Haute Autorité de santé, en 2015, cette prévalence était estimée à 2,3 % dans la population adulte et à 1,8 % dans l’ensemble de la population française (soit environ 1 130 000 personnes).

Mais cette pathologie est très probablement sous diagnostiquée, car peu connue par le grand public, comme le met en évidence l’étude réalisée par le GICC auprès de 4 926 français âgés de 18 à 80 ans interrogés entre mars et avril 2017. D’après ce sondage, la prévalence de l’insuffisance cardiaque serait de 3,6%, soit le double des estimations officielles. Le nombre exact de français qui en sont atteints est sans aucun doute sous-estimé par les Autorités de santé et pourrait atteindre les 2 millions. Selon des travaux menés par l’INVS, cette maladie serait la cause de 73 000 décès chaque année, c’est-à-dire 7 fois plus que l’infarctus du myocarde et plus de 14 fois plus que les accidents de la route. En 2009, on a constaté 152 601 hospitalisations pour insuffisance cardiaque dans la population française bénéficiant du régime général de l’Assurance maladie. Aujourd’hui, ce nombre est evalué à plus de 165 0004.

Thibaud Damy, Professeur de Cardiologie à l’Hôpital Henri Mondor à Créteil et Président du GICC estime que : le manque de notoriété des symptômes de l’insuffisance cardiaque au sein du grand public entraine un retard incontestable au diagnostic et dans la prise en charge des malades. Il faudrait des moyens supplémentaires pour dépister davantage, développer plus de structures multidisciplinaires spécialisées et faire prendre conscience de l’importance de l’éducation thérapeutique dès le début de la maladie. La prévention et l’information sont capitales pour agir précocement. C’est pourquoi plusieurs actions de communication ont été menées afin de donner plus de visibilité à cette maladie. Par exemple, un site internet spécifiquement dédié à destination des professionnels de santé comme du grand public sera bientôt accessible. Une Journée européenne a également été mise en place chaque année en mai.

Roxane Curtet Journaliste infirmiers.com roxane.curtet@infirmiers.com  @roxane0706


Source : infirmiers.com