PROPOSITION DE LOI

Statut d'aide-soignant indépendant : un texte suscite la colère des IDEL

Publié le 07/06/2024

Une proposition de loi déposée par plusieurs députés à l'Assemblée nationale entend créer un statut d'aide-soignant indépendant, suscitant immédiatement une levée de boucliers chez les infirmiers libéraux, dans un contexte de revendications pour une meilleure rémunération.

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La temporalité est « catastrophique », déplore le Syndical national des infirmiers libéraux (Sniil) ; c’est une orientation aussi « insupportable qu’irresponsable », tacle Convergence Infirmière. L’objet de leur courroux : une proposition de loi, déposée par des députés Renaissance et Modem le 28 mai dernier en vue de créer un statut d’aide-soignant indépendant. Avec la volonté d’offrir par ailleurs à ces professionnels « la reconnaissance et les avantages que ces professionnels méritent, tout en leur garantissant des perspectives d’évolution professionnelle et des conditions de travail optimales ». Si les auteurs de la PPL y voient à la fois un moyen de faire une « économie substantielle » et « une solution supplémentaire à la résorption des déserts médicaux », l’idée hérisse surtout les infirmiers libéraux (IDEL). Ils y voient une menace pour leur exercice et une possible dégradation des soins pour les patients.

Un risque pour les patients et le métier d'IDEL

La proposition de loi évoque ainsi la possibilité pour les aides-soignants de se voir « déléguer par l’infirmier certains actes accomplis et soins dispensés » dans le cadre de protocoles de collaboration entre aide-soignant et infirmier, et dans les établissements ou services à domicile à caractère sanitaire, social ou médico‑social, dans les champs des soins courants de la vie quotidienne liés à un état de santé ou à une pathologie chronique stabilisés. Une perspective qui inquiète Convergence Infirmière, qui relève que « certains actes lourds de conséquences pourraient être effectués par les aides-soignants au mépris de l’intérêt des patients ». Le syndicat met notamment en avant la nécessité absolue de voir intervenir auprès des patients des professionnels dûment formés, en particulier pour limiter les décès. Des études « établissent que le rôle des infirmières et des infirmiers est fondamental » dans le suivi des pathologies chroniques.

Plus nuancé, le SNIIL s’interroge plus sur la temporalité de cette PPL, alors « que celle en cours depuis des mois sur la refonte de la profession infirmière n’est toujours pas aboutie et contredit les propos du ministère souhaitant remettre en avant le rôle propre infirmier ». Établir un texte qui créerait un tel statut d’indépendant pour les aides-soignants alors même que le nouveau référentiel infirmier n’est pas encore défini représenterait ainsi « un véritable non-sens ». Le syndicat craint également une « confusion » des rôles et un chevauchement des compétences entre infirmiers et aides-soignants, ainsi « qu’une concurrence tarifaire » et une perte d’attractivité pour le métier d’infirmier libéral. « Cette situation serait tout simplement intolérable vis-à-vis d’une profession qui se mobilise depuis des mois pour faire entendre son manque de reconnaissance et ses difficultés financières », dénonce-t-il, tout en reconnaissant par ailleurs qu’il est « compréhensible de faire gagner les aides-soignants en autonomie ».

Une PPL malvenue dans un contexte tendu

L’idée d’un statut libéral pour les aides-soignants n’est pas nouvelle. Lors de la réingénierie de la formation des aides-soignants et de l’extension de leurs compétences, les IDEL s’inquiétaient déjà de son éventuelle création. En septembre 2023, plusieurs organisations représentatives de la profession, dont Convergence Infirmière, avaient déposé un recours devant le Conseil d’État pour faire supprimer un texte créant une formation accélérée d’infirmiers pour certains aides-soignants. La PPL parait donc d’autant plus malvenue que les IDEL alertent depuis des mois sur leurs conditions de travail dégradées et réclament l’ouverture de négociations conventionnelles, qui n’auront lieu qu’en fin d’année, dans le meilleur des cas. « Nous appelons les IDEL à sensibiliser par tous les moyens les députés Renaissance et Modem qui ont signé ce texte dont la mise en œuvre serait à la fois un désastre sanitaire et la fin programmée de notre profession », conclut  Convergence, tandis que le SNIIL, lui, « somme les instances à revoir leur copie et sortir les textes réglementaires dans le bon ordre. »

La Rédaction d'Infirmiers.com

Source : infirmiers.com